Le NPD vient de connaître une percée historique au Québec. Au-delà des explications simplistes, du genre « Jack-Layton-a-une-personnalité-sympathique », il faut comprendre la signification de la vague qui l’a sorti de la marginalité.
Le NPD est un parti de gauche. Certains verront dans le mouvement en sa faveur un appui à ses idées. Ce n’est aucunement le cas. Cette élection ne s’est pas gagnée à gauche. Elle s’est gagnée au peuple. Le vote NPD n’était pas un vote gauchiste, mais un vote populiste.
Un fait fondamental : il y a aujourd’hui une puissante exaspération populaire contre la classe politique. Elle n’est pas exclusive au Canada. Partout, le peuple se sent abandonné. Lorsqu’on lui en donne l’occasion, il lui arrive de se révolter. Cette fois, l’occasion s’appelait NPD.
Les électeurs ont voulu envoyer paître les politiciens professionnels. Surtout, ils ont voulu réhabiliter la figure du citoyen ordinaire. D’ailleurs, dans sa rhétorique de campagne, le NPD faisait appel à monsieur et madame Tout-le-monde, jamais aux nombreux groupes radicaux qui composent pourtant sa base militante.
Les grands partis ont oublié depuis longtemps qu’avant de se diviser en groupes de pression, les individus forment une société. Lorsqu’on l’oublie, le peuple trouve le moyen de se rappeler à la mémoire de ses élites. Il aime se déprendre des scénarios qu’on lui avait écrits à l’avance.
La question du charisme de Jack Layton émerge ici. On accepte d’un homme politique qu’il prenne la distance exigée par ses fonctions. On n’accepte pas qu’il soit suffisant et s’enferme dans ses privilèges. De ce point de vue, le style « bon voisin » du chef néo-démocrate avait tout pour plaire, surtout aux Québécois.
Plus largement, c’est un cycle politique qui se termine.
Les Québécois se sont servis du NPD pour se déprendre d’une situation politique bloquée, incarnée à la fois par le Bloc et le PLC. La question nationale telle qu’on la connaissait vient d’imploser. Au Canada anglais, ça jubile.
Mais ce dernier devrait éviter l’excitation abusive. Les Québécois ne viennent pas de faire une déclaration d’amour au Canada, de se convertir au fédéralisme. La vague NPD ne représente que le premier moment d’une nouvelle séquence historique. Un nouveau champ de possibles vient de s’ouvrir.
N’empêche : en transformant l’isoloir en défouloir, les Québécois ont installé à l’opposition officielle une bande d’activistes radicaux, de gauchistes attardés, de contestataires excités. Ils ont eu l’ivresse de la transgression. Maintenant, ils auront la gueule de bois du réel.
Un vote populiste
Élection fédérale du 2 mai 2011 - au Québec : une « insurrection électorale »
Mathieu Bock-Côté1347 articles
candidat au doctorat en sociologie, UQAM [http://www.bock-cote.net->http://www.bock-cote.net]
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