L'horreur

Il faudra alors mesurer la grande faiblesse de l'Occident, la terrible fragilité de ses valeurs. Et tenter de calculer le coût à venir de ce qui serait à la fois une défaite et une démission.

GESCA beurre épais... La rhétorique du "choc des civilisations"...

Au Québec, la réaction sera terrible, c'est entendu. Après le décès tout récent de Simon Longtin, premier homme du Royal 22e Régiment à mourir en Afghanistan (et dont le corps était au même moment rapatrié), deux autres soldats de Valcartier ont été tués, hier, et un caméraman de Radio-Canada, Charles Dubois, grièvement blessé. Le reporter Patrice Roy, qui abat une besogne admirable, a été durement secoué.


Ainsi, quelques heures après que La Presse eut publié un nouveau sondage révélant que l'appui des Québécois à l'opération afghane est déjà au plus bas (près de sept sur 10 s'y opposent), une nouvelle horreur survient, qui va encore creuser ce ressentiment.
On fustigera le complot Harper-Bush, unis dans une guerre d'agression contre les Afghans. Et l'impérialisme. Et le colonialisme. Et le pétrole... même s'il n'y en a pas en Afghanistan. Cela ne viendra pas que des suspects habituels, les anti-tout qu'on voit défiler dans les rues... en utilisant eux-mêmes la violence qu'ils estiment nécessaire. Cela viendra aussi des oppositions parlementaires officielles, qui connaissent mieux, bien sûr, mais dont le devoir le plus strict est de s'opposer, n'est-ce pas? Cela viendra enfin de citoyens qui sont de bonne foi, mais qui, comme l'immense majorité des Occidentaux, ne supportent plus l'idée même du combat, fut-il légal, moral, nécessaire et honorable.
Tous ceux-là auront raison, d'une certaine façon. Qu'avons-nous aujourd'hui à faire en Afghanistan, en effet? Et pourquoi serions-nous allés jadis au Rwanda ou en Sierra Leone? Et qu'irions-nous faire demain au Darfour, ou en Somalie, ou en quelque autre endroit misérable du monde où la paix ne pourrait être instaurée que par les armes - ce que tout le monde sait très bien, au fond, mais il est plus confortable de ne pas y penser.
La possibilité existe que l'opération afghane s'avère un fiasco. Possible que le pays retourne à son étrange routine de sang et d'oppression, de misère absolue et d'ignorance imposée, de chefs de guerre et de fous de dieu.
Il faudra alors mesurer la grande faiblesse de l'Occident, la terrible fragilité de ses valeurs. Et tenter de calculer le coût à venir de ce qui serait à la fois une défaite et une démission.
mroy@lapresse.ca


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