Hydro-Québec (HQ) enverra dorénavant des factures unilingues anglophones aux 400 000 consommateurs qui l’ont demandé, et rompt avec une tradition de 25 ans d’offrir à ces clients des documents bilingues.
«Quand on a fait la refonte de la facturation, on a fait des groupes de discussions, c’est clair que c’était un des aspects, c’est qu’on trouvait que la facture bilingue était beaucoup trop chargée», explique le porte-parole de la société d’État Louis-Olivier Batty.
M. Batty affirme que HQ a réalisé un sondage auprès de 1141 personnes. «52 % des répondants ont dit que c’était parfait d’avoir une facture unilingue anglaise, pour ceux qui parlent anglais», a-t-il dit.
Lors des 25 dernières années, HQ offrait une facture bilingue, où le français et l’anglais avaient une taille de caractère équivalente, aux clients qui souhaitaient recevoir des services en anglais.
Depuis janvier dernier, ce n’est plus le cas. Ce changement respecte la Charte de la langue française, souligne M. Batty.
HQ en a profité pour ajouter à la facture des informations qu’elle juge plus utiles, comme la température moyenne ou la comparaison entre la consommation actuelle et celle de l’année précédente.
Un recul pour le français
Pour le Mouvement Québec français (MQF) toutefois, il s’agit d’un net recul pour la langue et d’une abdication d’Hydro-Québec, un «symbole de la réussite francophone».
«Ils sacrifient l’esprit de la Charte pour des raisons de marketing, pour des raisons d’expérience client. C’est tout à fait à condamner», souligne le président de l’organisme, Maxime Laporte.
Le MQF demande au gouvernement Legault d’intervenir «pour que soit respecté l’esprit de la loi 101».
«On pense que tous les services de l’État et des sociétés publiques devraient être faits en français. Autrement, on nage en plein bilinguisme institutionnel», déplore M. Laporte.
D’autres organismes comme Revenu Québec correspondent en anglais avec les citoyens qui en font la demande.
Du côté de l’Office québécois de la langue française, on souligne que cette décision respecte en effet la loi. «Une facture uniquement en anglais n’est pas en contravention avec les dispositions de la Charte si le client le demande», a-t-on expliqué.
L’esprit de la loi
Cela ne convainc pas M. Laporte. «Nos institutions publiques doivent faire preuve d’exemplarité à l’égard de leurs pratiques linguistiques. Si tout un chacun peut avoir au Québec des communications uniquement en anglais d’un fleuron québécois... Nos institutions publiques ne doivent pas être bilingues», a-t-il déploré.
La situation est toutefois semblable en Ontario. Chez Hydro One, on souligne par exemple que les clients francophones peuvent obtenir une facture en français et avoir des services dans la langue de Desbiens.