Consultez la Déclaration Maîtres chez nous 2011
Une brochette de personnalités du monde politique et des groupes citoyens et environnementaux, ainsi que de toutes les régions, ont endossé hier une «Déclaration» qui revendique une reprise de possession collective de l'ensemble des ressources naturelles du Québec.
Les signataires exigent par ailleurs du gouvernement Charest qu'il justifie ses «entorses» au principe de la propriété publique des ressources naturelles depuis son arrivée au pouvoir, que ce soit en privatisant la production éolienne, les droits d'exploitation des gaz de schiste et la cession des droits publics sur le pétrole, de même que sur les forces hydrauliques, dont Québec a cédé l'exploitation exclusive au privé jusqu'à hauteur de 50 MW.
«Ce que le peuple du Québec a fait, seul le peuple du Québec peut le défaire», conclut la déclaration dont les signataires mettent le premier ministre Charest au défi de «mettre la question aux voix» avant d'aller plus loin dans sa politique de privatisation, jugée à rebours de l'histoire et de la volonté populaire.
Parmi les signataires de cette déclaration, on retrouve en tête de liste l'ancien premier ministre Bernard Landry, deux anciens ministres l'Environnement, Paul Bégin et Thomas Mulcair, l'ancien président du Mouvement Desjardins, Claude Béland, l'ancien président de la CSN, Gérald Larose, ainsi que des représentants du Parti québécois et de Québec solidaire. Au moment de mettre sous presse hier soir, la déclaration comptait plus de 70 signataires, dont plusieurs leaders d'organismes, de groupes ou d'institutions.
C'est le mouvement Maîtres chez nous au 21e siècle (MCN-21), animé par l'écologiste Daniel Breton, qui a pris cette initiative, en préparation depuis plusieurs mois.
Plusieurs des personnalités présentes hier dans la salle des Boiseries de l'UQAM voyaient dans l'endossement public de cette déclaration par l'ancien premier ministre Bernard Landry une riposte cinglante à l'arrivée de l'ancien premier ministre Lucien Bouchard aux commandes de l'industrie gazière et pétrolière.
Le porte-parole du Parti québécois en matière d'énergie, le député Sylvain Gaudreault, a dit que sa formation adhérait pleinement aux principes énoncés dans cette déclaration, qui entend perpétuer l'héritage des premiers ministres Adélard Godbout, qui a créé Hydro-Québec en 1944 après avoir nationalisé la Montreal Light and Power, puis de Jean Lesage et de René Lévesque.
La mise au point de cette déclaration aurait donné lieu à des débats entre les premiers signataires, a révélé Gérald Larose.
Après avoir conclu à la nécessité de reprendre «immédiatement possession de ces droits d'exploration et d'exploitation de nos ressources énergétiques qui constituent notre bien commun», la déclaration précise qu'il «n'est pas question ici de nationaliser ces sources d'énergie. C'est chose faite. Elles nous appartiennent déjà et nous n'acceptons pas d'en être dépossédés».
Pour Gérald Larose, le terme «dépossédé» aurait dû être remplacé par celui de «volé», a-t-il dit.
La déclaration se conclut néanmoins sur des termes très durs: «Advenant un refus [de mettre fin à cette tendance à la privatisation], nous devrons considérer ce gouvernement coupable de spoliation de biens publics appartenant au peuple québécois et dont l'État est fiduciaire.»
Pour les signataires, cette déclaration se veut aussi un tournant en faveur du «modèle québécois», qui a fait rêver toute une génération et qui a toujours sa place, a expliqué Claude Béland.
Mais, malgré le mandat référendaire de 1962 qui n'a jamais été modifié, le gouvernement Charest a accéléré la cession des ressources naturelles «à des entreprises privées et souvent étrangères, sans en avoir le mandat, à notre insu et manifestement pour une bouchée de pain, des droits sur notre pétrole, notre gaz et même le développement de notre vent», ajoute la déclaration.
En conférence de presse, le porte-parole de MCN-21 admettait avoir «oublié» dans cette liste l'importante cession des droits aux promoteurs privés des droits sur la production hydro-électrique jusqu'à concurrence de 50 MW, la plus importante entorse au monopole d'Hydro-Québec. Le décret à cette fin a été piloté par l'ancien ministre péquiste des Ressources naturelles Jacques Brassard, en 2001.
Les signataires de la déclaration ajoutent que «toute velléité de privatisation de nos ressources énergétiques [...] aurait dû faire l'objet d'une consultation populaire où la volonté de redonner le contrôle de nos ressources énergétiques à des intérêts particuliers, comme c'était le cas avant 1962, aurait dû être clairement énoncée».
Pour le porte-parole du Parti québécois en matière d'énergie, Sylvain Gaudreault, son parti n'a aucune hésitation à entériner cette déclaration qui pourrait marquer un tournant dans la gestion énergétique au Québec.
L'exécutif national du PQ va d'ailleurs proposer au congrès de la mi-avril de confier en exclusivité l'exploitation de l'énergie éolienne à l'État, aux coopératives ou aux municipalités. Quant à l'exploitation pétrolière et gazière, en plus de devoir débattre du moment et de l'intensité de leur exploitation, le PQ privilégie un modèle d'exploitation «où l'État conserverait le contrôle».
Mais il y a ici un flottement au PQ, car la chef du parti, Pauline Marois, a évoqué récemment que l'État pourrait participer à des projets d'exploitation du pétrole dans le golfe où il détiendrait 49 % des actions, ce qui en ferait l'actionnaire minoritaire. Mais, insiste Sylvain Gaudreault, ces scénarios sont encore matière à débat au sein du Parti québécois.
Pour la porte-parole de Québec solidaire, Françoise David, les positions de son parti dans ce domaine sont les plus claires de tout le secteur politique. Et «sans ambiguïté», ajoute-t-elle. «Nous n'acceptons rien d'autre qu'un contrôle et qu'une propriété publique des ressources naturelles, ce qui n'exclut pas le recours au privé pour la réalisation de projets», dit-elle.
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Pour Gérald Larose, le terme «dépossédé» aurait dû être remplacé par celui de «volé», a-t-il dit.
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