Le Journal de Montréal nous apprend que le gouvernement du Québec songe à autoriser le forage sur l’île d’Anticosti de 3 900 à 6 500 puits pour faire du fractionnement chimique.
Bien-sûr, le gouvernement du Québec n’a pas changé d’avis sur l’exploitation du pétrole et du gaz de schiste. Dans l’état actuel des connaissances et des technologies, le risque est très élevé. Trop élevé pour tenter cette opération dans la vallée du St-Laurent, là où habite la majorité de la population et là où sont implantées la plupart des industries du Québec.
Une île lointaine
Mais l’île d’Anticosti est loin, elle est peu peuplée, alors pourquoi ne pas courir ce risque ? Rien ne dit que les substances hautement toxiques utilisées par les pétrolières n'aboutiront pas un jour dans le golfe du St-Laurent, mais on verra de brillants avocats arguer que le volume d’eau du golfe est tel que cette pollution éventuelle aurait un impact marginal sur la faune et la flore du golfe. Exit donc l’argument de la pollution des nappes phréatiques et tant pis pour les générations à venir qui voudraient s’établir sur l’île.
Comme les formations géologiques de l’île sont très anciennes, il y a fort à parier que le pétrole schiste qui s’y trouve sera encore plus difficile et encore plus coûteux à extraire qu'ailleurs.
Une production non-rentable
Malheureusement pour les compagnies qui veulent développer le gaz et le pétrole de schiste, cette activité ne semble pas rentable. En raison de la forte chute de production des puits dès la première année, il faut constamment forer de nouveaux puits. Or, ces forages continus sont très coûteux. Coûteux au point de donner aux montages financiers autour de l’extraction du gaz et du pétrole de schiste les apparences d’une vaste pyramide de ponzi.
Mais il ya plus. Si l’on veut exploiter autant de puits de gaz et de pétrole de schiste sur l’île d’Anticosti, il faudra construire des routes, des cimenteries*, des quais, des villes, des centrales électriques, des ponts, des aéroports, etc. Et qui donc va payer pour tout cela ? N’en doutez pas, une grande partie de la facture sera refilée aux contribuables du Québec. Alors que les pétrolières devraient assumer tous les coûts.
En fait, il y a peu de chance que les coûts publics d’un projet aussi pharaoniques soient jamais remboursés par les revenus que l’État tirerait en taxes et en impôts de cette ressource. Pire, l’argent public investi dans ce projet ne serait pas investi ailleurs dans l’économie du Québec.
Des coûts élevés en carbone
Mais attention, la liste des dépenses ne s’arrête pas là. L’extraction du gaz et du pétrole de schiste entraîne une forte production de gaz carbonique. Les moteurs qui sont utilisés pour pomper le gaz et le pétrole sont particulièrement polluants, bien plus que la production de gaz ou de pétrole elle-même. Du moins, c’est ce que m’a confié un ingénieur texan spécialisé dans l’extraction de ce genre de pétrole. Toujours est-il qu’il faut ajouter aux coûts mentionnés ci-dessus ceux de la taxe sur le carbone ! Une bonne partie des crédits que nous aurons accumulés grâce à notre hydroélectricité risque d’y passer.
À sa face même, il est évident que le projet d’exploitation de gaz ou de pétrole de schiste sur l’île d’Anticosti n’est pas rentable.
Faut-il ajouter qu’avec les bas prix actuels du gaz et du pétrole, on se demande où est l’urgence de démarrer la production vers 2020 ? Pourquoi ceux qui croient tant à la rentabilité de cette ressource, malgré tous les arguments qui vont en sens contraire, ne veulent-ils pas attendre que le coût de technologies d’extraction baisse et que les prix du gaz et du pétrole augmentent substantiellement ?
Au fait, il se pourrait que les prix du pétrole et du gaz demeurent bas pendant encore une vingtaine d’années...
* Pour le béton des puits, des routes, des ponts, etc.
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