Le ministre de la Santé, Réjean Hébert, se dit clairement en faveur de la fluoration de l’eau. « En fonction des données scientifiques démontrées, la fluoration de l’eau est considérée comme une bonne mesure de santé publique selon le ministre, notamment pour la prévention de la carie dentaire », affirme son attachée de presse, Arianne Lareau.
« Toutefois, conscient qu’il y a des divergences d’opinion à ce sujet, le ministre était ouvert à l’idée que la Commission de la santé se penche sur ce sujet », précise-t-elle à la demande du Devoir, à la veille des travaux qui s’ouvriront à Québec lundi.
Cette position va clairement à l’encontre du programme électoral du Parti québécois, dans lequel on pouvait lire qu’un gouvernement péquiste « modifiera la loi pour interdire la fluoration de l’eau potable ».
Fort de cette promesse, les opposants à la fluoration ont interpellé le gouvernement ces dernières semaines afin qu’il respecte son engagement, plus de sept mois après son élection.
Question d’éthique
Le mois dernier, la députée libérale de Richmond, Karine Vallières, a déposé à l’Assemblée nationale une pétition signée par un regroupement de citoyens de sa circonscription réclamant une commission parlementaire pour « faire la lumière sur les aspects scientifiques, sanitaires, économiques et légaux » de la fluoration de l’eau potable. Les signataires demandent aux parlementaires de « statuer sur la nécessité d’abolir le programme de fluoration de l’eau potable ».
Les opposants ont réussi à imposer leur agenda et pourront exprimer leur point de vue lundi et mardi dans le cadre d’une commission parlementaire.
« Le gouvernement doit prendre ses responsabilités en déposant une loi claire et interdire la fluoration de l’eau potable pour éviter les conflits locaux, sources de tensions inutiles dans les municipalités du Québec », écrit la Coalition Eau Secours dans son mémoire, dont Le Devoir a obtenu copie.
L’organisme, qui milite depuis plusieurs années pour sensibiliser les citoyens et élus municipaux aux risques de la fluoration, estime que « de nombreux arguments scientifiques contredisent la thèse selon laquelle les fluorures dans l’eau potable sont bénéfiques pour la santé publique et sans effet observable pour l’environnement ».
En entrevue, la présidente de l’organisme, Martine Chatelain, affirme que c’est d’abord et avant tout une question d’éthique puisqu’un citoyen vivant dans une ville où l’eau est fluorée n’a pas le choix d’en ingérer. « C’est une médication sans l’accord de la personne. C’est comme si on disait : on va ajouter du fluorure pour la carie dentaire, mais on trouve aussi que les gens ne sont pas assez de bonne humeur, on va leur mettre un peu de Prozac et pour le cancer, il y a tel produit… on va arriver à quoi ? C’est de l’eau potable, de l’eau pour boire, pas de l’eau pour soigner les gens ! »
Stratégie nationale
Plusieurs tenants de la fluoration viendront également partager leur avis sur la question. Les parlementaires entendront notamment l’Ordre des dentistes du Québec, de même que l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), dont la stratégie nationale prévoyait de « mobiliser un vaste ensemble des partenaires » afin de rejoindre, par cette mesure préventive, plus de 50 % de la population du Québec.
Depuis 2005, l’INSPQ fait la promotion de la fluoration auprès des municipalités de plus de 5000 habitants, qui sont libres de choisir si elles acceptent ou non de fluorer l’eau aux frais de l’État. Dans plusieurs villes, comme à Mont-Joli, où le débat sera tranché par référendum lors des prochaines élections municipales, les représentants de l’INSPQ se heurtent à la résistance des opposants sur le terrain. « Plus les gens sont informés, plus ils sont contre », estime Martine Chatelain de la Coalition Eau secours.
Il y a quelques années à peine, la ministre des Ressources naturelles, Martine Ouellet, tenait le même discours. Car avant de se lancer en politique, c’est elle qui menait la bataille contre la fluoration de l’eau à titre de présidente de la Coalition Eau Secours.
Mais son collègue de la Santé et des Services sociaux, le docteur Réjean Hébert, penche plutôt du côté de l’INSPQ. Il en va de même pour le critique de l’opposition officielle, Yves Bolduc. « La position du Parti libéral, c’est de respecter l’opinion des experts et les experts, présentement, recommandent la fluoration de l’eau, répond l’ancien ministre de la Santé en entrevue. Mais quand on arrive en commission parlementaire, on arrive avec l’esprit d’écouter. Probablement que mardi soir, après avoir entendu tous les groupes, ça va nous permettre de nous faire une meilleure tête sur le sujet. »
Commission parlementaire - Fluoration de l’eau: Québec a un préjugé favorable
Le Parti québécois avait pourtant promis de l’interdire
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