Et si la CAQ était un COQ?

Actualité québécoise

Simone Landry - Professeure honoraire à l'UQAM - Plutôt scandaleux, non, le mépris à l'égard de l'ensemble de ses membres manifesté par la plus haute instance de l'ADQ, qui n'hésite pas à brader ses principes pour ce plat de lentilles qu'est l'éventuelle réélection de ses députés à l'Assemblée nationale, sous la bannière de la Coalition avenir Québec (CAQ)? Avec, à la clé, réconciliation des Deltell et autres Caire, qui vont se retrouver ensemble sous un nouveau-chef-ancien-ennemi.
Plutôt douteux, aussi, le jeu de chaise musicale de quelques péquistes renégats — eh oui, renégats — lesquels, attirés par le miroir aux alouettes que font chatoyer les sondages, jettent aux orties leurs convictions, dans l'espoir, eux aussi, de sauver leur poste de député et de peut-être se retrouver au pouvoir, si jamais cette CAQ arrivait à déloger le premier ministre le plus conspué depuis des lustres...
Le dernier en date, l'inénarrable François Rebello, a soulevé tout un nuage de poussière dans la basse-cour parlementaire, surtout dans son recoin péquiste, outré par l'effronterie du grand gamin, qui, après avoir juré fidélité il y a un mois, tel un magicien, vient de retourner sa cape d'un beau bleu ciel pour en exhiber le côté bigarré, au grand dam de ses commettants de La Prairie. Et ce, tout en jouant les toreros de salon: «Voyez, ma cape bleue est toujours là, je choisis juste d'en montrer le côté bariolé pour une dizaine d'années...»
Multicolore, la cape des nouveaux caquistes? On en caquette un peu partout, on s'interroge... Le virage à 180 degrés de François Rebello, le rappel de son ancien serment de fidélité à son mentor, l'autre François, celui qui a aussi quitté le Parti québécois dont il n'avait pu devenir le chef, agit comme révélateur des motivations de la plupart des députés qui ont abandonné leur parti au cours des derniers mois, ou se montrent disposés à le fusionner avec le parti chamarré qui se prétend coalition...
Mais où trouve-t-on un tel assemblage de couleurs? Ne pense-t-on pas ici à la flamboyante queue des plus jolis coqs de combat? Bien sûr, les couleurs de la coalition sont plutôt pâlottes, plutôt mièvres même. Le passage dans les rangs de cette coalition, qui prend de plus en plus l'allure d'un conglomérat, se trouve ainsi facilité par l'insipidité de ses couleurs et de ses idées, par leur flou que l'on ne peut certes qualifier d'artistique...
Et c'est ce flou, ce ni-à-gauche-ni-à-droite, ce ni-fédéraliste-ni-souverainiste, qui permet à tout un chacun en mal de réélection assurée, assortie bien sûr d'un salaire tout aussi garanti et de la possibilité d'accéder à quelque poste de ministre, de se glisser dans les rangs coquistes — non, non, ce n'est pas une coquille! Car ce nouveau parti attire, comme un aimant, en raison des sondages qui le font gagnant d'une sans doute prochaine élection, les députés opportunistes qui quittent la barque en perdition, adéquiste ou péquiste, de leur propre parti.
Voilà donc aux yeux de bien des gens, que l'on accuse d'ailleurs de cynisme, le commun dénominateur qui caractérise les nouveaux députés de la formation de François Legault: l'opportunisme. Nous sommes bien loin d'une Coalition pour l'avenir du Québec, d'une CAQ, nous sommes plutôt en présence d'un Conglomérat d'opportunistes du Québec, d'un COQ, dont la queue miroitante ne manquera pas de pâlir, au fur et à mesure que de nouveaux transfuges — on est toujours en attente de ceux du Parti libéral — viendront s'installer dans ses nids de poule et que le bon peuple se rendra compte que le changement dont il est si friand ne loge pas à cette enseigne.
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Simone Landry - Professeure honoraire à l'UQAM


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