Le redéploiement stratégique de Power Corp.

L’appétit vorace de «l’oncle» Paul

Le moment est venu pour les Québécois de reprendre en mains les leviers de leur État

Chronique de Richard Le Hir

Si j’en parle autant, c’est que malgré son apparente discrétion, il n’y a pas une opération financière d’envergure au Québec dans laquelle on ne retrouve pas sa trace. Comme j’ai déjà eu l’occasion de l’écrire dans le passé, on ne peut guère reprocher à un loup d’être un loup, mais on peut certainement reprocher au berger d’être de connivence avec lui pour lui ouvrir toutes grandes les portes de la bergerie. Et, vous l’aurez deviné, le berger, c’est notre frisé national, Jean Charest.

Si Power Corp. était à l’origine une entreprise qui oeuvrait dans la production de l’énergie comme le suggère son nom, elle s’est surtout orientée vers le secteur des services financiers lorsque Paul Desmarais en a pris le contrôle au début des années 1960, à une époque où cette industrie était en plein essor, et les services financiers comptent encore pour la plus grande part de ses activités, comme on peut le constater en procédant à l’examen de l’organigramme des participations de l’entreprise.

Au début des années 1980, Paul Desmarais et son comparse belge Albert Frère parviennent à mettre la main sur une filiale suisse de la banque française Paribas qui était sur le point d’être nationalisée par le gouvernement socialiste nouvellement élu du président français François Mitterrand.

Peu de temps après cette opération qui fut à l’époque controversée, cette banque d’investissement refaisait surface sous le nom de Pargesa, et c’est elle qui détient maintenant les participations de Power et des familles Desmarais et Frère dans les grands groupes industriels que sont Imerys (leader mondial des minéraux industriels), Lafarge (leader mondial des matériaux de construction et notamment le ciment), GDF-Suez (1er producteur indépendant d’électricité dans le monde, 1er acheteur de gaz naturel et importateur en gaz naturel liquéfié en Europe, 1er réseau de transport et de distribution de gaz en Europe, etc), Suez Environnement (gestion de l’eau et des déchets), Total (grande multinationale française du pétrole), Pernod-Ricard (boissons alcoolisées), et quelques autres participations moins importantes via le Groupe-Bruxelles Lambert dans les secteurs de l’énergie (Iberdrola), de la pétrochimie (Arkema), etc.

Avec les années, le placement de Power Corp et de la famille Desmarais dans Pargesa a pris beaucoup d’importance et en est venu à revêtir une importance stratégique vitale, dans la mesure où il risque fort d’assurer l’avenir du groupe. En effet, le secteur des services financiers a été durement ébranlé au cours des dernières années avec la crise financière de 2008 dont les effets ne sont pas encore tous résorbés, et il n’y a aucun doute qu’il serait encore plus durement éprouvé par une nouvelle crise comme celle qui semble de plus en plus inévitable dans un avenir prochain
http://www.leap2020.eu/GEAB-N-56-Special-Ete-2011-est-disponible-Crise-systemique-globale-Derniere-alerte-avant-le-choc-de-l-Automne-2011_a6658.html

http://www.marketwatch.com/story/the-next-worse-financial-crisis-2011-07-06?dist=beforebell

http://www.zerohedge.com/article/t-minus-two-months-500-billion-ticking-timebomb http://www.zerohedge.com/article/market-perfectly-set-another-2008-crisis.

On peut avancer sans risque de se tromper que cette crise imminente, dont on commence tout juste à parler dans les grands médias internationaux et dont la plupart des citoyens des pays qui seront touchés ne se doutent même pas qu’elle est sur le point de les frapper, a été anticipée par tous les grands investisseurs de la planète, et qu’ils s’y préparent déjà depuis un bon moment. Power Corp. et les Desmarais figurent dans ce groupe, et cela fait déjà plusieurs années qu’ils ont compris qu’il leur fallait se repositionner sur le plan stratégique. L’instrument qu’ils utilisent pour parvenir à cette fin est leur placement dans Pargesa et le très complexe schéma de participations croisées et de relations d’affaires qui les assure de se retrouver aux premières loges de toutes les grandes décisions d’affaires dans le monde et d’y exercer une grande influence.

Ils ne font d’ailleurs mystère ni de leur but, ni de leurs méthodes. En effet,
« La stratégie du Groupe Pargesa repose sur les principes suivants : 
- concentration du portefeuille sur un nombre limité de participations significatives, avec pour objectif la création de valeur sur le long terme,
- obtention d'une position de contrôle ou d'influence majeure dans ces participations,
- mise en oeuvre continue d'un travail professionnel d'actionnaire stratégique auprès des participations. »

Et pour ceux d’entre vous qui pourraient se demander ce que veut dire le troisième point, il s’agit tout simplement pour l’actionnaire stratégique de mettre à la disposition des entreprises dans lesquelles il a investi tout son savoir-faire et son réseau de relations et d’influence pour faciliter l’atteinte de leurs objectifs, étant entendu qu’il en sera l’un des principaux bénéficiaires.

Donc, pour comprendre l’intérêt que Power Corp et la famille Desmarais ont pour le Québec, il faut le regarder à travers le prisme des champs d’activités des entreprises dans lesquelles Pargesa a investi. Bien entendu, les entreprises de services financiers que contrôle le Groupe Power sont plus en mesure d’appuyer financièrement par leurs placements (donc avec l’argent de leurs assurés ou des petits investisseurs dans les fonds divers qu’ils contrôlent) les entreprises auxquelles ils sont intéressés.

Au cours des dernières années, on a pu se rendre compte que le groupe Power était intéressé au Québec aux domaines suivants : la production d’électricité (Hydro-Québec), la production et la distribution de gaz naturel (Gaz-Métro, Noverco, Projet Rabaska, gaz de schistes), Anticosti (pétrole de schistes), la construction et la gestion d’infrastructures (CHUM, les PPP), etc.

Et si l’on examine maintenant la liste des champs d’activités des entreprises dans lesquelles Pargesa est présente, on constate que le mariage est parfait. Même si aucune annonce n’a encore été faite sur un éventuel investissement d’Imerys ou de l’une de ses filiales au Canada, on voit bien que le Plan Nord est taillé sur mesure pour ses besoins.

En bonne actionnaire stratégique, Pargesa met donc à la disposition de ces dernières son savoir-faire et sa connaissance des réseaux d’influence au Québec pour faciliter le développement de leurs affaires, des siennes, et des profits de Power Corp et de la famille Desmarais.

Vu les cibles visées au Québec, il est évident qu’il faut avoir ses entrées dans les cercles politiques, et Paul Desmarais les cultive assidûment depuis cinquante ans, au point d’être devenu ce que les Américains appellent un « kingmaker ». Les plus vieux se souviendront de ces vacances à Hawaï que Paul Desmarais avait offertes à l’ancien premier ministre Daniel Johnson dans la foulée de la visite du Gal De Gaulle, ostensiblement pour l’aider à se remettre d’un incident cardiaque, à l’issue desquelles Johnson n’avait eu rien de plus pressé que de renoncer publiquement à toute velléité d’indépendance pour le Québec, lui qui avait été l’auteur d’un livre-manifeste intitulé justement « Égalité ou Indépendance ».

Mais ce n’était que le début. Il n’y a qu’à voir le rôle et l’influence que lui-même et ses hommes ont pu exercer au sein du PLC et du PLQ au fil des années. Et ce rôle est devenu encore plus apparent avec les confidences de Nicolas Sarkozy sur son amitié avec Paul Desmarais et sur l’influence qu’il a eue sur sa décision de se porter candidat à la présidence française. Qui peut le plus peut le moins.

Par ailleurs, pour faciliter le conditionnement de l’opinion publique à ses projets et à la prise de décisions politiques qui l’avantagent, Power peut aussi compter sur l’Institut économique de Montréal et les médias qu’elle contrôle au Québec. Les « études » que finance l’IEDM, ou le Manifeste des Lucides lancé par André Pratte de La Presse, cherchent à encourager le développement au Québec d’un soutien populaire à des thèses qui vont permettre à Power et à la famille Desmarais de mettre la main sur des actifs québécois à des conditions particulièrement avantageuses,

En répandant l’idée que le Québec vit au-dessus de ses moyens et qu’il est trop endetté, comme La Presse et les journaux de Gesca le répètent depuis des années, Power crée un climat d’opinion favorable à la privatisation d’actifs qu’elle convoite, comme Hydro-Québec

http://www.vigile.net/Les-Grandes-manoeuvres,25614

http://www.vigile.net/Gare-a-l-arnaque-du-siecle

http://www.vigile.net/Gare-a-l-arnaque-du-siecle-Prise-2,26653

http://www.vigile.net/Power-Corp-Hydro-Quebec-et-les

ou à la cession au secteur privé (lire Power) de certains actifs jugés non stratégiques, comme les droits que détenait Hydro-Québec sur le pétrole et le gaz d’Anticosti, cédés à Petrolia.

Et pour garder un œil sur ce qui se passe à Hydro-Québec, quoi de mieux que de jouer d’influence pour faire placer un de ses hommes au conseil d’administration d’Hydro-Québec, en l’occurrence Michel-Plessis Bélair, un haut dirigeant de Power.

Mais Power et les Desmarais ne sont pas intéressés que par Hydro-Québec. La Caisse de dépôt et de placements (CDP) est aussi une cible juteuse qui regroupe les nombreux investissements stratégiques du Québec dans des secteurs d’activités complémentaires aux activités de Pargesa. À la suite de la crise financière de 2008 et de la perte par la CDP de 40 milliards $, le président de cette institution, Henri-Paul Rousseau, dans un geste qui a surpris tous les observateurs du milieu, a subitement quitté la Caisse pour rejoindre Power.

***

On finira bien un jour par découvrir le rôle joué par Henri-Paul Rousseau pendant cette crise financière alors qu’il était président de la Caisse pour préserver Power de certaines des retombées les plus négatives de cette crise, mais il fallait qu’il soit déterminant pour qu’il soit appelé aussi rapidement en renfort à la direction du groupe Power, et il ne faudrait pas se surprendre que la réponse se trouve du côté de Coventree, le principal fournisseur de PCAA non bancaires lors de la crise financière, dont la CDP était justement l’un des principaux actionnaires.

***

Maintenant qu’il est rendu chez Power, Rousseau est l’homme tout indiqué pour diriger l’offensive de Power sur les actifs du Québec, d’autant plus que Power avait développé avec Michael Sabia, son remplaçant à la Caisse, des liens étroits avant même qu’il n’occupe ses nouvelles fonctions.

On se souviendra qu’à peine nommé à la Caisse, Michael Sabia s’était précipité chez Power à l’invitation d’André Desmarais pour y rencontrer son prédécesseur Rousseau et le gratin du monde québécois des affaires.

Depuis qu’il est à la Caisse, Sabia a multiplié les décisions qui opèrent une rupture avec le passé, ostensiblement dans le but de rompre avec les pratiques qui ont mené à la perte des 40 milliards $ lors de la crise financière. Mais de nombreux observateurs se demandent si la nouvelle structure et les nouvelles structures mises en place n’auraient pas tout simplement pour but de faciliter l’écrémage discret de la Caisse au profit d’intérêts privés, dont au premier chef Power.

Quoiqu’il en soit, il existe des signes tangibles que cette lecture est la bonne. En effet, tout récemment, la CDP annonçait qu’elle prenait une participation importante (1 milliard $) dans l’entreprise française SPIE, le numéro 4 de l’énergie électrique en Europe.

Or le financement de la société d’investissement PAI Partners (croyez le ou non, c’est une entreprise française) qui se décrit comme le « Leader européen du private equity » (il faut le voir pour le croire) et qui détenait 87 % des actions de SPIE est en partie assuré par le fonds PAI Europe III qui appartient au Groupe Bruxelles-Lambert, lui-même un élément clé du dispositif de contrôle de Pargesa et des familles Desmarais et Frère.

Et il y a de cela un peu plus de deux ans, la filiale immobilière de la CDP, la SITQ, s’était départie au profit de GDF-Suez, dans laquelle Pargesa détient une participation stratégique, de son intérêt dans AXIMA-Services inc., « le leader québécois de la gestion d’infrastructures techniques, notamment dans le domaine du bâtiment et des infrastructures aéroportuaires ».

Ce développement était d’autant plus remarquable que ce domaine d’activité n’entre pas dans le champ des métiers exercés par GDF-Suez, comme on peut le constater en visitant le site de l’entreprise. Il faut donc se demander si la présence de GDF-Suez dans ce dossier n’en pas une de pure complaisance pour servir de couverture à des intérêts qui ne pourraient pas se découvrir sans que cela ne soulève un tollé dans l’opinion publique. Ce genre de pratique est courante dans les milieux d’affaires.

***

On comprend donc qu’il soit crucial pour un groupe comme Power et les intérêts Desmarais d’avoir leurs entrées auprès du pouvoir politique, et à plus forte raison lorsqu’ils sont en plein repositionnement stratégique à des fins défensives, comme c’est le cas à l’heure actuelle.

On comprend aussi qu’ils aient pu être inquiets de voir le PLQ et Jean Charest tomber en chute libre dans l’opinion publique au moment où ils en avaient le plus besoin. Et il fallait que leurs craintes soient très fortes pour encourager comme ils l’ont fait la venue du tandem François Legault/Charles Sirois sur l’échiquier politique, pour remplacer Charest et le PLQ qu’ils considèrent irrémédiablement discrédités dans l’opinion publique.

Comme je l’écrivais il y a quelques mois :

« Mais que se cache-t-il donc derrière cette précipitation à vouloir forcer le jeu. Y a-t-il quelque chose que l’empire Desmarais sait et que nous ne savons pas ? Et la réponse à cette question est évidente. Oui, il y a beaucoup de choses que l’empire Desmarais sait et que nous ne savons pas.

Et il semble que l’imminence des développements qu’il anticipe pousse l’empire à vouloir compter sur la présence au Québec d’un gouvernement qui sera favorable à ses intérêts. Un gouvernement qui repoussera toute perspective d’indépendance aux calendes grecques et qui adoptera un agenda conservateur sur le plan budgétaire, comme celui qui vient d’être déposé en Angleterre, pour permettre à l’empire de mettre la main sur les richesses du Québec.

Pour justifier que l’empire se mette à nu comme il le fait, ce doit être gros, très gros. Tellement gros que je ne serais pas surpris qu’il s’agisse d’une crise économique encore plus grave que celle que nous venons de connaître, ou alors une guerre. »

Nous savons maintenant qu’il s’agit plus vraisemblablement d’une crise économique que d’une guerre. Mais nous savons maintenant aussi que l’empire Power est prêt à tout pour mettre la main sur les richesses du Québec. Sa survie est en jeu.

Comme je le disais au début, on ne peut pas reprocher à un loup d’être un loup, et il ne fait aucun doute que, dans cette affaire, le loup est affamé. La responsabilité du berger n’en est donc que plus grande. Or il se trouve en ce moment que le berger est Jean Charest, et la complaisance qu’il démontre en ouvrant au loup toutes grandes les portes de la bergerie est proprement alarmante. Sans aucun mandat à cet effet, il est en train de dilapider nos richesses collectives au profit d’intérêts privés comme Power. Sous sa direction, le Québec est en train de faire un grand bond en arrière et de revenir à l’époque de Duplessis.

On se souviendra que les Québécois avaient alors senti le besoin de mettre fin à cette exploitation et s’étaient lancés dans un vaste exercice de reprise en main des leviers de l’État sous le thème « Maîtres chez nous ». Nous voici de nouveau confrontés à la même nécessité.



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14 commentaires

  • Jean-Claude Pomerleau Répondre

    17 juillet 2011

    Si M Frappier le permet, j'aimerais mettre cet article au long; étant donné sa pertinence et vue qu'il est réservé aux abonnés de Le Devoir (JCPomerleau):
    http://www.ledevoir.com/politique/quebec/327377/un-plan-nord-a-faire-rever-les-francais
    LE DEVOIR
    Un Plan Nord à faire rêver les Français (lire Paul Desmarais)
    La France et le Québec en ont pour «20 ou 30 ans» à parler de ce projet fondateur, estime la consule Hélène Le Gal
    Antoine Robitaille 14 juillet 2011 Québec
    Photo : Yan Doublet - Le Devoir
    Au-delà de l’objet du Plan, ce Nord mythique, il y a la «manière» qui a plu à la France, explique Mme Le Gal.
    Si la relation Québec-France a été dominée depuis quatre ans par la mobilité de la main-d'œuvre, c'est maintenant le Plan Nord qui marquerait le plus celle-ci désormais, estime Hélène Le Gal, consule de France à Québec. Elle salue l'«initiative fascinante» du premier ministre Jean Charest, «grand ami de la France», lequel mariera d'ailleurs sa fille dans l'Hexagone à la fin du mois. Rencontre à l'occasion du 14 juillet.
    Québec — «Tiens, je vais partir la clim'», lance la consule Hélène Le Gal en me regardant suer à grosses gouttes dans son bureau de la rue Saint-Louis. Dans cette chaleur, c'est paradoxalement sur le Plan Nord que la conversation s'est tout de suite engagée. Il suscite un «vif intérêt» en France, insiste la consule, en poste depuis août 2009. À l'occasion de la présentation du Plan Nord du mois de mai à Lévis, plusieurs médias hexagonaux ont dépêché des envoyés spéciaux. Des textes très critiques du fameux Plan ont aussi été publiés, notamment ceux d'Hervé Kempf dans Le Monde.
    Comment expliquer cet attrait? «Nous [en Europe], on a exploré notre géographie. Alors que vous, vous faites partie des rares endroits dans le monde développé où on a encore une frontière à découvrir, à franchir; où il y a des territoires dont on ignore encore ce qu'ils peuvent receler. Ça, déjà, ça nous fascine», soutient Mme Le Gal. Ce Plan n'a-t-il pas surtout le don de faire vibrer la corde sensible, chez les Français, du mythe des «grands espaces canadiens»?
    À la fin juin, en entrevue avec le magazine français L'Express, le patron de Power Corporation, Paul Desmarais fils, très proche de Jean Charest, adoptait d'ailleurs précisément ce vocabulaire: «Ce n'est pas un hasard si le premier ministre québécois vient de lancer un Plan Nord pour valoriser les ressources de nos grands espaces.» Au sujet justement de ces «grands espaces», Hélène Legal est formelle: «Ce n'est pas un mythe, c'est une réalité! Quand on parle de centaines, de milliers de lacs; quand on parle d'un territoire qui fait deux fois la France, c'est assez extraordinaire!»
    Le Plan Nord, un «Grenelle»
    Au-delà de l'objet du Plan, ce Nord mythique, il y a la «manière» qui a plu à la France, explique Mme Legal. Elle s'apparenterait, note la diplomate, à un «Grenelle», cette rue du 7e arrondissement où se trouvent plusieurs ministères et où se sont tenues de grandes négociations sociales. Notamment celles qui mirent fin aux grandes grèves de 1968. En jargon politique français, c'est l'équivalent de «sommet».
    Ainsi, le Plan Nord se serait passé dans une «très grande concertation entre les acteurs», insiste Mme Legal, qui ne tarit pas d'éloges à l'égard de cette «démarche». À ses yeux, le gouvernement a résisté à la tentation d'imposer son plan: «Cela a nécessité des mois et des mois de discussions avec, d'abord, les gens qui habitent dans le Nord, des communautés autochtones, mais aussi des collectivités locales, le secteur privé qui peut être intéressé, les ONG qui travaillent sur l'environnement, etc.»
    La France et le Québec en ont pour «20 ou 30 ans» à parler du Plan Nord, croit-elle. Le sujet a été à l'ordre du jour lors de la dernière rencontre alternée des premiers ministres. «Les domaines de la recherche et le domaine économique ont été mobilisés», dit-elle. Des chercheurs auraient déjà décidé de travailler ensemble sur tous les aspects du Plan Nord: l'environnement, le climat, les mines, etc. Le Centre national de recherche scientifique (CNRS) de France a «installé un certain nombre de chercheurs à l'Université Laval dans le cadre de ce qu'on appelle une unité mixte intégrée».
    Sur le plan économique, une «mission» de plusieurs entreprises françaises intéressées par le Plan Nord et conduite par le ministre de l'Industrie de France, Éric Besson, est en préparation et devrait avoir lieu en septembre. Le mois suivant, il pourrait y avoir un «colloque» sur la question ou une «réunion d'entreprises» ou les deux en même temps.
    Mobilité
    Quant à la mobilité de la main-d'oeuvre, par laquelle un «médecin en France pourra devenir un médecin au Québec», comme le répète Jean Charest depuis 2007, «c'était une excellente idée», insiste Mme Legal, qui soutient que 66 arrangements de reconnaissance mutuelle (ARM) ont été signés sur un potentiel de 75. Difficile pour l'instant toutefois d'avoir des chiffres précis sur les flux de travailleurs, puisque plusieurs ARM viennent d'entrer en vigueur.
    Par ailleurs, malgré la crise de la dette qui frappe l'Europe et la zone euro, il n'y aurait rien à craindre pour la conclusion d'un accord entre le Canada et l'Union européenne, croit Hélène Legal. C'est là une autre initiative du premier ministre québécois. (Paul Desmarais fils le soulignait d'ailleurs à L'Express en juin: «Le Canada a besoin de diversifier ses marchés pour réduire sa dépendance envers les États-Unis, et cet accord le lui permettra. Le premier ministre québécois, Jean Charest, a joué un rôle décisif dans ce dossier.»)
    Les discours protectionnistes ont beau faire un retour en force sur le Vieux Continent depuis 2008, la notion de «démondialisation» a beau faire florès, Mme Legal reste confiante: «Je crois que cet accord est très bien engagé. Je ne crois pas qu'il y ait de réticence au niveau européen. Au contraire, on parle d'économies de nature comparable: Canada, Union européenne, lever les barrières, c'est habituellement bénéfique, c'est gagnant-gagnant. Je crois que ça va se poursuivre.» Une annonce qui viendra assurément en 2012, au terme de la négociation entre le Canada et l'UE, à laquelle le Québec, représenté par l'ancien premier ministre Pierre Marc Johnson, participe.
    Un éventuel accord pourrait avoir des effets sur la relation Québec-France, croit-elle. «Il y a 400 filiales d'entreprises françaises au Québec, c'est colossal. On est le deuxième investisseur ici après les États-Unis. Quant aux entreprises québécoises, 120 ont des filiales en France.»

  • Jean-Claude Pomerleau Répondre

    16 juillet 2011

    En complément d'information:
    Libre-échange Canada-Europe - Hydro-Québec pourrait devoir ouvrir ses appels d'offres aux Européens
    http://www.ledevoir.com/economie/actualites-economiques/327556/libre-echange-canada-europe-hydro-quebec-pourrait-devoir-ouvrir-ses-appels-d-offres-aux-europeens
    JCPomerleau
    P.s Caisse de dépôt, Hydro Qc, Plan Nord, on voit apparaître les grandes manoeuvres de Paul Desmarais.Voyez vous L'urgence de reprendre le contrôle de notre État.

  • @ Richard Le Hir Répondre

    14 juillet 2011

    Un article qui paraît aujourd'hui dans Le Devoir sous forme d'une entrevue avec la Consule Générale de France à Montréal confirme le bien-fondé de mon analyse,et cite même Paul Desmarais Jr.

  • @ Richard Le Hir Répondre

    14 juillet 2011

    La pression sur Total monte en Europe. Ainsi, cette semaine, Total a renoncé à son avantage fiscal en France. De plus, une filiale de Total, Arkema, vient de se voir imposer une forte amende pour des pratiques anticoncurrentielles. Desmarais est actionnaire d'Arkema via le Groupe Bruxelles-Lambert dont il est co-actionnaire avec le financier belge Albert Frère http://fr.gbl.be/group/participations/rhodia/default.asp . Arkema Canada http://www.arkema-inc.com/index.cfm?pag=287&cat=38 a une usine au Québec, à Bécancour, dont le directeur est Yves Hamelin.
    À noter que le site d'Arkema Canda n'existe qu'en Anglais. Une page de ce site a été traduite en français pour les "indigènes" http://www.arkema-inc.com/index.cfm?pag=339.


    IS : Total renonce à son avantage
    lefigaro.fr
    12/07/2011 | Mise à jour : 20:40
    Dans un entretien aux Échos, le directeur financier de Total, Patrick de la Chevardière, a déclaré que le groupe pétrolier renonçait l'avantage lui permettant d'échapper à l'impôt sur les sociétés.

    Total/Arkema:79M€ d'amende confirmés
    Reuters
    14/07/2011 | Mise à jour : 11:36
    Le Tribunal de l'Union européenne a confirmé jeudi une amende de 78,66 millions d'euros infligée à Total SA et Arkema par la Commission européenne qui accusait les deux groupes d'avoir participé à une entente sur le marché de la chimie.
    "L'entente a consisté principalement en l'échange, entre concurrents, d'informations confidentielles sur les marchés et les entreprises, en une limitation et en un contrôle de la production, en une répartition des parts de marché et des clients ainsi qu'en la fixation et en la surveillance des prix" sur le marché du peroxyde d'hydrogène et du perborate de sodium, explique le Tribunal.
    A l'époque des faits, qui se sont produits entre mai 1995 et décembre 2000, le chimiste Arkema était contrôlé par Elf Aquitaine. Ce dernier a ensuite fusionné avec Total, et Arkema est né de la cession du pôle chimie du nouvel ensemble pétrolier. Ceci justifie, selon la jurisprudence européenne que Total soit condamné solidairement. Impliqués dans la même affaire d'entente sur les prix, le belge Solvay et le néerlandais Akzo Nobel, ont également été condamnés.

  • @ Richard Le Hir Répondre

    9 juillet 2011

    Réponse @ Lise Pelletier
    Il n'y a pas de doute que l'unité des forces indépendantistes est un prérequis, et pour la première fois depuis très longtemps, cette unité est en voie de se réaliser par le truchement de "Cap sur l'indépendance" qui amène tous les mouvements indépendantistes à coordonner leurs actions.
    Il reste maintenant à faire partager à tous une analyse commune de la situation et à développer des stratégies en conséquence, étant entendu que nous partageons tous le même objectif.
    Richard Le Hir

  • @ Richard Le Hir Répondre

    9 juillet 2011

    Réponse à Rhéal Mathieu
    Aucun parti n'est à l'abri de l'influence des puissants, et à cet égard, le PQ n'est ni meilleur, ni pire, que les autres.
    Aller plus loin m'obligerait à porter des jugements sur telle ou telle personne, ce qui serait à la fois déplacé et improductif.
    Il n'y a aucun doute que le mouvement MCN21 de Daniel Breton constitue un commencement de réponse à la grande braderie présentement en cours au Québec.
    Richard Le Hir

  • Archives de Vigile Répondre

    8 juillet 2011

    Un grand merci à vous monsieur Le Hir vos travaux sont et seront très utiles. Incroyable!

  • Archives de Vigile Répondre

    8 juillet 2011

    Lorsque nous examinons l'organigramme de POWER COPORATION DU CANADA, nous remarquons que Groupe Investors Inc. ainsi que Corporation Financière MacKenzie représentent de véritables fleurons de l'Empire. Sachant également que Gesca Ltée est une filiale en propriété exclusive de Power Corporation qui, par l’intermédiaire de ses filiales, publie le quotidien montréalais La Presse, faut-il s'étonner de lire ce genre de PROPAGANDE HAINEUSE dans cette feuille de choux ? http://lapresseaffaires.cyberpresse.ca/opinions/chroniques/michel-girard/201107/06/01-4415375-le-rendement-magique-du-fonds-ftq.php

  • Archives de Vigile Répondre

    8 juillet 2011

    Ne croyez pas M. Le Hir que vos écrits tomberont dans des oreilles de sourds. Votre très perspicace vision en rejoint plus d'un. Le "quelque chose de gros" que vous pressentez ne pourrait-il pas être aussi quelque chose qui ressemblerait à un soulèvement ? Les signes en provenance de plusieurs pays de l'Afrique du Nord, de l'Europe et même des États-Unis nous interpellent pourtant chaque jour d'avantage et nous incitent à organiser la résistance.
    Le jour, très proche, où le peuple québécois investira son propre POUVOIR, il pourra soumettre celui de POWER comme son petit caniche pour l'aider à imposer, en partenariat avec la France, l'influence du génie francophone dans le monde. Ce jour là, ce sera l'empire Desmarais au complet qui sera décolonisé. Si nous voulons le respect, soumettons nos ennemis ! Nous possédons toute la FORCE requise pour réaliser nos rêves.

  • Stéphane Sauvé Répondre

    8 juillet 2011

    Et dites moi monsieur Le Hir, croyez vous vraiment que Paul n'exerce aucune influence sur Pauline Marois, à travers Claude Blanchet ?

  • Archives de Vigile Répondre

    8 juillet 2011

    M.Le Hir,
    Loin d'être une spécialiste de la finance tel que vous, j'ai même du mal avec mon propre budget personnel.
    Dans vos sous-titres, je retiens celui-ci :
    "Le moment est venu pour les Québécois de reprendre en mains les leviers de leur État"
    Bien d'accord avec vous, mais comment y arriver alors que le monarque frisé a tous les pouvoirs.
    Misère de misère, comment aussi réveiller les chloroformisés de la télé, du trafic, des garderies, des jeux, des spectacles, des courses, de tout le quotidien qui dilapide les énergies, même des coeurs les plus vaillants.
    La formation d'une coalition présentée dans plusieurs textes sur la tribune, me semble une solution, ne dit-on pas que l'union fait la force. Peu importe dans quel parti ou mouvement nous sommes, pour tous le but est le même, l'avenir de notre pays. Et en ce moment il y a urgence car le compte à rebours est commencé.
    Le réseau "Cap sur l'Indépendance" qui a réuni plusieurs mouvements prouve que les indépendantistes ont besoin de se rallie car tous sentent que le pays nous glisse sous les pieds. Il faut continuer dans ce sens et plusieurs auteurs ici l'expriment très bien.
    Moi, j'en suis !
    Lise Pelletier, membre du R.I.N.

  • Archives de Vigile Répondre

    8 juillet 2011

    Merci M. Le Hir pour ce texte très relevé et fouillé.Comme quoi il faut regarder les semences avant d'en voir les fruits.Ce sont ce genre d'informations qui nous permettent de comprendre l'échiquier global.

  • Rhéal Mathieu Répondre

    8 juillet 2011

    Questions à monsieur Le Hir.
    Vous semblez prendre pour acquis que le PLQ est fini et je souhaite ardemment que vous ayez raison. Alors, faisons un peu de politique-fiction.
    Advenant que le PQ prenne le pouvoir, au lieu du tandem Legault/Sirois, y a-t-il la moindre chance que les intérêts Desmarais puissent quand même avoir leurs entrées auprès du pouvoir politique québécois et que la grande braderie se continue ?
    Si oui, pourquoi ?
    Si non, pourquoi ?
    Si, rien n'est impossible, alors, quelles sont les probabilités et par qui ça pourrait passer ?
    Maîtres chez-nous 21e siècle (MCN21) de Daniel Breton fait-il partie de la solution de l'équation ?
    Rhéal Mathieu.

  • Jean-Claude Pomerleau Répondre

    8 juillet 2011

    En complément d'information.
    Le nouveau Plan de gestion de risque de la Caisse. Pour qui mets on la table.
    La Caisse: Alerte rouge
    http://www.vigile.net/La-Caisse-Alerte-rouge
    JCPomerleau