Le gouvernement Legault envisage de relever dès l’an prochain le nombre d’immigrants accueillis au Québec.
On passerait de 40 000 en 2019 à 43 000 en 2020, 46 000 en 2021 et 51 000 en 2022.
On reviendrait alors aux chiffres de la dernière année au pouvoir du PLQ.
Il est vrai que François Legault avait dit que la baisse serait temporaire.
« En prendre moins, mais en prendre soin », disait-il.
La jolie formule avait fait son effet et rapporté des votes.
Vraisemblablement, la baisse avant le rebond aura duré un an.
Raccourcis
Ottawa, incapable de ne pas se mêler de ce qui ne le regarde pas, s’est empressé de dire que cette hausse était insuffisante.
Justin Trudeau veut, souvenez-vous, construire un Canada « post-national ».
Permettez-moi quelques rappels de base.
On martèle qu’il y aurait supposément 120 000 emplois vacants au Québec.
D’abord, prenons ce chiffre avec un gros grain de sel.
Par exemple, un départ à la retraite ouvre-t-il forcément un poste à pourvoir ?
Et si l’entreprise améliore sa technologie ou réorganise ses opérations ?
Ensuite, l’immigration est-elle la seule solution aux postes vacants ? Non, évidemment.
Payez les gens mieux, rendez fiscalement attrayant le report de la retraite, et vous verrez.
Plus largement, comment estime-t-on les besoins futurs de main-d’œuvre ?
On additionne les retraites anticipées aux emplois créés par les projections de croissance économique.
C’est comme vouloir prédire la météo dans cinq ans.
Comment a réagi le patronat à la hausse annoncée par le gouvernement Legault ?
Comme Ottawa : ce n’est pas encore assez.
L’immigrant coûte en effet beaucoup moins cher que des hausses de salaire ou un régime de retraite bonifié.
Entendez-vous le patronat évoquer ces pistes ? Jamais.
Le journaliste Francis Vailles, de La Presse, rapportait récemment des données présentées au dernier congrès de l’Association des économistes québécois.
En 2016, chez les 25 à 49 ans, 85 % des natifs du Canada travaillaient, contre seulement 62 % des immigrants.
L’intégration est donc problématique.
Si vous augmentez les volumes, ne rendez-vous pas encore plus ardu le défi de l’intégration ?
La question se pose, non ?
On ne compte plus par ailleurs les reportages larmoyants sur l’immigrant bardé de diplômes, mais qui travaille dans un entrepôt.
Quel est le pourcentage d’emplois vacants qui nécessitent un diplôme postsecondaire ou universitaire ? 37 %.
Quel est le pourcentage d’immigrants ayant un diplôme postsecondaire ou universitaire ? 70 %.
Sélectionne-t-on mal nos immigrants ? Absolument.
Bien commun
Voyez aussi l’émotivité du débat sur la laïcité. Quant aux efforts pour « démontréaliser » l’immigration, c’est une suite ininterrompue d’échecs depuis des décennies.
La morale de cette histoire ? Elle est double.
Premièrement, la question de l’immigration ne se réduit pas à un débat sur la quantité, ni à ses aspects strictement économiques.
Il y a des dimensions culturelles et politiques massives.
Deuxièmement, ne comptons pas sur Ottawa ou sur le patronat pour se soucier du bien commun du Québec francophone.
La CAQ ne doit pas l’oublier.