100$ par an pour avoir un médecin de famille

Commission Castonguay


Katia Gagnon - La commission Castonguay propose d'accorder une mesure d'incitation alléchante aux cliniques médicales qui accepteraient de recevoir leurs patients 24 heures sur 24, sept jours sur sept: les médecins participants pourront facturer à leur patient une «cotisation annuelle» d'un maximum de 100$.

Puisque un Québécois sur quatre n'a pas de médecin de famille, il y a un besoin criant pour la prise en charge, a-t-on expliqué à La Presse. Pour s'attaquer à la prolifération de la médecine sans rendez-vous, la commission Castonguay tient donc à ce que des «cliniques de santé» soient rapidement déployées sur tout le territoire québécois.
«Le groupe de travail recommande que le gouvernement accélère le déploiement de cliniques de santé, de façon à assurer à chaque Québécois l'accès à un médecin de famille. Ce déploiement devrait être réalisé sur un horizon de cinq ans», lit-on dans le rapport.
Qu'est-ce qu'une clinique de santé? C'est un groupe de médecins qui s'unissent, avec le concours d'infirmières et, souvent, de praticiens d'autres disciplines, pour assurer un réel suivi de clientèle. «C'est le contraire de la clinique fast-food.»
Il faut donc, dit-on, «donner un nouveau souffle» à la formule du groupe de médecine familiale, qui a eu très peu de succès dans une ville comme Montréal. Or si on veut que tous les Québécois aient un médecin de famille d'ici cinq ans, il faudra un financement suffisant. D'où l'idée d'une mesure financière incitative pour les médecins qui acceptent de faire du suivi de clientèle.
Des dizaines de milliers de dollars par clinique
Les cliniques qui acceptent la prise en charge, en inscrivant une clientèle à qui on garantit un accès-santé 24 heures, sept jours sur sept, auraient le droit d'exiger de ces patients une «cotisation annuelle». Les démunis et les enfants n'auraient pas à verser cette cotisation, qui se situerait entre 50 et 100$.
Cependant, pour avoir le droit de facturer ces frais, la clinique devrait s'engager par contrat, auprès de l'agence de santé locale, à «atteindre des objectifs de santé» pour la clientèle inscrite.
Ces cotisations représenteraient une source de revenus supplémentaires appréciable pour les cliniques. En moyenne, les médecins des groupes de médecine familiale ont une clientèle qui varie entre 1200 et 1800 patients. La rentrée d'argent annuelle d'une clinique qui accepterait de prendre une clientèle en charge représenterait donc au minimum 60 000$ par médecin, et théoriquement jusqu'à trois fois plus.
La formule pourrait également stimuler la formation, en territoire montréalais, de «coopératives de santé», où les usagers versent une part sociale annuelle. Il existe présentement 27 coopératives de santé au Québec, situées surtout en région.
Par ailleurs, la commission recommande que les omnipraticiens n'aient plus le droit de facturer des «frais accessoires», comme pour les gouttes dans les yeux ou des pansements. Les journalistes de La Presse ont constaté de visu, lors d'une récente tournée de cliniques médicales, que de tels frais s'appliquaient à peu près partout pour une impressionnante liste de tests et d'actes médicaux.
Pas de punition
La commission Castonguay ne recommande aucune mesure punitive pour les médecins qui continueraient à avoir une pratique sans prise en charge, partageant leur temps entre les urgences et les cliniques sans rendez-vous. «On manque de médecins. Il serait impensable de fermer des cliniques dans un tel contexte», nous a-t-on dit.
Durant ses travaux, la commission Castonguay a fait un tour d'horizon international qui lui a démontré que les meilleurs systèmes de santé, et ceux qui coûtent le moins cher, sont ceux qui s'appuient sur une première ligne très forte.
Dix ans après la commission Clair, qui en arrivait aux mêmes conclusions, le comité dirigé par Claude Castonguay, assisté de Michel Venne et de Joanne Marcotte, constate que la première ligne du réseau québécois est encore pleine de trous.
Le Québec est l'endroit au Canada qui compte le plus fort pourcentage de citoyens n'ayant pas fait une visite chez le médecin au cours de l'année. C'est aussi la province où il se fait le moins de dépistage systématique pour toutes sortes de maladies.
La formation de 135 groupes de médecine familiale et d'une vingtaine de cliniques-réseau a certes amélioré la prise en charge de la population, surtout les malades chroniques. Mais seul un Québécois sur sept est inscrit dans un GMF ou une clinique-réseau.
Notre dossier sur la médecine sans rendez-vous, publié la semaine dernière, a fait résonner des échos chez plusieurs sources bien informées à Québec. «Vous avez mis le doigt sur un vrai bobo», a confié l'une d'entre elles.
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