Réaction au rapport Castonguay

En avoir pour son argent grâce au public

Commission Castonguay



Le rapport du Groupe de travail sur le financement du système de santé comporte des recommandations attendues étant donné non seulement les positions antérieures de son président mais aussi certains éléments positifs qu'il convient de signaler.
Sans surprise, ce rapport clame une plus grande ouverture vers le privé, prétextant la croissance incontrôlée des coûts de santé. Les comparaisons canadiennes et internationales de ce rapport sont encore une fois discutables, car on oublie que le Québec est la seule province canadienne et la seule composante de l'OCDE à combiner les services de santé et les services sociaux dans le même poste budgétaire, ce qui gonfle artificiellement les coûts au Québec par rapport aux autres pays et provinces.
Il faut rappeler que ce sont les systèmes publics qui ont le mieux contrôlé la croissance des coûts alors que les régimes privés, alimentés par la recherche du profit et la multiplication des services, ont vu leurs coûts exploser au cours des dernières années. Comme l'a fait le signataire dissident Michel Venne, nous dénonçons une telle approche qui, de plus, drainerait les ressources humaines limitées du système public dans le contexte actuel de pénuries, rendant encore moins accessibles les soins aux malades chroniques, aux aînés et aux personnes défavorisées.
L'introduction de frais modérateurs, de franchises et d'autres cotisations limiterait encore plus l'accès aux soins et n'aurait aucun impact sur le financement lorsqu'on prend en compte la gestion et la bureaucratie additionnelles qu'ils entraînent. La pratique mixte des médecins au public et au privé ouvrirait la voie à des abus -- les médecins ayant tout intérêt à allonger les listes d'attente du système public pour aiguiller les patients vers leur pratique privée plus lucrative -- en plus de drainer les ressources médicales déjà limitées du système public.
Des pistes à suivre
Par contre, le rapport comporte des éléments intéressants qu'il convient d'examiner. L'accent mis sur la prévention et sur l'accès pour tous à des soins de première ligne est tout à fait pertinent. Le chapitre sur le vieillissement de la population évite enfin l'approche catastrophique et ne fait pas porter aux aînés l'odieux de l'accélération des coûts de santé.
Il enterre avec raison l'idée d'une assurance autonomie distincte que préconisaient les rapports Clair et Ménard. Il insiste sur l'importance d'investir des sommes considérables dans le soutien à domicile pour éviter le recours à des ressources inappropriées et coûteuses comme les hôpitaux et les centres d'hébergement.
Selon les études que nous avons réalisées pour faire passer le soutien de l'État du maigre 10 % des besoins qu'on observe actuellement à une proportion minimale de 40 %, un investissement annuel de 500 millions de dollars serait nécessaire. Une telle injection rapporterait rapidement des bénéfices par les coûts évités à l'hôpital et en institution d'hébergement. [...]
Taxe santé
Nous souscrivons aussi à la proposition d'utiliser un point de la TVQ pour financer le système de santé. Les gouvernements successifs des deux dernières décennies ont condamné la réduction des transferts fédéraux et le déséquilibre fiscal. À deux reprises, le fédéral a fourni des occasions de réduire le déséquilibre en réduisant la TPS, mais le gouvernement libéral a préféré ne pas investir ce champ de taxation libéré. Pour le citoyen, il ne s'agit pas d'économies significatives, mais pour le Québec, ces sommes sont considérables (un milliard de dollars par point) et permettraient de rétablir le financement du système de santé pour résoudre en partie les problèmes d'accès et de qualité que nous subissons actuellement.
Tout en restant critique, il faut prendre conscience de la qualité et de l'équité de notre système de santé public. Sur le plan des résultats, nous avons des performances enviables en ce qui a trait au taux de mortalité et à l'espérance de vie, le Québec se situant en tête des pays industrialisés.
Les problèmes actuels d'accès et de qualité sont largement tributaires du sous-financement et des pénuries de personnel médical, infirmier et de réadaptation. L'accroissement des admissions dans les programmes de formation devrait réduire les pénuries à moyen terme, mais il faut à court terme investir davantage pour notre santé.
L'ouverture au privé n'est pas une solution, et il faut même s'empresser de colmater les brèches pratiquées au cours des dernières années. Notre système public est le plus équitable et le plus efficace. C'est le meilleur moyen d'en avoir pour notre argent.
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Réjean Hébert, Gériatre, doyen de la faculté de médecine et des sciences de la santé de l'Université de Sherbrooke et coprésident de la Consultation publique sur les conditions de vie des aînés
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Réjean Hébert2 articles

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Gériatre, doyen de la faculté de médecine et des sciences de la santé de l'Université de Sherbrooke et coprésident de la Consultation publique sur les conditions de vie des aînés





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