De retour de Chine et à l’occasion du caucus présessionnel de son parti, la semaine devait marquer la grande rentrée de Philippe Couillard, dans cette séquence qui nous conduira aux élections du 1er octobre 2018. Pourtant, en revenant sur les derniers jours, on se demande si une partie du cerveau du premier ministre n’est pas restée en vacances.
On a d’abord vu le chef libéral lors de la commémoration de la tragédie de la mosquée de Québec. Moins remarqué que Justin Trudeau, il n’a quand même pas pu s’empêcher de faire de la politique et de prêcher sa conception personnelle de la société québécoise.
Néo-populo
« On est tous venus d’ailleurs rejoindre les Premières Nations, il n’y a que la date qui change. ». On reprend ici la rhétorique répandue chez les politiciens selon laquelle nous serions tous des immigrants.
Le problème avec cette approche, c’est qu’elle ne satisfait personne. Pour la majorité des Québécois, cela revient à nier que cette nation fut créée en français. Les multiculturalistes, de leur côté, considèrent que les descendants du colon n’égalent pas l’autochtone en pureté ni l’immigrant en noblesse.
Philippe Couillard ne s’est pas arrêté là en fait de propos étranges. Chauffant ses troupes mardi soir et empruntant son ton néo-populo si peu naturel, il a expliqué que les baisses d’impôt ne constituaient pas des cadeaux aux Québécois. On aurait plutôt choisi de leur retourner ces sommes parce « qu’on n’avait pas besoin de tout l’argent [...] envoyé pour faire la job ».
La pensée crie, disait Freud. Après avoir appliqué des compressions dans les services publics, on redonne les montants dégagés aux contribuables.
La rigueur « austéritaire » n’avait-elle pas pour but de sauver les programmes sociaux ? Eh bien non. C’était pour baisser les impôts.
Perte de contact
La folle cavalcade s’est poursuivie le lendemain alors que le premier ministre fut appelé à commenter la crise inattendue des infirmières exténuées. Dans un élan de sincérité sur le système de santé, il s’est permis la réflexion suivante : « Les gens qui travaillent sont toujours poussés à bout. C’est admirable. »
On comprend que la phrase se veut empathique pour les membres d’une profession exigeante. Reste que ça donne froid dans le dos d’entendre le Dr Couillard admettre que le système repose sur l’épuisement des travailleuses.
Surtout venant du chef d’un gouvernement qu’on accuse de n’en avoir eu que pour les médecins. Les caricaturistes l’auront remarqué.
En pleine année électorale, ce malaise vis-à-vis la catégorie d’employés du secteur public la plus appréciée de la population, soit les infirmières, est un caillou dans la chaussure du gouvernement. On voudra certainement s’asseoir rapidement pour trouver des solutions et tasser ça de l’actualité.
Cela étant, alors que l’échéance approche et que les sondages sont peu favorables à son parti, on sent un flottement bizarre autour de Philippe Couillard. Une espèce de perte de contact avec la réalité qui ne doit rassurer personne, au Parti libéral.
Vivement que le premier ministre retrouve ses esprits et ne reproduise pas l’étrange semaine qui vient de survenir, car le match qu’on attend entre la CAQ et le PLQ d’ici le 1er octobre risque de demeurer à sens unique.