Le populisme, explique Philippe Bernier Arcand, est un antiélitisme qui oppose le peuple, la « majorité silencieuse » considérée comme un bloc homogène, aux dirigeants déconnectés des « vraies affaires ». Pour parler au « vrai monde », qui vivrait dans « les régions » plutôt qu’en ville, les populistes prétendent lui « dire tout haut ce que celui-ci pense tout bas », se réclament du « gros bon sens », négligé par les élites, et proposent des solutions simplistes qui flattent « les sentiments plutôt que la raison ».
Les populistes de droite attribuent tout ce qui va mal à la gauche dépensière, multiculturelle, prétentieuse et, souvent, aux étrangers, surtout d’origine arabe, qui mineraient nos valeurs. Les populistes de gauche, Chávez par exemple, pensent par slogans pour dénoncer le capitalisme et les États-Unis.
Deuxième essai de Bernier Arcand, La dérive populiste diagnostique une montée du populisme, en Europe, aux États-Unis et au Québec, principalement dans sa version de droite, et en propose une critique. Le rôle des élites et des intellectuels, rappelle l’essayiste, n’est pas d’être aveuglément et par opportunisme au service de « l’opinion du peuple », qui, de toute façon, n’est jamais homogène, mais de « défendre l’intérêt général et d’être des militants de la raison ».
Au passage, dans cet essai dont le propos reste souvent trop général et navigue de façon un peu confuse entre les populismes européens, américains et québécois, Bernier Arcand critique nommément quelques populistes (Maxime Bernier, Éric Duhaime, Stéphane Gendron, le maire Jean Tremblay, les journaux de Québecor) et des partis politiques (les conservateurs et leur tendance monarchiste, l’ADQ et le PQ tentés par un discours identitaire simpliste, la CAQ et son illusoire troisième voie) bien de chez nous. Étonnamment, il ne dit rien de la gestion très populiste de la crise étudiante par les libéraux de Jean Charest. Dans l’ensemble, cependant, cet essai joliment écrit, qui identifie un problème réel menaçant la qualité de notre vie démocratique, s’en tient un peu trop à des généralités. En ciblant plus spécifiquement le populisme québécois, il aurait gagné en précision et en efficacité.
« Le populisme québécois, note l’essayiste, est après tout bien timide lorsqu’on le compare au populisme [sic] américain et européen. » Bernier Arcand veut donc « sonner l’alarme avant qu’il ne soit trop tard ». Il a raison.
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La dérive populiste
Philippe Bernier Arcand
Poètes de brousse
Montréal, 2013, 170 pages
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