Viktor Orban et son homologue polonais Mateusz Morawiecki ont tenu à faire front commun le 3 janvier. Ils espèrent incarner une autre voie en Europe en matière migratoire, rompre leur isolement sur la scène européenne et dépasser leurs différences.
Lors d’une conférence de presse tenue à Budapest le 3 janvier, le Premier ministre hongrois Viktor Orban et le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki ont réaffirmé leur opposition à la politique migratoire de l'Union européenne (UE). Cette rencontre médiatique avait pour objectif de les conforter dans leur rôle de hérauts d'une politique migratoire alternative à celle promue par Bruxelles.
«Il est évident que les Européens ne veulent pas d'immigration alors que plusieurs dirigeants européens continuent à faire pression en faveur d'une politique d'immigration ratée», a assuré Viktor Orban. Estimant que la position hongroise en matière d'immigration devait permettre de protéger les frontières, il a appelé l'Europe à «stopper le flux migratoire». Il a également profité de l'occasion pour rappeler que, selon lui, la politique des quotas de migrants fixés par l'UE contrevenait à la souveraineté des Etats.
«La Commission européenne n'avait pas le droit d'appliquer de telles solutions», a pour sa part martelé Mateusz Morawiecki. Le Premier ministre polonais a tenu à souligner les proximités politiques entre la Pologne et la Hongrie sur ces questions. Le parti de Mateusz Morawiecki, Droit et Justice, et son homologue hongrois, le Fidesz, partagent de nombreux points communs, même si le premier est moins majoritaire en Pologne que ne l'est la formation de Viktor Orban en Hongrie.
Mis en œuvre par l'Union européenne en septembre 2015 après l'importante vague migratoire qui a touché les pays du sud de l'Europe, le système de quotas, a suscité l'opposition de plusieurs pays dont l'Autriche, la Hongrie et la Pologne. Selon eux, cette décision est une violation de leur souveraineté.
La volonté de créer tant bien que mal un mouvement en Europe
Le Premier ministre hongrois a conclu sa déclaration en saluant l'entrée de l'extrême droite au gouvernement autrichien le 18 décembre dernier. Un nouveau fait politique qui est, selon lui, la traduction concrète des craintes de la population européenne sur l'immigration. La démocratie aurait ainsi été «restaurée» d'après lui, dans la mesure où les Autrichiens ont élu un gouvernement opposé à l'immigration, comme la majorité des Autrichiens, toujours selon lui.
«La même chose va se produire partout en Europe, je pense que ce n'est qu'une question de temps», a ajouté Viktor Orban, convaincu que l'isolement de son pays sur la scène européenne ne sera que passager.
Car tel est l'autre point commun à Varsovie et Budapest : en porte-à-faux avec Bruxelles, ces deux capitales font l'objet de méfiances voire de condamnations explicites de la part des autres pays membres, comme en témoignait encore récemment la procédure enclenchée par la Commission européenne le 20 décembre 2017 contre la Pologne, exposant celle-ci à la suspension de ses droits de vote au sein de l’Union.
Difficile dans ce contexte d'incarner un leadership alternatif et de fédérer. D'autant que des dissemblances existent entre les deux hommes et leurs partis et constituent autant de blocages. Si le Fidesz bénéficie d'appuis solides au niveau européen, puisqu'il fait partie de la majorité au Parlement de Strasbourg au sein du Parti populaire européen, Droit et Justice est moins ancré dans le paysage politique de l'UE.
Autre divergence de taille entre la Pologne et la Hongrie : si la première continue de multiplier les déclarations et actes de défiance envers la Russie, la seconde envisage ses rapports avec Moscou dans une perspective plus sereine. Viktor Orban a par exemple reçu Vladimir Poutine en février 2017 dernier, se félicitant à cette occasion des bonnes relations économiques et diplomatiques entretenues par leurs pays respectifs. Cette différence reste pour l'heure à l'arrière-plan du rapprochement entre Varsovie et Budapest mais elle témoigne de divergences géopolitiques plus profondes que ne le laisse supposer la poignée de main échangée par Viktor Orban et Mateusz Morawiecki.