Après une élection qui a rayé les libéraux de la carte électorale de l’Alberta et de la Saskatchewan, les premiers ministres de ces provinces exigent des gestes concrets pour protéger l’unité nationale et « éteindre l’incendie » qui fait rage dans l’Ouest du pays.
« J’offre [à Justin Trudeau] un extincteur. Je l’invite à ne pas répondre à ces demandes avec de l’essence », a lancé le premier ministre saskatchewanais, Scott Moe, lors d’un point de presse, mardi matin.
Les premiers ministres de l’Alberta et de la Saskatchewan exigent les mêmes choses de Justin Trudeau : autoriser des projets de pipelines, négocier une nouvelle formule de péréquation et soustraire leurs provinces à la taxe sur le carbone.
Le premier ministre albertain y va quant à lui d’une menace de référendum. Si le nouveau gouvernement de Justin Trudeau ne modifie pas les lois qui restreignent les exportations de pétrole albertain, par exemple la loi interdisant aux pétroliers d’accoster la côte nord de la Colombie-Britannique, il s’engage à lancer une procédure référendaire d’ici 2021 pour contraindre le gouvernement fédéral à repenser la formule de péréquation.
Il se montre tout de même ouvert au compromis, notamment à une révision des plafonds d’émission des pétrolières. « Je sais que Justin Trudeau n’abolira pas la taxe carbone, a reconnu d’emblée le premier ministre conservateur. Nous cherchions un mandat démocratique de la part des Canadiens à ce sujet et nous ne l’avons pas eu. »
Notre plan B, c’est de défendre les droits et les pouvoirs de nos provinces respectives devant les tribunaux.
#Wexit
« Les résultats de l’élection d’hier soir montrent que le sentiment de frustration et d’aliénation dans l’Ouest canadien n’a jamais été aussi important » , dit le premier ministre saskatchewanais, Scott Moe, qui se considère lui-même comme un fédéraliste frustré.
L’important clivage régional propre aux provinces de l’ouest s’ancre historiquement dans une perception d’aliénation.
Les Saskatchewanais ont envoyé un message fort à Justin Trudeau, lundi soir, en choisissant uniquement des députés conservateurs pour les représenter à la Chambre des communes. De leur côté, les Albertains ont également rayé de la carte électorale les libéraux, élisant 33 candidats conservateurs sur un total de 34.
Alors que le mot clic #wexit se taille une place au palmarès des sujets les plus chauds au pays sur Twitter, Jason Kenney presse le premier ministre Justin Trudeau de protéger « l’unité nationale », de crainte de donner des munitions au mouvement indépendantiste albertain.
« Nous isoler davantage à travers une séparation [du Canada] n’est pas une réponse appropriée à une campagne politique qui vise à nous isoler et à isoler notre énergie », précise Jason Kenney. « Au fond de leur coeur, la majorité des Albertains sont des patriotes canadiens et nous ne devrions pas laisser Justin Trudeau et ses politiques nous donner l'impression que nous sommes indésirables dans notre propre pays. »
Le premier ministre albertain a annoncé la création d’un groupe d’experts qui mènera des consultations publiques et devra mettre de l'avant des propositions pour que l'Alberta trouve une place plus avantageuse, « plus juste » dit-il, au sein de la Fédération.
Le Manitoba plus prudent
Au Manitoba, où les conservateurs ont fait des gains sans toutefois chasser les libéraux de Winnipeg, le premier ministre, Brian Pallister, dit préférer la voie du dialogue. Revenant sur son expérience des gouvernements minoritaires, il insiste sur l'importance de maintenir la communication constante et posée.
On ne bâtit pas une équipe forte en menaçant de la quitter.
Le premier ministre ajoute que les députés siégeant à la Chambre des communes doivent penser avant tout au bien des Canadiens, au-delà des considérations partisanes.
Selon lui, les menaces de sécession n'ont pas leur place, qu'elles viennent du Québec ou d'ailleurs au pays.