Même si la démission de Line Beauchamp peut paraître invraisemblable, elle ne m’étonne absolument pas. Pour bien des observateurs qui ont déjà participé à des négociations comme ce fût mon cas, il était évident que Line Beauchamp avait un mandat trop restreint pour pouvoir convenir d’une sortie de crise avec les étudiants.
Jean Charest l’a donc volontairement sacrifié en ne lui donnant pas suffisamment de marge de manœuvre pour qu’elle puisse s’en sortir élégamment, d’autant plus, qu’à la veille des auditions de la commission Charbonneau et de probables élections, elle avait déjà mis son gouvernement dans l’embarras pour avoir organisé en 2009 une activité de financement du parti libéral à laquelle participait Domenico Arcuri, un présumé membre de la mafia montréalaise.
Line Beauchamp aurait certainement pu tirer sa révérence sur une note plus heureuse en acceptant le moratoire et les États généraux sur les universités que lui proposaient les étudiants, une ouverture qui aurait pu rallier de nombreux acteurs du milieu universitaire.
Le recours aux États généraux aurait eu l’immense avantage de nous extraire du navrant débat idéologique dans lequel nous ont confinés le gouvernement et ses alliés des universités et des médias qui ont refusé d’aborder, tout au long de ce conflit, plusieurs questions de fond qui méritaient des réponses, avant même que l’on songe à hausser les droits de scolarité, entre autres, au sujet des trois volets de la mission universitaire que sont l’enseignement, la recherche et les services à la collectivité.
Comment ne pas constater que la recherche qui se fait dans nos universités profite davantage aux entreprises et à leurs dirigeants qu’aux étudiants de premier cycle à qui l’on demande de payer pour l’embauche de nouveaux professeurs qui consacreront l’essentiel de leur tâche à la recherche, pas à l’enseignement de premier cycle?
Historiquement, au Québec, la recherche a toujours été financée par les fonds publics, pas par les étudiants.
D’ailleurs, les coûts associés à l’enseignement n’ont presque pas évolué au cours des dix dernières années, alors que, pendant la même période, ceux associés à la recherche ont littéralement explosé.
À quoi servent nos impôts?
Au cas où les Québécois ne l’auraient pas encore remarqué, les familles québécoises payent en moyenne 6600$ de plus en impôts et taxes que les familles des autres provinces canadiennes.
Il est donc faux de prétendre que les Canadiens des autres provinces payent plus cher les études universitaires de leurs enfants alors que les Québécois les payent à même leurs impôts.
Il y a une limite à rire des Québécois en prétendant que refiler la facture aux étudiants épargnera les familles de la classe moyenne, alors que nous savons bien que ce sont ces familles qui paieront d'une façon ou d'une autre!
***
Sur le même sujet :
Une mauvaise entente
Les étudiants ont raison
La FECQ, la FEUQ et la CLASSE doivent se coordonner sous une même coalition afin d’empêcher le gouvernement de les diviser
Céder au cynisme de la presse, des recteurs et du gouvernement ?
La stratégie de la bêtise ou quand les recteurs se taisent contre l’intérêt public
Trois idées reçues
Les étudiants, les grands perdants ; les dirigeants, les grands gagnants !
Quelle crise des universités?
Jean Charest brûle un autre ministre
L'invraisemblable sacrifice de Line Beauchamp
Un mandat trop étroit pour une sortie de crise
Chronique de Louis Lapointe
Louis Lapointe534 articles
L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fon...
Cliquer ici pour plus d'information
L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé