Hugo de Grandpré et Tommy Chouinard - Un référendum gagnant entraînerait le Québec dans un «trou noir» et pourrait mener à sa partition, a affirmé le premier ministre Jean Charest, hier.
Cette déclaration fracassante, démentie trois heures plus tard, a ramené en force la question nationale dans la campagne électorale.
«Je ne crois pas que le Québec serait indivisible, mais vous savez quoi ? Je ne pense pas que c'est ce dont les gens veulent parler présentement», a-t-il déclaré à Deux-Montagnes, vers 15 h 15.
Puis un communiqué diffusé par le Parti libéral un peu passé 18 h 30 est venu rectifier le tir. «Dans une réponse donnée en anglais et pouvant porter (sic) à confusion, le premier ministre voulait exprimer l'idée que le territoire du Québec était indivisible, et non le contraire», peut-on lire dans le document.
Un peu plus loin, Jean Charest souligne toutefois qu'«au lendemain d'une hypothétique séparation du Québec, notre peuple affronterait une période de turbulence. Dans ce scénario que nous ne souhaitons pas, nous ne pouvons exclure la probabilité que cette question (de la partition) soit soulevée».
Tout a commencé au cours d'une conférence de presse, où M. Charest a répondu à une série de questions posées par une journaliste du quotidien The Gazette sur des propos tenus en 1996. «Si (les séparatistes) ont un droit de se séparer, ils ne peuvent le nier à d'autres», avait-il confié à l'époque au même quotidien.
«Le sens de mes propos, a expliqué Jean Charest hier, c'est que le lendemain d'un vote qui serait favorable à la souveraineté, quand on s'engage dans un processus de sécession, de partition d'un territoire, ce qui serait le cas pour le Québec avec le reste du Canada, on s'engage dans ce que j'appelle moi un trou noir.»
«Je ne souhaite pas que ce soit le cas. Je ne veux pas que le Québec se sépare du reste du Canada et je ne souhaite pas que toutes ces questions-là se posent et je ne souhaite pas la partition du territoire québécois. Mais ces questions-là vont se poser», a ajouté le premier ministre.
Charest doit défendre l'intégrité du territoire, rétorque Boisclair
Furieux, le chef du Parti québécois, André Boisclair, a aussitôt demandé à Jean Charest de «laisser de côté quelques instants ses accents partisans, de sortir de ses habits de fédéraliste obsédé, et de dire de façon claire aux Québécois que l'intégrité du territoire du Québec est inattaquable dans le régime constitutionnel actuel et qu'elle est inattaquable dans un Québec souverain».
«Il ne peut pas s'esquiver comme ça avec un communiqué de presse. Il doit regarder les Québécois dans les yeux et leur dire la vérité, que l'intégrité du territoire du Québec sera maintenue au lendemain d'un référendum gagnant. Il ne peut pas laisser planer l'ambiguïté», a-t-il affirmé.
Le débat sur la partition a fait rage au Québec et au Canada à la suite du référendum de 1995. Ce débat avait notamment donné naissance à l'article 8 de la loi 99, adoptée en 2000 par le gouvernement Bouchard. À l'époque, Jean Charest avait voté contre l'adoption de la loi. Il prétendait alors que la question était politique et non juridique. Son parti avait tenté d'introduire une résolution à l'Assemblée nationale, qui proposait que l'Assemblée «énonce l'importance que l'intégrité territoriale du Québec soit sauvegardée».
Ce n'est pas la première fois de la campagne que M. Charest laisse planer des doutes sur d'éventuelles complications dans le cas d'un référendum gagnant. Il est allé jusqu'à remettre en question la continuité des transferts fédéraux advenant une victoire du PQ le 26 mars. Là encore il est revenu sur ses propos par la suite.
André Boisclair a reproché à Jean Charest de «jouer avec des allumettes» depuis le début de la campagne électorale. «Cette fois-ci, il s'est brûlé. Il dépasse les bornes», a-t-il ajouté.
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