Le bâillon est une procédure parlementaire pour mettre prématurément fin aux débats. Il est normalement utilisé dans les blitz de fin de session, pour s'assurer qu'un projet de loi passera avant une certaine échéance. Dans ces circonstances et de façon exceptionnelle, l'usage du bâillon peut se justifier.
Il est donc très étonnant que le gouvernement de Jean Charest ait utilisé le bâillon pour couper court aux discussions à l'Assemblée nationale à propos du projet de loi 40 sur l'équilibre budgétaire. Étonnant et regrettable parce que la bâillon est un déni de démocratie.
Tant à Québec qu'à Toronto et à Ottawa, les gouvernements ont effacé leurs déficits à la fin des années 1990. Le Québec et l'Ontario, comme le Manitoba et la Colombie-Britannique, d'ailleurs, ont dans cette foulée ajouté une protection supplémentaire contre les gouvernements futurs qui seraient tentés de reprendre la route des déficits. Ils ont tous adopté une loi les interdisant à l'avenir. C'était beau quand l'économie tournait à fond et que le ciel était bleu. Mais quand tout a tourné au gris et que nos industries se sont mises à tousser, les lois antidéficits se sont avérées des boulets lourds à traîner et, il faut bien le dire, inutiles. Il suffit de quelques entourloupettes parlementaires pour s'en débarrasser.
C'est ce que planifie le Québec avec son projet de loi 40.
Il n'y a pas urgence à l'adopter ces jours-ci plutôt que dans quelques semaines. Il n'y a pas d'incertitude non plus, puisque le gouvernement libéral est majoritaire à l'Assemblée nationale et qu'il peut gagner tous les votes du Salon bleu s'il s'en donne la peine.
Pourquoi un coup de force donc ? Cela demeure un mystère.
Ce que l'on sait, c'est qu'à l'occasion, le premier ministre Charest ne déteste pas ces foires d'empoigne où il peut jouer de ses gros bras. Certains soutiennent même que c'est dans sa nature. Ce n'est pas la première fois qu'il utilise le bâillon, aussi appelé « motion de procédure d'exception ». En décembre 2003, son gouvernement y avait eu recours pour réduire le nombre de syndicats dans le secteur de la santé et assouplir l'article 45 permettant le recours à la sous-traitance, notamment. Cette manière de faire avait été fortement contestée. Finalement, les prophètes de malheur auront eu tort : la Terre n'a pas cessé de tourner. Mais côté respect de la démocratie, M. Charest avait perdu des plumes. Il en a perdu d'autres cette semaine.
Si le bâillon est tombé, expliquent les libéraux, c'est que l'opposition péquiste refuse le débat loyal. En Chambre, Pauline Marois a tenté autant comme autant de faire dire au ministre des Finances, Raymond Bachand, comment il entendait redresser les finances publiques. Deux moyens ont été évoqués : une hausse de la Taxe de vente du Québec (TVQ) et un plafond sur la hausse des dépenses de l'État. Rien de plus. En réalité, M. Bachand serait bien mal pris de livrer toute une liste des mesures d'austérité qui frapperont le Québec d'ici la fin de leur mandat en 2012, tellement l'incertitude économique vient assombrir les augures.
Il n'empêche qu'imposer un bâillon quelques jours après la reprise des travaux parlementaires est bien mal débuter la saison politique.
Vancouver français
Les signaux ne sont pas très encourageants quant à la place du français aux Jeux olympiques de Vancouver. Il ne faudra pas se surprendre, quand s'ouvriront les Jeux, dans 146 jours, qu'il y ait des malentendus avec les services de sécurité quand tout le personnel recruté ne fait l'objet d'aucun test de français.
Pour la bonne raison que la firme qui procède à l'embauche de 400 agents, Contemporary Security Canada, n'a rien prévu en ce sens. Que la société insiste sur la connaissance de l'anglais va de soi. Mais en ne recrutant qu'en anglais et en ne vérifiant pas les connaissances linguistiques des postulants, on peut déjà prévoir que le français sera mal servi à ce chapitre à Vancouver.
Le commissaire aux langues officielles, Graham Fraser, s'est dit « considérablement inquiet » de la performance, jusqu'ici, du comité organisateur. Il dit qu'il n'est pas trop tard. Pour être mieux compris, il aurait dû dire : « It's getting awfully late ! »
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