Joël-Denis Bellavance - Stephen Harper souhaite que la résolution qui reconnaît les Québécois comme une nation soit incluse dans la Constitution canadienne dès que « le terrain sera fertile ». Dans une entrevue exclusive accordée à La Presse, le premier ministre invite donc à se raviser ceux qui croyaient que cette résolution serait sans lendemain.
Il croit fermement que l’adoption de cette résolution l’an dernier par la Chambre des communes a grandement contribué à renforcer l’unité canadienne au cours des derniers mois. Les Québécois, selon lui, se sentent nettement plus à l’aise dans la fédération lorsque leur identité est reconnue.
M. Harper caresse maintenant l’ambition de régler d’une manière permanente la place qu’occupe le Québec au Canada en inscrivant noir sur blanc dans la loi fondamentale du pays que les Québécois forment une nation.
« Je veux continuer mes efforts pour vraiment unir ce pays» a-t-il affirmé.
« Je pense que notre politique de fédéralisme d’ouverture, l’entente sur l’UNESCO, le règlement du déséquilibre fiscal, mais surtout la résolution sur la nation ont bien amélioré la question de l’unité nationale et le confort des Québécois dans la fédération canadienne », a dit M. Harper durant l’entrevue, qui s’est déroulée mercredi dernier à sa résidence officielle.
« Je veux assurer les Québécois et les autres que nous n’avons pas oublié cette motion. Nous reconnaissons qu’on devra faire plus pour vraiment continuer dans cette voie positive. La population du Québec cherche une solution, comme je dis, nationaliste, et le reste du pays veut une solution qui peut garder un Québec fort au sein du Canada. C’est la raison pour laquelle je n’ai pas l’intention d’oublier cette motion. J’ai l’intention de continuer à faire des choses, étape par étape, sur le terrain pour assurer cet avenir », a ajouté le premier ministre.
Cela veut-il dire qu’il compte inclure un jour cette reconnaissance de la nation québécoise dans la Constitution ? « Étape par étape, quand le terrain sera fertile », a répondu M. Harper, sourire en coin.
Il n’a pas précisé sa pensée sur ce qu’est un « terrain fertile ». Mais il est évident qu’il faudrait un peu plus de stabilité politique à Ottawa et à Québec, où les deux gouvernements sont minoritaires. Le terrain pourrait donc être plus fertile si le Parti conservateur forme un gouvernement majoritaire à l’issue des prochaines élections et qu’un gouvernement fédéraliste majoritaire s’installe aussi à l’Assemblée nationale.
Pas une mince affaire
Inclure la reconnaissance de la nation québécoise dans la Constitution ne serait pas forcément chose facile. Dans le passé, deux accords constitutionnels, l’entente du lac Meech, en 1990, et l’accord de Charlottetown ont avorté notamment parce que l’on tentait de reconnaître le Québec comme une société distincte.
Le gouvernement fédéral aurait besoin de l’unanimité des provinces pour faire adopter un tel amendement. En outre, certaines provinces, dont la Colombie-Britannique et l’Alberta, doivent faire approuver tout amendement constitutionnel par voie référendaire.
Le premier ministre a tenu ces propos après que La Presse lui a demandé simplement pourquoi il avait décidé de parler de la nation québécoise dans un discours devant le Parlement australien, en septembre.
D’une seule traite et sur un ton passionné, il a affirmé que cela fait partie de « la philosophie » de son gouvernement et qu’il veut assurer « une définition de ce pays où les Québécois pourront être à l’aise ».
« Je ne pense pas que le reste du Canada a vraiment compris l’importance et les effets de cette reconnaissance. C’est la raison pour laquelle je parle de cette question en anglais de temps en temps dans le reste du Canada. Le reste du Canada veut certainement l’unité du pays, mais nous allons trouver un chemin positif, un chemin qui, si nous continuons, nous permettra de régler ce problème », a affirmé M. Harper.
Le premier ministre a soutenu que les tenants d’un gouvernement central fort, en l’occurrence les libéraux de Stéphane Dion, et ceux qui préconisent l’indépendance du Québec ne disparaîtront jamais de l’échiquier politique et vont donc continuer à s’affronter. Mais il croit que son gouvernement a réussi à offrir aux Québécois « une vraie option qui peut remplacer d’une façon permanente le débat entre les centralisateurs et les séparatistes ».
Le gouvernement Harper a fait adopter aux Communes l’an dernier la résolution reconnaissant que « les Québécois forment une nation au sein d’un Canada uni. » M. Harper a lui-même présenté cette résolution après que le Bloc québécois eut présenté une motion comparable mais sans les vocables « au sein d’un Canada uni ».
Depuis l’adoption de cette motion, M. Harper répète sans relâche que cette mesure a renforcé l’unité nationale. Et il profite de toutes les tribunes au Québec et même dans le reste du Canada pour en vanter les mérites.
M. Harper l’a d’ailleurs fait dans une entrevue de fin d’année accordée au réseau anglais CTV et diffusée samedi soir.
« Je suis foncièrement convaincu que les Québécois veulent un Québec fort, ils veulent être reconnus fortement pour ce qu’ils sont, mais ils veulent le faire au sein du pays uni. Je sais que la reconnaissance de la nation a été très controversée, et parfois impopulaire dans certaines régions du Canada anglais, mais cette reconnaissance a été une bonne chose pour le pays. Le pays est plus uni, il n’est pas plus divisé. Le Québec sera toujours nationaliste », a dit M. Harper dans cette entrevue.
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Souhait de Harper : électoraliste et illusoire, selon le Bloc
La Presse Canadienne 24 décembre 2007 - Le Bloc québécois qualifie d'électoraliste et d'illusoire le souhait formulé par le premier ministre Stephen Harper, d'inclure éventuellement dans la Constitution canadienne la résolution reconnaissant les Québécois comme nation.
En entrevue à La Presse Canadienne, le leader parlementaire du Bloc, Pierre Paquette, soutient que le premier ministre utilise encore un «faux-fuyant» pour éviter de concrétiser immédiatement ce que représente l'adoption de cette résolution à la Chambre des Communes.
Pierre Paquette souligne que les conservateurs se sont notamment opposés à une demande du Bloc, voulant que les employés soumis au code fédéral du travail soient dorénavant assujettis à la Loi 101, au Québec. Il rappelle également que les conservateurs ont refusé que la Loi sur le multiculturalisme ne s'applique pas au Québec.
Pierre Paquette accuse le gouvernement Harper de ne jamais passer de la parole aux actes, en promettant la lune aux Québécois tout en évitant de se compromettre.
De son coté, Stephen Harper soutient que l'adoption de cette résolution par la Chambre des communes a grandement contribué à renforcer l'unité canadienne. Le premier ministre croit que les Québécois sont nettement plus à l'aise dans la fédération depuis que leur identité a été reconnue.
Le premier ministre assure que son gouvernement n'a pas oublié cette motion et qu'il devra faire plus pour continuer dans cette voie positive.
Photo : Archives PC
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