Gilbert Bécaud chantait que l’indifférence détruit, tue à petits coups. À contrario, nous pouvons supposer que l’attention construit et ressuscite. Qu’importe ce qui c’est dit sur le retour de Jean-Martin Aussant au PQ, il est certain que l’évènement n’a pas laissé indifférent et a attiré un maximum d’attention. Bien que le temps montrera s’il constitue l’oxygène dont le PQ avait besoin pour être ravivé, l’annonce est plutôt de bon augure pour la formation politique.
Les spéculations émergent à profusion sur les intentions de l’enfant prodigue et sur les effets de son retour inopiné. Évidemment, les propos des politiciens et des observateurs de la scène politique demeurent largement teintés par leur appartenance à un camp ou nourris par de vieux ressentiments. Les fédéralistes y verront l’opportunité de relancer leur campagne de peur d’un référendum et de la souveraineté, tout en accusant le chef Lisée de faire volte-face en décidant d’utiliser éventuellement des fonds publics au profit de l’option d’indépendance. Les nationalistes mous, comme François Legault, tenteront de minimiser l’impact en le qualifiant de strictement médiatique. QS insistera pour mentionner qu’il est passé à deux doigts d’être dans leur camp. Bien sûr, il se trouvera quelques péquistes revanchards qui continueront de lui en vouloir pour la vie de les avoir quitté sept ans auparavant et qui éprouveront un sentiment d’injustice comme les frères de l’enfant prodigue.
Si le retour d’Aussant doit avoir des effets, ils ne pourront qu’être positifs pour le PQ en ravivant l’ardeur de certains sympathisants qui avaient déserté les urnes. En droite ligne avec le message qu’il livrait aux funérailles de l’ancien premier ministre Jacques Parizeau, Jean-Martin Aussant a mis fin à son exil en sonnant le rassemblement des forces indépendantistes. Son appel pourrait considérablement nuire à QS et le ton monocorde de Gabriel Nadeau-Dubois, dans la foulée de l’annonce de son ex-partenaire de la tournée « Faut qu’on se parle », reflétait un dépit certain. L’ex-chef d’Option nationale a tranché en réitérant que le PQ est le véhicule pour accéder à l’indépendance et qu’il ne croit pas cette perspective possible avec QS.
D’autre part, il se trouvera plusieurs fédéralistes hypocrites pour monter en épingle l’utilisation des fonds publics que souhaite faire un prochain gouvernement péquiste. Monsieur Aussant serait à la tête d’un secrétariat qui mènerait des études et des recherches sur l’indépendance. Cependant, ces mêmes sépulcres blanchis demeurent muets devant les publicités payées par le gouvernement qui s’avèrent de la pure propagande libérale à la veille de l’échéance électorale. Il est plus que normal, et c’est même responsable, qu’un parti politique élu préconisant l’indépendance, fasse les travaux utiles pour éclairer les choix qui s’offrent aux citoyens.
Le PQ de René Lévesque était une coalition arc en ciel avec des candidats en provenance d’un large spectre politique sur l’axe gauche-droite. Jean-François Lisée a renchaussé l’option souverainiste sur sa gauche et ébranle le temple QS. Il lui reste à réaliser un travail semblable sur sa droite pour faire vaciller la suffisance caquiste et recréer une coalition à la Lévesque qui ouvrait sur un véritable avenir pour le Québec. En ne se proclamant pas comme le rédempteur, mais en misant sur de solides acolytes, Lisée fait finalement voir un peu lumière au bout du tunnel.