Beaucoup l’ont sans doute oublié mais la France est directement concernée par la situation de la péninsule coréenne : elle est en effet restée membre de la Commission militaire d’armistice
(UNCMAC), chargée de surveiller le respect de l’accord d’armistice militaire coréen signé en juillet 1953 entre le Nord et le Sud.
Lors de la séance des questions au gouvernement, à l’Assemblée nationale, le 9 août, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a insisté sur la menace que représente la Corée du Nord, maintenant que tout porte à croire qu’elle est sur le point de se doter de missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) munis de têtes nucléaires. Et c’est la réalité de cette menace qui explique, selon lui, l’unanimité des membres du Conseil de sécurité des Nations unies pour renforcer les sanctions visant Pyongyang.
Cela étant, pour M. Le Drian, il faut être ferme à l’égard du régime nord-coréen. « Oui, il faut dialoguer, mais il ne faut pas que le dialogue serve de prétexte pour la Corée du Nord à gagner du temps, le temps d’aboutir à sa volonté initiale. Oui, il faut dialoguer pour que la Corée du Nord revienne à la table des négociations. Mais en ce moment, le meilleur moyen de dialoguer, c’est la fermeté », a-t-il dit.
À propos de fermeté, on ne peut pas reprocher au président américain, Donald Trump, n’en manquer. Après avoir déclaré que la Corée du Nord « ferait mieux de ne plus proférer de menaces envers les États-Unis » qui « se heurteront au feu et à la colère » de Washington et promis une réaction d’une ampleur « que le monde n’a jamais vue jusqu’ici », il a estimé qu’il n’avait pas « tapé » assez fort puisque Pyongyang lui a répondu en menaçant de viser l’île de Guam, dans le Pacifique, où l’US Air Force et l’US Navy disposent de bases importantes.
Du coup, le locataire de la Maison Blanche a remis une couche. « Les solutions militaires sont maintenant complètement en place, et prêtes à l’emploi, si la Corée du Nord se comporte imprudemment », a-t-il lancé via son compte Twitter. Et d’insister : « J’espère que Kim Jong-Un [le chef du régime nord-coréen, ndlr] trouvera une autre voie! »
« Si la Corée du Nord fait quoi que ce soit – ne serait-ce qu’en songeant à attaquer des gens que nous aimons, ou nos alliés, ou nous-mêmes – ils devront vraiment s’inquiéter », avait-il déjà affirmé, la veille, en réponse à la promesse nord-coréenne de lancer 4 missiles qui « voleront 17 minutes et 45 secondes sur une distance de 3.356,7 km, et s’écraseront en mer à 30 ou 40 km de Guam », après avoir survolé le Japon. Un plan qualifié de « précis » par certains commentateurs (mais si précision il y a, elle est dans les chiffres et pas ailleurs).
Cela étant, cette escalade verbale préoccupe la Chine, liée par un accord de défense avec la Corée du Nord, et la Russie. « Les risques sont très élevés, surtout en prenant compte la rhétorique employée. Il y a des menaces directes d’employer la force », a ainsi commenté Sergueï Lavrov, le ministre russe des Affaires étrangères. Moscou « fera tout pour qu’une confrontation entre les deux pays n’ait pas lieu », a-t-il assuré.
« L’Allemagne va participer de manière intensive aux possibilités de résolutions non militaires, mais je considère l’escalade verbale comme une mauvaise réponse », a, de son côté, réagi la chancelière allemande, Angela Merkel, après les dernières déclarations de M. Trump.
Toutefois, l’Australie, qui a été menacée du feu nucléaire par la Corée du Nord, a apporté son soutien aux États-Unis, tout comme le Japon, qui s’est dit prêt à abattre tout missile nord-coréen se dirigeant vers Guam.
« Il faut être très clair. S’il y a une attaque nord-coréenne contre les Etats-Unis, le traité Anzus sera invoqué et l’Australie apportera son aide aux Etats-Unis », a déclaré Malcolm Turnbull, le Premier ministre australien, en évoquant un accord de défense signé en 1951 par Washington, Wellington et Canberra.
Alors, au regard des déclarations des uns et des autres, que peut-il se passer? Difficile à dire… En revanche, l’on sait que ni les États-Unis et ni la Corée du Nord n’ont intérêt à déclencher les hostilités. « La guerre est une tragédie bien assez connue, il n’y a pas besoin de faire un dessin, cela serait catastrophique », a d’ailleurs fait valoir le général James Mattis, le chef du Pentagone. Il y a « des résultats diplomatiques et je veux rester sur cette dynamique », a-t-il ajouté, en faisant référence à la dernière résolution du Conseil de sécurité, évoquée par M. Le Drian.
Étant donné que le but du régime nord-coréen est sa survie, on imagine mal qu’il mette ses menaces à exécution en visant l’île de Guam. Et sa disparition éventuelle n’enchante guère ni la Chine, qui verrait de l’instabilité à sa frontière, ni la Corée du Sud, pour qui une éventuelle réunification serait économiquement coûteuse.
Mais si Washington décide de lancer une intervention, alors les forces américaines ne devront pas se rater en misant sur la rapidité d’exécution afin de bénéficier d’un effet de surprise pour empêcher toute riposte contre la Corée du Sud (artillerie, missile, armes chimiques, etc). Car si leur aviation n’aura pas de mal à imposer sa supériorité, il en ira autrement au sol.
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