À l’approche des élections d’octobre, le Parti conservateur se retrouve devant deux débats difficiles à gérer.
Premier débat : le Parti conservateur doit à nouveau gérer son positionnement sur la question de l’avortement. On le sait, le Parti conservateur s’est engagé depuis longtemps à ne pas rouvrir le débat sur l’avortement.
Avortement
Nous n’avons aucune raison de ne pas croire ses leaders qui ont pris un engagement ferme en la matière. Cela ne veut pas dire qu’ils le disent avec enthousiasme, mais qu’ils acceptent le consensus canadien. Plus encore, ils ne cessent de refouler dans les marges de leur parti les militants qui voudraient agir autrement. Même si le Parti conservateur leur fait une place, il les oblige à laisser de côté leur combat ou à le mener dans l’isolement politique.
Ce positionnement n’est toutefois pas sans susciter certaines tensions. C’est que le Canada anglais et le Québec n’abordent pas la question de la même manière. Au Canada anglais, les pro-vie participent au débat public. Ils sont minoritaires, en plus d’être plutôt mal vus, mais ils appartiennent au paysage médiatique. Il n’en est pas de même au Québec où la mouvance pro-vie est contenue à la périphérie de l’espace public. La société québécoise, sur la question des mœurs, est bien plus libérale que le Canada anglais. Résumons la chose ainsi : le Québec se fait ici imposer un débat par le Canada.
Deuxième débat : celui lié à la laïcité. On le sait, cette dernière reçoit un appui très majoritaire au Québec, qui vient de voter il y a quelques mois la loi 21. Au Québec, l’idéologie multiculturaliste est globalement rejetée. Les Québécois la condamnent en elle-même. Ils la condamnent aussi parce qu’elle sert à les dissoudre comme peuple.
Problème : au Canada anglais, cette position est irrecevable. Certes, dans la population, on trouve bien des Canadiens ordinaires pour soutenir la loi québécoise, même si, globalement, ils conservent une forme d’hostilité envers les Québécois. Mais dans les élites, personne n’ose faire même un pas vers le Québec. Le multiculturalisme est une religion.
Pour les conservateurs, tout cela pose problème. Ils ne peuvent exagérément diverger du consensus canadien sans se faire diaboliser par les médias, mais au même moment, s’ils espèrent faire des gains au Québec, ils doivent envoyer quelques signaux positifs à l’endroit de la laïcité. À tout le moins, ils doivent faire savoir qu’ils ne la combattront pas.
Laïcité
Pour l’instant, ils se réfugient derrière une formule molle : ils « respecteront » le Québec. Certes. Mais encore ? En fait, ils sont coincés ici entre les cultures politiques canadienne et québécoise, fondamentalement contradictoires.
On y revient : les conservateurs sont écartelés et ne parviennent pas à faire de l’incompétence de Justin Trudeau la question de l’urne. Il leur suffit de chercher à parler au Québec pour se mettre en situation difficile au Canada anglais. Et vice versa. Ne soyons pas surpris. Telle est la nature du Canada.