Élections dans Bonaventure

Une défaite morale dans le Grand Livre des indépendantistes progressistes

Actualité québécoise - vers une « insurrection électorale »?


Le 5 décembre dernier, lors du dévoilement des résultats de l'élection partielle dans Bonaventure, le Parti libéral, le Parti québécois et Québec solidaire ont crié «victoire»! Victoire réelle pour un, victoire morale pour les deux autres. Mais les véritables gagnants étaient deux partis «officiellement» absents de cette confrontation électorale: la Coalition avenir Québec (CAQ) de Sirois-Legault et la coalition Québec solidaire-NPD!
Que le candidat libéral ait réussi à remporter l'élection avec près de 50 % des suffrages exprimés, malgré un taux d'insatisfaction stratosphérique à l'endroit du gouvernement Charest, en dit plus sur la faiblesse des partis d'opposition que sur un quelconque engouement des citoyens de la circonscription de Bonaventure pour le Parti libéral.
Mme Marois s'empêtre
Mme Pauline Marois a eu beau déclarer, le soir de l'élection, que sa présence pendant neuf jours dans la circonscription s'expliquait par son «amour des Gaspésiennes et des Gaspésiens», tout le monde avait compris qu'elle devait prouver que le Parti québécois pouvait, sous son leadership, remporter la prochaine élection générale.
Le moins qu'on puisse dire, c'est que malgré un gain de 8 points de pourcentage par rapport au dernier scrutin, la démonstration n'est pas probante. Le chroniqueur du Devoir Michel David a pertinemment rappelé que, lors de sa dernière victoire générale, en 1998, le Parti québécois, bien qu'il ait perdu la circonscription aux mains de Nathalie Normandeau, avait tout de même récolté 46,5 % des suffrages. Avec un maigre 37 %, en effet, on est loin du compte.
Pour expliquer la défaite de son parti, Mme Marois a donné, entre autres raisons, l'absence de la CAQ! Selon elle, le parti de Sirois-Legault aurait divisé le vote fédéraliste et favorisé l'élection du candidat péquiste. Mis à part l'incongruité d'expliquer une défaite par une absence, l'explication n'est pas crédible. Mme Marois, dont les sondages constituent pourtant le sextant politique, sait très bien que les deux tiers des appuis potentiels à la CAQ proviennent de l'électorat péquiste.
Un autre argument invoqué comme facteur explicatif du piètre résultat du PQ est la crise que traverse le parti depuis la démission de cinq députés. «Nous sommes perçus comme un parti de "chicanes"», a déploré Mme Marois en agitant sa baguette de préfet de discipline.
Mais c'est elle-même qui a déclenché la «chicane» qui a conduit aux démissions et à la dégringolade du parti dans les sondages, avec le projet de loi 204 sur l'amphithéâtre de Québec. Avant la «chicane», le PQ dominait dans les sondages avec 34 %; il fait à peine la moitié de ce score aujourd'hui.
Le tango se danse à deux, non à trois
Mme Marois fait une cour assidue à Pierre Karl Péladeau. Après l'affaire de l'amphithéâtre, ce fut la valse-hésitation sur le projet de loi ayant pour but de moderniser la loi antibriseurs de grève, une mise à jour nécessaire comme l'a révélé le conflit au Journal de Montréal. Bien que déposé à l'origine par le député péquiste Guy Leclair, Mme Marois y a subitement vu, à la vieille du vote, un «déséquilibre» en défaveur de la partie patronale.
Le député Leclair ayant été, la veille du vote, écarté du caucus, sous de fausses allégations d'avoir été une «taupe», c'est la députée indépendante Louise Beaudoin qui a appelé le vote en commission parlementaire. Et ce n'est qu'après avoir été sermonné publiquement par les dirigeants de la FTQ, de la CSN et de la CSQ, que le Parti québécois a rappliqué en catastrophe pour soutenir le projet de loi.
Cette tiédeur — pour employer un euphémisme — de Mme Marois à l'égard des droits des travailleurs ne nous étonne pas. Sa feuille de route à ce chapitre, depuis qu'elle préside aux destinées du Parti québécois, est éloquente. Elle a pris une telle distance à l'égard des organisations syndicales qu'elle a manoeuvré de façon à ce qu'il ne soit fait aucune mention, dans le programme adopté au mois de juin dernier, du monde du travail et des organisations syndicales. Même les mots «travailleurs» et «travailleuses» y sont absents! Une première dans l'histoire du Parti québécois!
Lors du conflit au Journal de Montréal, Pierre Karl Péladeau aimait répéter qu'il «faut être deux pour danser le tango», insinuant une absence de volonté de négocier de la part du syndicat. À deux reprises, Mme Marois s'est présentée sur la piste de danse, mais M. Péladeau l'a éconduite. De toute évidence, PKP a trouvé son partenaire dans François Legault. Dans ses médias, il promeut sa personne et son parti à coups de sondages favorables et de pages frontispices bien léchées.
La coalition QS-NPD
Au lendemain de la dernière élection fédérale, et de l'appui ouvert d'Amir Khadir au NPD, nous soulignions le fait que, dans 59 circonscriptions au Québec, le NPD disposera d'une infrastructure organisationnelle et politique qui pourrait être mise au service de Québec solidaire.
C'est exactement ce qui s'est produit dans Bonaventure. La candidate de Québec solidaire venait directement du bureau du député NPD de la région. Sur le site Internet de Québec solidaire, on présente Patricia Chartier comme une «passionnée que le nouveau député fédéral est allé chercher pour s'occuper des relations avec les citoyens à son bureau de circonscription, en raison de sa connaissance des dossiers régionaux».
Non seulement on évite de mentionner le nom du parti du député, mais on présente Patricia Chartier comme une personne, sans affiliation politique! Le morceau est un peu gros à avaler!
Mais, soyons bons joueurs, concédons la victoire morale à Québec solidaire... et au NPD! Et inscrivons l'élection de Bonaventure dans la colonne «défaite morale» du Grand Livre des indépendantistes progressistes!
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Marc Laviolette et Pierre Dubuc, respectivement président et secrétaire du SPQ Libre


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