Pour cause de référendum grec, les membres de la zone euro sont tétanisés. Quand on songe aux remous financiers que l'évocation de ce scrutin a d'ores et déjà suscités, on comprend qu'Angela Merkel et Nicolas Sarkozy aient passablement sursauté. Reste que le premier ministre grec Georges Papandréou n'avait pas d'autre solution que de concentrer davantage de lumière vers le grand absent des derniers mois: le peuple grec.
Reprenons dans l'ordre. À l'automne 2009, Papandréou a le courage d'annoncer au monde que, les administrations antérieures ayant maquillé les livres avec la complicité de Goldman Sachs, la dette de son pays était beaucoup plus élevée qu'on ne l'avait avancé. Conséquemment, une crise vint se greffer à celles qui rythmaient l'économie du monde depuis l'effondrement en septembre 2008 de Lehman Brothers. Et quand les dirigeants de la Vieille Europe ont-ils daigné accorder, moyennant intérêts, de l'argent à Athènes? À cause de l'oreille attentive que Merkel a prêtée aux sirènes du populisme allemand, il a fallu attendre avril 2010 avant que l'on commence sérieusement à coucher sur papier un plan d'aide.
Ce plan ayant été conçu à l'aune de l'avarice, un deuxième puis un troisième, on ne sait plus combien, ont été confectionnés à l'enseigne du grippe-sou. Jamais, c'est à retenir, Merkel, Sarkozy et consorts ne sont parvenus à aligner la somme des soutiens nécessaires aux tracas économiques dont ils connaissaient tous les contours. À cause d'une gestion désastreuse, voire lâche, du temps écono-politique, le problème grec a pris une ampleur colossale. On ne soulignera jamais assez que, lors de la «naissance» du problème, il équivalait seulement à 3 % du PIB de la zone euro, contre 18 % (!) aujourd'hui.
La chaîne d'austérité ayant été imposée aux Grecs sans qu'on leur demande leur avis, ceux-ci ont logiquement multiplié les manifestations. Et ce, avec d'autant plus de constance que cette ribambelle de plans s'est traduite par le rabotage progressif de la souveraineté grecque. Autrement dit, depuis dix-huit mois Athènes est sous tutelle étrangère.
Après une énième réunion tenue la semaine dernière, les 17 membres de la zone euro ont conçu, forceps aidant, le «dernier» plan. Grâce à Merkel, il faut le reconnaître, les banques, les compagnies d'assurances et autres fonds ont été mis dans l'obligation d'encaisser une perte plus importante que celle envisagée au préalable: 50 % eu lieu de 30 %. Mais le délai fixé au chapelet d'austérités reste et demeure dix ans, soit un des plus longs jamais écrits dans l'histoire. Pour cette raison, et bien d'autres évidemment, Papandréou avait le devoir politique d'observer les règles de la démocratie et donc de consulter le peuple.
Il l'a fait, et ce geste doit être salué. Car en agissant de la sorte, il claironne le retour du politique. À sa manière, il fait écho aux principes qui avaient convaincu Philippe Séguin, ex-poids lourd de la politique française, de se poser en principal adversaire du Traité de Maastricht. Tel que ficelé, affirmait-il, ce traité va consacrer la réduction de l'espace politique au profit de l'économique ou, si on veut, la réduction de l'influence de l'élu au profit du non-élu. Qui plus est, ce n'est pas la faute des Grecs si la création de l'euro a été bâclée. Ce n'est pas leur faute si les mesures nécessaires à la quantification de tel vice économique ou financier se sont révélées plus d'une fois déficientes. Et ce n'est évidemment pas leur faute si le pays qui a le plus profité de l'euro s'appelle... l'Allemagne.
En appelant les Grecs aux urnes, Papandréou oblige, on l'espère, ses homologues à faire tôt ou tard un acte de contrition sur le thème: l'euro ressemble à une installation post-moderne. En clair, il présente un énorme déficit sur le plan de la rationalité.
Crise de l'euro
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