Très souvent, Philippe Couillard dénonce les attaques violentes, la démagogie de la peur, les raccourcis, les demi-vérités.
Il donne même l’impression que ce parti pris pour la modération est dans sa nature ; que, foncièrement, il n’accepte que les échanges d’arguments rationnels.
Arrive toutefois un moment où il semble se dire que la fin justifie les moyens.
Et il se met à faire précisément ce qu’il pourfend.
Les gants tombent. Voilà le joueur étoile, habituellement gentleman, qui frappe comme un déchaîné, comme si, après s’être tant retenu malgré les coups reçus (et Dieu sait qu’il en reçoit !), il libérait un trop-plein.
L’instinct du tueur
En 2014, ça avait fonctionné pour lui, il faut le dire.
Quelques mois plus tôt, Pauline Marois avait confié chercher son « instinct de tueuse ».
Dès le déclenchement des élections, le 5 mars, Philipe Couillard, lui, l’avait trouvé, cet instinct ! « Je déteste ce gouvernement qui prend l’habitude de nous peindre comme des gens menacés ! » rageait-il.
Peut-être est-ce là la vraie nature de Philippe Couillard ? Ce même jour de 2014, un reporter lui faisait remarquer que son aversion pour son adversaire semblait viscérale : « Avez-vous remarqué que je parle avec mes tripes ? C’est vrai. Les viscères, les tripes, c’est la même affaire, hein ? Et je parle de ça parce que j’en ai assez, moi. »
Il y a quelques jours, en chambre, on avait vu poindre chez lui, après des semaines où il s’était montré plutôt apathique, une transition vers le mode « détestation » : « Il devrait être inquiet, parce qu’on va percer le rideau », avait-il averti François Legault.
En fin de semaine, sous le haut patronage de Jean Charest et de ses gants de boxe rouges, M. Couillard a achevé cette transition.
Il est désormais pleinement en mode « détestation ». L’instinct du tueur est revenu.
Il se croit
Dans ces moments, on dirait que M. Couillard croit sincèrement à sa propre rhétorique manichéenne.
Dans son discours des célébrations du 150e, samedi soir, il a soutenu, par exemple, que les libéraux, descendants des « rouges », avaient toujours été du bon côté de l’histoire, contre les « bleus » et leurs descendants, ces « forces de la réaction » qui se sont « opposées à toutes les politiques avant-gardistes » du PLQ.
Puis il a ajouté : « Écoutez bien les débats en cours. Vous y retrouvez la même opposition ! »
Les « bleus » d’aujourd’hui, bref, les Legault, les Lisée ? Tous réactionnaires !
Favoriser la famille, la natalité ?
« Une autre affaire du siècle dernier, a pesté M. Couillard dimanche. C’est quoi, la prochaine étape ? Les curés de la CAQ vont faire la tournée paroissiale pour vérifier si le monde a “des enfants en chemin”, comme on disait dans le temps ? »
Le nouveau président du PLQ, Antoine Atallah, a soutenu hier en anglais que, pour les anglophones de Montréal, François Legault était « un loup portant un habit de mouton ».
On comprend que les sondages inquiètent les libéraux et qu’ils ne sont pas les seuls à « jouer cochon » sur la patinoire. Mais l’élection est dans 308 jours.
De quoi le débat aura-t-il l’air lorsque sera venu le temps de voter ?
Du visage d’un Georges St-Pierre après un combat ?