Le gouvernement va-t-il déclencher une commission d'enquête après avoir entendu le patron de l'Unité anticollusion Jacques Duchesneau, mardi? La question a été posée à chacun des ministres aujourd'hui, qui ont tous répété la ligne imposée par le premier ministre. Mais certains sont assez créatifs quand vient le temps de régurgiter des «lignes» de presse.
Prenez le ministre délégué aux Ressources naturelles et à la Faune, Serge Simard, par exemple, qui s'exprime à l'occasion comme un adulte. À la sortie du conseil des ministres, il déclare : «Le premier ministre a donné des critères ce matin. L’objectif en regard de ces critères là il y a des décisions qui vont se prendre.»
Tommy Chouinard de La Presse, le relance : «Mais les critères sont-ils compatibles avec une enquête publique?» «Les critères sont compatibles à ce que ce qu’on s’attend de faire, [...] c’est que s’assurer que ceux qui ont commis des délits par rapport aux lois soient mis en prison, c’est ça l’objectif.»
Chouinard simplifie sa question : «Une enquête publique est-ce que c’est possible?» Et ça a un effet presque dopant pour M. Simard, qui lance : «Ben M. Duchesneau l’a carrément démontré hier qu’avec une enquête publique, c’était…on … il y avait des passes qui se faisaient pour les gens qui se présentaient là et que… on ne pouvait pas les accuser de ce qu’ils avaient dit… en commission publique.»
Vous avez bien lu. Mais vous n'avez rien compris à cette nouvelle langue. Tout comme Martin Ouellet, de la Presse canadienne, qui y va d'une supplique : «Pouvez-vous être plus clair, M. Simard ?»
Et le ministre de se mettre à parler très fort... à défaut d'être intelligible : «Ben plus clair, ça veut dire tout simplement que ça leur donne une passe pour s’assurer qu’ils ne seront pas accusés. C’est ça je dis, c’est la bonne passe. Merci.» Rhéal Séguin, du Globe and Mail retient le ministre avec une sous-question : «C’est ça le gros danger que vous voyez?»
M. Simard reprend sa réponse de film western : «J’ai dit que l’objectif dans tout ça, c’est qu’on réussisse à mettre les gens qui sont coupables en prison. Et c’est toujours l’objectif qu’on a.»
Louis Lacroix, de Cogéco Nouvelles ouvre alors un nouveau front : «La réflexion va durer combien de temps M. Simard, est-ce que vous en avez parlé, de ça?»
Serge Simard saute alors sur l'occasion pour illustrer toute sa connaissance du vocabulaire juridique : «La réflexion va prendre le temps, parce que vous comprendrez qu’en justice, là, c’est très important de ne pas faire d’erreur parce que quand on poursuit, quand on veut poursuivre des gens, il faut que les preuves soient bien étayées et il faut s’assurer qu’on peut les mettre en prison. Pis pour ça, lorsqu’ils se présentent en cour, faut que la preuve soit bien étayée. Donc, il faut s’assurer que la preuve est protégée. S’assurer que les témoins sont protégés et s’assurer bien sûr que les victimes sont protégées. Parce que, vous le savez comme moi, être victime d’une organisation… on peut payer la note d’une façon très importante.»
Payer la note, oui. Au fait, n'est-ce pas ce qu'on fait «de façon très importante» sur les chantiers depuis qu'on est «victime d'une organisation», monsieur le ministre? Au fond, est-ce qu'il vaut vraiment la peine que M. Simard réponde?
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