Invitée à la Mostra, Catherine Deneuve s’est indignée des attaques contre Roman Polanski qui présente, cette année, à Venise, son dernier film, dans une ambiance houleuse où de nombreuses voix se sont élevées pour rappeler les turpitudes passées du réalisateur. À en croire Catherine Deneuve, Roman Polanski, tout comme Woody Allen, serait une victime du système judiciaire américain qui cède volontiers à un puritanisme totalement hors du temps. Mais aussi à une forme de populisme nourri par les basses classes de l’Amérique profonde. Eh oui, la justice ne devrait s’abattre que sur les ploucs, beaufs et populos, et s’ils votent Trump, c’est bien mérité, n’est-ce pas ?
Allen et Polanski, qui ont sévi à Hollywood, n’auraient donc fait que céder à de menus caprices, de simples dérivatifs, pour calmer les tensions que leur créativité si féconde traduit probablement en fantasmes, avant de passer à l’acte et se jeter sur la moindre mineure de passage ? Surtout s’il s’agit, là encore, d’une pauvre fille, une « greluche » des rues, attirée par tout ce qui brille, et qui devrait au contraire être honorée de servir le bon plaisir de tels monuments du septième art. Catherine Deneuve, évidemment, ne dit pas cela. Mais, peut-être même, faudrait-il les décorer de l’ordre des Arts et des Lettres pour avoir offert à de si ordinaires personnes le meilleur d’eux-mêmes. Mais, pardon, pour Polanski, c’est déjà fait : il est commandeur dans cet ordre prestigieux. Il est même membre de la prestigieuse Académie des beaux-arts, c’est dire.
Catherine Deneuve prend leur défense, se plaçant, d’une certaine façon, elle-même parmi cette caste d’intouchables, de demi-dieux sur leur Olympe. Plongée depuis des décennies dans ce monde hors-sol, elle ne côtoie probablement que ce type de personnages, alors elle prend fait et cause pour eux, espérant presque nous tirer des larmes du sort indigne que la Justice leur fait subir. Pensez, des demi-dieux, assignés au tribunal, comme de la banale populace… Alors, dans cet univers où les lois de la caste dépassent de loin toute morale, tout sens du commun, il paraît évident de défendre ceux qui se croient autorisés ou se sont crus autorisés, par leur aura et leur notoriété, à abuser de mineurs. Cela arrange bien, aussi, de voler au secours de cinéastes qui sauront peut-être, un jour, qui sait, renvoyer l’ascenseur en offrant un rôle : on perd peut-être le sens des valeurs, dans ce monde-là, mais jamais le nord…
Reste, pour nous autres simples citoyens, à être pleinement conscients de cela et à relativiser les leçons de morale qu’ils nous font sur la protection de l’enfance, l’environnement, les animaux, les réfugiés et tout ce dont ils nous bassinent à longueur de tribune.