En juin dernier, dans cette chronique, j’affirmais que Pauline Marois, incapable de susciter l’enthousiasme dans la population, devait quitter la direction du Parti québécois (PQ) et laisser sa place à Gilles Duceppe, le leader souverainiste le plus respecté du Québec.
La semaine suivante, je regrettais déjà un peu ce texte. Non pas parce que les faits avaient changé et me donnaient tort, mais parce qu’un célèbre commentateur québécois avait proposé une bien meilleure solution. Dans son blogue du 23 juin 2011, en effet, Jean-François Lisée suggérait l’idée d’un tandem Marois-Duceppe afin de remettre le PQ sur les rails. Toux ceux à qui j’ai alors soumis cette idée ont bien réagi en me disant « eh oui, c’est vrai, pourquoi ne pas y avoir pensé avant ».
Le PQ, c’est une évidence, souffre de la bisbille qui règne dans ses rangs. Composé de fervents militants, plus instruits que la moyenne et portés sur la réflexion et le débat, le PQ est un parti d’idées. Il est donc normal que ses rangs soient plus agités que ceux du Parti libéral ou de l’ADQ. Il n’en demeure pas moins que le PQ n’arrivera à rien si ses membres et ses têtes d’affiche refusent tout compromis et ne se cessent de se déchirer sur la place publique. On peut, par exemple, trouver qu’un chef (Duceppe) ferait mieux l’affaire qu’un autre (Marois), mais il faut savoir que chasser le second pour le remplacer par le premier créera du mécontentement chez les partisans du chef exclu.
La proposition de Lisée a le mérite de tabler sur l’addition des forces plutôt que sur leur division. « Si Jacques Parizeau a eu l’intelligence et la grandeur de vue de faire tandem avec Lucien Bouchard pendant la campagne référendaire [de 1995], écrit Lisée, pourquoi Pauline Marois n’aurait-elle pas le réflexe de trouver, avec Gilles Duceppe, la recette d’un tandem préélectoral? Ils démontreraient ainsi qu’une coalition, cela se fait en additionnant, pas en divisant. Le PQ ferait l’économie d’un traumatisme, d’un autre chef jetable, d’une course au leadership –une série d’événements certes divertissants, mais qui ne feraient que l’enfoncer dans l’automutilation. »
Dans de récentes prises de parole publiques, Duceppe a réitéré son appui à Marois, déploré les déchirements internes au PQ et laissé entendre que sa carrière n’était pas finie. Un sondage publié dans La Presse du 20 septembre l’identifiait comme le leader souverainiste le plus populaire. Pour sortir le PQ de son marasme actuel, Marois devrait donc inviter Duceppe à devenir le numéro 2 du parti et lui promettre, si le PQ est élu, le poste de ministre de la gouvernance souverainiste. Cette dernière stratégie offensive, bien pensée, risque de créer des frictions entre Québec et Ottawa, et nul ne serait plus compétent que Duceppe pour gérer ces dossiers.
Le Québec a d’importants défis à relever. Empêtré dans des histoires de corruption et de collusion qu’il refuse d’affronter avec courage, l’actuel gouvernement libéral est totalement discrédité. Il s’accroche pitoyablement à un Plan Nord qui ressemble plus à une arnaque qu’à un projet prometteur. De plus, alors que de récentes études font état d’un recul du français au Québec, il pratique la politique de l’autruche.
Va-t-on le remplacer par François Legault et ses amis affairistes qui proposent de gérer le Québec comme une usine? Quel parti, d’ailleurs, tiendra tête au gouvernement fédéral conservateur qui tire le Canada vers la droite dure et méprise les valeurs et la langue du Québec?
Le Québec, à l’heure actuelle, a besoin d’un PQ en forme et inspiré par son ardeur de jeunesse. Il a besoin d’un parti souverainiste et social-démocrate expérimenté et rigoureux. Les Aussant, Curzi et Drainville se voient peut-être en chef, mais ils ne font pas le poids devant un tandem Marois-Duceppe. Il reste à savoir si ces deux leaders auront le courage et la sagesse de faire vraiment équipe.
louisco@sympatico.ca
Le temps d’un tandem
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