J’ai fait un rêve bizarre.
François Legault faisait adopter par l’Assemblée nationale une motion demandant l’abolition de la monarchie constitutionnelle au Canada et son remplacement par une république.
Il déclenchait ainsi une obligation formelle de négocier, imposée à Ottawa et aux autres provinces par le Renvoi relatif à la sécession du Québec édicté par la Cour suprême en 1998.
Jusqu’ici, aucun gouvernement provincial ne s’est prévalu de cette possibilité de forcer des négociations constitutionnelles. Il y greffait d’autres demandes.
Je blague, je n’ai pas fait ce rêve.
Pas simple
La possibilité que j’évoque est pourtant bien réelle, et a récemment fait l’objet d’un livre passionnant de l’éminent constitutionnaliste André Binette.
Évidemment, cela n’arrivera pas.
Le gouvernement Legault, qui a beaucoup de fers au feu, n’est absolument pas intéressé par une tourmente politico-constitutionnelle.
Au Québec, le sentiment dominant envers la monarchie britannique est un mélange d’indifférence, d’amusement, d’agacement et d’hostilité.
On oublie trop que ces parasites subventionnés sont des reliquats de notre statut colonial.
Nous fûmes envahis, conquis et soumis par une puissance étrangère dont ils sont les descendants.
Au Canada anglais, c’est autre chose. Harry, William et tous ces inutiles endimanchés disposent d’un réel capital de sympathie... pour autant qu’ils comprennent leur place et s’y tiennent.
J’ai hésité à aborder le sujet.
On peut en effet trouver que le «Megxit» est un sujet aussi léger que le coton ouaté de Catherine Dorion.
Mais il y a parfois des sujets qui, sous leur apparence futile, soulèvent des questions de fond.
Dans le cas du coton ouaté, c’était : les goûts personnels suffisent-ils pour écarter des traditions qui ont une raison d’être?
Dans le cas du « Megxit », c’est : le Canada devrait-il accueillir de manière permanente deux membres de la famille royale, qui disent viser l’autonomie financière, mais qui n’entendent pas renoncer aux privilèges qui viennent avec leur statut?
On sent l’embarras du gouvernement Trudeau, bien que notre beau Justin, qui a lui-même des inclinaisons princières, doit envier secrètement le style de vie de ces Kardashian couronnés.
Oui, il y a le problème des dépenses permanentes de sécurité que le contribuable canadien devrait assumer.
Mais il y a plus.
Non
Harry et Meghan ne seraient pas des touristes, mais des résidents permanents toujours membres de la famille royale.
On briserait une convention constitutionnelle de longue date.
Au Canada, non seulement il n’y a pas d’aristocratie héréditaire, comme en Grande-Bretagne, mais c’est le gouverneur général qui représente la monarchie.
Si Harry et Meghan ont des problèmes familiaux – qui n’en a pas? –, on leur souhaite de les régler, mais je ne vois absolument pas pourquoi les Canadiens devraient en supporter les conséquences.
Nous ne sommes plus en 1890. Des résidents permanents? Trudeau devrait dire non, tout simplement.
Pour une rarissime fois, je suis d’accord avec le Globe and Mail. Mais Justin n’osera pas.
Harry va lui montrer ses beaux costumes d’officier. Justin va se cacher pour les essayer.