AU SERVICE DE L’ALBERTA
Fort de son énergie hydro-électrique propre, la réputation du Québec est celle d’un État respectueux de l’environnement. Or, depuis quelques années, son bilan s’assombrit.
En voie de devenir la plaque tournante continentale pour le transport du pétrole issu des sables bitumineux, le Québec se met au service des intérêts économiques de l’Alberta et de l’industrie pétrolière.
À la recherche de nouveaux marchés pour ces hydrocarbures «non conventionnels» qu’on appelle en Europe le «pétrole sale», l’industrie, le gouvernement albertain et leur allié fidèle, Stephen Harper, ont trouvé preneurs au Québec.
La pétrolière albertaine Enbridge jouit de l’appui des libéraux, péquistes et caquistes pour son projet d’inversion de l’oléoduc 9B. S’étendant de l’Ontario à Montréal, il ferait transiger des centaines de milliers de barils quotidiens par des zones peuplées, le Saint-Laurent et plusieurs rivières.
Bref, tout déversement sérieux mettrait en péril l’eau potable de millions de citoyens. Malgré les nombreux déversements déjà à son actif sur le continent, Enbridge a droit ici à tous les égards.
D’une complaisance infinie
Sous le gouvernement Marois, les trois principaux partis lui déroulaient le tapis rouge lors d’une commission parlementaire d’une infinie complaisance. Les exemples de l’avancée fulgurante des pétrolières au Québec ne manquent d’ailleurs pas.
Le projet de la compagnie albertaine TransCanada d’un port pétrolier à Cacouna repose sur le transport par oléoduc de plus d’un million de barils quotidiens de brut albertain. Les risques potentiels pour le fleuve et les bélugas qui s’y reproduisent sont troublants.
Radio-Canada nous apprend aussi qu’un «navire pétrolier géant a jeté l’ancre dimanche» à Sorel-Tracy. Son chargement: du pétrole issu des sables bitumineux. L’augmentation du nombre de ces empires flottants sur nos eaux sera exponentielle. Tout comme les risques de déversement.
Pour le moment, la consommation de pétrole demeure un incontournable des sociétés avancées. Se faire les serviteurs des sables bitumineux albertains est cependant une autre histoire.
La liste noire s’allonge
Hier, le Journal de Québec ajoutait un item de taille à une liste noire qui s’allonge. Pour fabriquer le béton, la future cimenterie de Port-Daniel devrait «importer jusqu’à 175 000 tonnes de coke de pétrole par année» – le «déchet ultime des raffineries». L’augmentation des émissions de gaz à effet de serre en serait vertigineuse.
Le projet a beau s’annoncer comme le plus polluant de l’histoire du Québec, il peut compter sur l’appui du PLQ, du PQ et 450 millions de dollars en fonds publics.
En cumulant les projets risqués, la classe politique manque à son devoir de protection de la population, de l’air qu’elle respire, de l’eau qu’elle boit et d’un écosystème unique.
Son parti-pris pour les pétrolières alimente aussi le glissement du pouvoir politique et économique vers l’Ouest canadien.
À New York depuis hier pour le Climate Week 2014, le premier ministre Philippe Couillard ne s’en vantera pas. Quant à son homologue fédéral, Stephen Harper, il pousse aujourd’hui l’arrogance jusqu’à bouder le Sommet de l’ONU sur le climat.
Entre l’esquive d’Ottawa et l’irresponsabilité de Québec, la question environnementale en prend pour son rhume.
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ADDENDUM:
- Coup de théâtre: mardi après-midi, la Cour supérieure suspend les travaux de forages autorisés par le gouvernement Couillard à Cacouna. Pour lire le jugement, c’est ici: http://www.cqde.org/wp-content/uploads/2014/09/document.pdf
Pour un résumé du jugement, c’est ici : http://www.ledevoir.com/environnement/actualites-sur-l-environnement/419297/port-petrolier-la-cour-fait-cesser-les-forages-a-cacouna
- Et pour un coup d’œil sur la mobilisation citoyenne et politique qui s’organise de plus en plus contre le projet de port pétrolier à Cacouna, c’est ici: http://www.journalensemble.coop/article/2014/09/porteurs-de-petrole/704
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