Classe politique en décomposition

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Au Québec, on n'en est pas encore là, mais ça s'en vient

La campagne pour l’élection présidentielle a connue un véritable tournant, avec l’instrumentalisation – désormais évidente – de procédures de justice pour déstabiliser des candidats.
Dans un article publié sur le site du magasine Causeur, Maître Régis de Castelnau écrit la chose suivante: « Que l'on comprenne bien, le propos n'est pas de considérer que François Fillon n'a rien à se reprocher, ou que le Front national est exempt de tout agissement à caractère pénal. Le problème est que cette accélération à ce moment-là d'affaires anciennes poursuit un but politique évident: empêcher le débat de fond. » (1) C'est bien à l'évidence de cela dont il s'agit. La politique des « fuites », vieille tradition de la IIIème et de la IVème République, distillées à des organes de presse soigneusement choisis, outre qu'elle démontre de la part de ceux qui s'y livrent un mépris total des règles de droit et de la procédure, indique bien le caractère éminemment politique de ce qui se passe aujourd'hui.
François Fillon aux abois

L'annonce de la prochaine mise en examen de François Fillon équivaut donc à un véritable séisme dans le cours d'une campagne déjà passablement agitée. Si la question des emplois fictifs au Parlement risque de donner lieu à de belles passes d'armes entre procureur et avocats, la question se pose effectivement au sujet de la Revue des Deux Mondes, et l'abus de bien social pourrait être constitué, ainsi que son recel. Mais, l'essentiel n'est pas là. François Fillon avait déjà perdu une bonne part de se légitimité par les pratiques auxquelles il a eu recours, qu'elles soient légales ou pas. On ne peut décemment prendre à titre personnel l'argent de l'Etat et exiger l'austérité pour les autres. Cette contradiction était présente depuis le début de ce que l'on a appelé le « Pénélope Gate ». Elle devient désormais irrémédiable.
François Fillon est ainsi abandonné par certains de ses soutiens, et en particulier par Bruno Lemaire. Il a appelé le dimanche 5 mars à un grand rassemblement à Paris, au Trocadéro, et semble avoir réussi son pari. Mais, cela sera-t-il suffisant? On ne sait pas, à l'heure où sont écrites ses lignes si le mouvement de défections autour de François Fillon va s'amplifier ou s'arrêter dans les jours qui viennent, comme pourrait l'indiquer la présence de certains responsables des « Républicains » au rassemblement du Trocadéro. Mais, il est clair que le coup est dur, et qu'il a porté. François Fillon est aujourd'hui contraint de recourir au populisme, au « peuple » contre les élites. Il a une base pour le faire, mais il n'est pas dit que cela suffira. Déjà, certains dans les coulisses s'activent à ressusciter la candidature d'Alain Juppé, offrant à ce dernier une revanche bien surprenante (et bien peu démocratique) sur sa nette défaite face à François Fillon lors des primaires de la droite et du centre. Le simple fait que l'on puisse évoquer ce type de solution montre à quel point les « élites » ont perdu le sens de la démocratie.
Monsieur le « gendre idéal »…

C'est donc bien un séisme, et l'on ne voit que trop à qui il profite. On peut même se demander si tel n'est le but ultime de toute cette opération. Empêtré dans ses démêlés judiciaires, François Fillon est durablement, et probablement décisivement, affaibli face à l'autre candidat de l'oligarchie financière et médiatique, on veut parler d'Emmanuel Macron. Pourtant, ce dernier ferait bien de prendre garde. Les déclarations de patrimoine sont rien moins que claires. Si, comme l'avance Olivier Berruyer (2), Macron a bien dépensé pendant trois ans l'équivalent d'un SMIC par jour, on peut se demander quel exemple, que ce soit comme citoyen ou comme gestionnaire, il entend bien nous donner.
Notons par ailleurs qu'il faudrait souffrir d'amnésie galopante pour oublier la contribution de M. Emmanuel Macron au marasme économique actuel, que ce soit comme conseiller économique du Président François Hollande ou comme Ministre de l'Economie. Il porte ainsi une large part de responsabilités dans l'échec économique, mais aussi politique, de la présidence François Hollande. Il apparaît déjà usé alors qu'il est encore jeune. On peut le croire un peu « ficelles » dans sa capacité à jouer sur les mots, à ne pas assumer sa part dans le désastre économique du quinquennat, mais aujourd'hui il est usé jusqu'à la corde.
En un mot, rien ne permet de faire confiance à un homme qui, à défaut de nous faire prendre l'autobus, entend nous mener en bateau. Mais, renforcé du soutien d'un vieux cheval de retour, fourbu après bien des campagnes — on veut parler de Bayrou — il est en mesure de profiter de l'agitation tant médiatique que politique provoquée par cette instrumentalisation de la justice. Il est, à l'évidence, celui auquel le « crime » profite. En fait, on sent trop l'opération politique qui vise à promouvoir un candidat au profil de gendre idéal mais sans programme tout comme l'on promeut un paquet de lessive ou de couches pour bébé. Emmanuel Macron, c'est le paquet de pampers de la politique.
L'héritier empêtré
Cela nous conduit à l'héritier officiel, à défaut d'être le fils spirituel, de notre Président: M. Benoit Hamon. Dans ses dernières déclarations, celle portant sur les intérêts de la dette est d'une insondable bêtise, et d'une démagogie certaine. Ne pas payer les intérêts, même pour une durée de trois ans, c'est compromettre le système de l'assurance-vie qui joue un rôle capital dans l'épargne des français. C'est, de plus, poser le problème de la distinction entre les détenteurs « résidents » et les détenteurs « non-résidents » de cette dette.
La démagogie, on sait que M. Benoit Hamon la pratique largement, comme on peut se souvenir des déclarations imprudentes et impudentes qu'il avait faites en septembre 2009 sur la dette publique (3). Je n'ai jamais pensé que Benoit Hamon soit « idiot », comme je l'écrivais dans Marianne2 à l'époque. Mais il s'agit d'un démagogue de la pire espèce, prêt à raconter n'importe quelle énormité pour pécher quelques voix dans le vivier de Mélenchon.
Cette démagogie, qui cache mal des reniements importants, comme sur la question de la « loi travail » ou sur divers autres points économiques, n'empêche pas sa campagne de retomber comme un soufflet qui aurait trop attendu.
Tout ceci dénote une classe politique en pleine décomposition. Il reste à espérer que ces trois candidats qui en fait sont les trois cartes de l'oligarchie pour ces élections, finissent pas s'autodétruire. Et il faut dire que, de manœuvres en magouilles, ils s'y prennent plutôt bien…
(1) Affaires à répétition: comment donner raison à Marine Le Pen

[(3) L'employé des pompes funèbres->(3) L'employé des pompes funèbres]


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