Le 15 mai dernier, l’Assemblée nationale a demandé à l’unanimité aux gouvernements québécois et fédéral de confier à Revenu Québec la gestion d’une déclaration de revenus unique. L’idée n’est pas nouvelle. Les partis d’opposition à Québec, le Bloc québécois et, depuis peu, le NPD et l’aile québécoise du Parti conservateur la défendent.
C’est maintenant au tour des libéraux québécois de se rallier, alors qu’en septembre 2015, le président du Conseil du trésor d’alors, Martin Coiteux, se disait ouvert à la suggestion de la commission Robillard de confier à Ottawa la perception des impôts des Québécois. À la condition, précisons, de respecter l’autonomie fiscale du Québec.
Le revirement est bienvenu. Encore faut-il qu’il ait des suites. Le ministre des Finances, Carlos Leitão, a dit qu’il transmettrait la demande « très bientôt » à Ottawa, tout en avertissant qu’un tel changement serait long et complexe.
Et il faudra convaincre Ottawa. Si le bureau du ministre des Finances, Bill Morneau, a dit à La Presse canadienne être prêt à étudier cette éventuelle requête, la ministre du Revenu, Diane LeBouthillier, elle, a invoqué le risque de pertes d’emplois là où les centres fiscaux et bureaux de l’Agence du revenu du Canada sont installés, un argument repris par le syndicat des employés fédéraux. Elle a aussi insisté sur la nécessaire coopération internationale en matière de lutte contre l’évasion fiscale.
Ces préoccupations légitimes ne sont pas insurmontables. Si Ottawa peut collecter ses impôts et ceux des autres provinces, l’inverse est aussi vrai. À preuve, le Québec administre à la fois la TPS et la TVQ depuis 1991. Cela n’a pas été simple à mettre en place, mais la volonté politique y était.
On a résolu l’enjeu des emplois en offrant aux fonctionnaires fédéraux de rejoindre la fonction publique québécoise et d’ainsi combler les besoins de main-d’oeuvre pour faire face à la tâche accrue. Quoi qu’en dise la CAQ, il en serait de même avec l’adoption d’une déclaration de revenus unique combinant des régimes fiscaux différents. Pour ce qui est des enquêtes et de l’application de la loi, on ne voit pas ce qui empêcherait un accord de coopération.
Apanage des provinces en 1867, la taxation directe a été confiée au fédéral en 1942, le temps de l’effort de guerre, mais Ottawa ne s’en est jamais retiré. Le Québec, sous Maurice Duplessis, a répliqué en rétablissant un impôt provincial, ce qui explique ces deux déclarations fiscales des contribuables québécois.