Un ex-employé du Centre de recherches des Forces armées canadiennes à Valcartier est soupçonné d'avoir volé et détruit des données informatiques avant son départ à la retraite.
La police militaire a institué une enquête afin d'éclaircir la disparition de quelque 30 000 fichiers contenant de l'information très sensible
, peut-on lire dans un document judiciaire obtenu par Radio-Canada.
Cette demande de mandat de perquisition présentée par un enquêteur militaire indique que les objets qui doivent être saisis se trouvent dans une voûte, un lieu hautement sécuritaire
, du Centre de recherches de la division de la Recherche et développement pour la défense Canada (RDDC), près de la base miliaire.
L'enquête a débuté en novembre dernier, lorsque trois employés du RDDC ont porté plainte contre Denis Leclerc, un technicien en balistique parti à la retraite à 58 ans, en avril 2018.
Ce dernier ne fait face à aucune accusation et les allégations contenues dans les documents judiciaires n'ont pas été prouvées devant les tribunaux.
Insubordination et retraite
Dans le document, il est allégué que Denis Leclerc aurait commis un geste d'insubordination envers ses supérieurs avant de remettre sa démission, qui devait prendre effet deux mois plus tard.
Dans l'intervalle, ses supérieurs auraient demandé à un technicien informatique de faire une copie des données de l'ordinateur du technicien en balistique.
Après son départ à la retraite, l'analyse de son ordinateur aurait démontré des évidences de destruction non accidentelle
des données du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes, indique l'enquêteur.
L'analyse informatique aurait permis de constater que plusieurs données auraient été transférées sur des périphériques externes, dans les jours qui ont précédé le départ à la retraite de Denis Leclerc.
Dans une déclaration écrite, le chef de la protection et effets d'armes du RDDC avance que M. Leclerc aurait voulu forcer la direction à le réembaucher pour récupérer les données manquantes.
L'employé civil menait des recherches depuis plusieurs années pour le ministère de la Défense.
Le document judiciaire précise que certains fichiers auraient été copiés et supprimés, comme des photos de résultats balistiques, des vidéos de tests et essais balistiques, des modes opératoires et des documents d'achat de munitions
.
Sécurité nationale « en péril »
Mener une perquisition dans les installations de la Défense nationale s'avère une opération délicate.
Le 8 janvier 2019, la police militaire a eu accès à la voûte, sous la supervision de responsables du Centre de recherche vu que ce qu'elle contient est classé secret et peut mettre en péril la sécurité nationale
, précise l'enquêteur.
Un disque dur, une clé USB et deux DVD de couleur or
auraient été saisis et envoyés pour analyse.
Nous n'avons pas réussi à joindre Denis Leclerc pour obtenir sa version des faits.
Comme le dossier fait toujours l'objet d'une enquête, les Forces canadiennes ont refusé de le commenter. L'équipe des relations publiques a simplement indiqué dans un courriel qu'il n'y a aucune raison de soupçonner un impact à la sécurité nationale
, à la suite du vol de données présumé.
Travail récompensé
Le travail de Denis Leclerc et de ses collègues est souligné dans les rapports annuels de la division Recherche et développement de la défense nationale, en 2006 et 2007.
On y apprend qu'il a travaillé à la mise au point des technologies nécessaires à la réalisation d'un missile antichar évoluant dans un régime hypersonique
.
Son équipe scientifique a aussi reçu un prix pour avoir mené à bon terme des essais scientifiques cruciaux
qui ont aidé les Forces canadiennes à protéger les passagers de véhicules contre les effets de souffle et les dommages dus à la fragmentation
.
Ce travail a été doublement récompensé avec un autre prix pour rendement exceptionnel
.
Le rapport annuel de 2007 souligne que ce programme sans précédent d'essais et d'expérimentation en protection de véhicules
a aidé non seulement les troupes des Forces canadiennes déployées en Afghanistan, mais aussi la communauté scientifique de la défense nationale et internationale
.