Le 1er octobre dernier, le Québec a élu un nouveau gouvernement. Si tous les observateurs s’entendent pour qualifier de nouvelle ère la période qui débute, peu ont souligné que ce sont les régions qui l’ont porté au pouvoir. Ainsi, pour la première fois depuis longtemps, la majorité gouvernementale ne provient pas des grands centres, mais de communautés qui ont aussi soif de changements. À titre de porte-parole des régions, la Fédération québécoise des municipalités (FQM) demande au premier ministre désigné que cette nouvelle réalité se reflète dans la composition de son Conseil des ministres.
Depuis trop longtemps, les ministères stratégiques sont principalement confiés à des députés qui proviennent des grands centres. Par exemple, on doit remonter à Gérard D. Lévesque pour trouver le dernier ministre des Finances véritablement originaire d’une région du Québec. M. Legault doit donc saisir l’occasion qui lui est offerte pour rétablir les équilibres et donner aux députés provenant de régions la chance de relever les plus importantes responsabilités de l’État québécois.
Pour marquer son attachement envers les régions, M. Legault doit rebâtir un partenariat fort entre l’État et les élus des gouvernements de proximité que constituent les municipalités et les MRC. Depuis 2003, chaque région a son ministre responsable qui n’est doté d’aucun pouvoir ni budget, leur capacité réelle se limitant à la représentation auprès de ses collègues titulaires. Ce modèle n’a pas donné les résultats escomptés, les régions demeurant toujours dépendantes des volontés des ministères centraux et victimes des problèmes de cohésion des programmes et des interventions de l’État. Pour s’en convaincre, il suffit de citer l’exemple du programme des pôles régionaux d’innovation lancé au début de 2018, qui a exclu les MRC alors que la loi leur confie la responsabilité du développement et de l’accompagnement des entreprises sur leur territoire. Si l’intention de départ était bonne, sa mise en place s’est faite sans tenir compte de cette réalité et a malheureusement suscité convoitise et division étant donné les sommes en jeu, fragilisant même certaines démarches de concertation de développement local et régional dans plusieurs régions du Québec.
Pour rebâtir les liens entre Québec et ses régions sur des bases solides, le premier ministre doit insuffler un véritable réflexe région au gouvernement en nommant un ministre des Régions doté des pouvoirs horizontaux suffisants pour mener à terme une politique ambitieuse et généreuse de développement régional en concertation avec les tables de préfets des territoires. Après des années de concentration des activités des ministères, la tâche de répondre aux besoins des régions commande des gestes forts et concrets de la part du premier ministre.