Louis Duclos - L’auteur est l’ex-député fédéral de Montmorency-Orléans (1974-1984 ) - Si l'on devait s'en remettre aveuglément aux commentaires et analyses parus dans nos médias depuis le scrutin fédéral du 2 mai dernier, il faudrait en conclure que la percée fulgurante du NPD au Québec s'est faite essentiellement aux dépens du Bloc québécois et que par conséquent ces résultats n'augurent rien de bon pour l'avenir du projet souverainiste.
Pourtant, si on compare les résultats du 2 mai à ceux de l'élection de 2008, il saute aux yeux que l'augmentation des suffrages obtenus par le NPD au Québec (près de 1,2 million) provient tout autant des électeurs ayant déserté les libéraux et les conservateurs (480,000) que de ceux qui ont fait faux bond au Bloc québécois (490,000).
Quant au reste de l'augmentation des voix récoltées par le NPD, il est le fait d'électeurs ayant abandonné le Parti vert, d'abstentionnistes en 2008 et de jeunes électeurs qui avaient le droit de vote pour la première fois.
À la lumière de ces chiffres, il serait aberrant de prétendre que les Québécois ont voulu porter un jugement sur l'option indépendantiste véhiculée par le Bloc québécois depuis plus de 20 ans ou encore sur le fédéralisme canadien dont les libéraux et, dans une moindre mesure, les conservateurs ont toujours été les porte-étendards au Québec en raison surtout du fait qu'ils ont été appelés à tour de rôle à diriger le Canada.
En cela, ils se distinguent du NPD, parti tout aussi résolument fédéraliste, qui n'a cependant jamais exercé le pouvoir à Ottawa et qui, par conséquent, a eu historiquement un rôle politique plutôt marginal au Québec.
En réalité, il a été en quelque sorte, jusqu'à tout récemment, un non-acteur de la politique québécoise. Or, c'est précisément ce qui a fait sa chance au Québec lors de la récente élection fédérale.
En fait, si le NPD a pu profiter au Québec d'une grogne populaire d'une ampleur sans précédent à l'endroit de la classe politique, c'est essentiellement en raison de son « low profile » dans l'imaginaire de l'électorat québécois.
Qu'il s'agisse du ton acrimonieux des débats à la Chambre des communes, de la menace de se retrouver en campagne électorale à tout moment ou encore du sentiment fort répandu chez nous qu'on faisait du sur-place depuis trop longtemps sur la scène politique fédérale, le NPD paraissait étranger à tout cela aux yeux de bien des Québécois.
Et ce, contrairement au Bloc québécois qui, fidèle à son engagement à défendre les intérêts supérieurs du Québec, se retrouvait forcément depuis son entrée à la Chambre des communes en 1993 au centre de ces batailles de rue dont celle-ci était devenue le théâtre.
Bref, il figurait à son corps défendant parmi ces protagonistes au comportement lamentable que réprouvaient un grand nombre de Québécois.
Cela étant dit, les Québécois ont choisi le 2 mai de confier la défense de leurs intérêts à Ottawa à un fort contingent de députés néo-démocrates, sans doute bien intentionnés, qui siègeront au sein du caucus national d'un parti pan-canadien.
Bien que majoritaires chez les élus du NPD à la Chambre des communes, ils découvriront rapidement que leur formation politique voudra d'abord plaire au Canada anglais où se trouvent les circonscriptions à conquérir en vue d'une victoire aux prochaines élections.
À la différence des députés du Bloc québécois qui n'avaient de comptes à rendre qu'au peuple québécois, les députés néo-démocrates représentant le Québec devront sans cesse aller de compromis en compromis, et ce, jusqu'à la compromission ou à la dissidence pour les plus courageux d'entre eux.
À ce sujet, le commentaire suivant du TIMES COLONIST de Victoria B.C.rapporté dans Le Devoir du 7 mai apparait pour le moins prémonitoire : " Le chef Jack Layton trouvera difficile de satisfaire son caucus francophone sans s'aliéner le reste du pays ".
D'ailleurs, Jack Layton a déjà été obligé de faire de la haute voltige dans le dossier de la clarté référendaire, et ce n'est qu'un début.
On n'a qu'à penser à cet égard à la volonté du gouvernement Harper d'envahir la juridiction du Québec en matière de valeurs mobilières ou encore à la garantie de prêt que le gouvernement fédéral souhaite accorder à Terre-Neuve en vue de la construction de lignes pour la transmission de son électricité vers les marchés du nord-est américain déjà convoités par Hydro-Québec.
Où logeront les députés québécois du NPD face à ces questions litigieuses qui mettent en cause les intérêts supérieurs du Québec et qui font l'objet d'un large consensus chez nous ?
À moins que Jack Layton ne soit capable de réussir la quadrature du cercle, le moment de vérité ne tardera pas à venir.
C'est alors que les Québécois se rendront compte que seul un parti politique entièrement dévoué à la défense de leurs intérêts, tel que le Bloc québécois, devrait mériter leur confiance, en attendant qu'ils aient le courage un jour qui n'est pas demain, d'assumer pleinement leur destin national. Dans ces conditions, le Bloc québécois demeure nécessaire pour le bien du Québec.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé