Un navire des Pays-Bas a navigué illégalement sur le Saint-Laurent

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Le statut militaire ne dispense pas du respect de la loi et des règlements

(Québec) Le navire de guerre Karel Doorman, des Pays-Bas, a fait escale à Montréal à la fin mai pour remercier le Canada d'avoir contribué à libérer son pays, il y a 70 ans. Sur le chemin du retour, toutefois, l'équipage n'a pas laissé la barre du bateau à un pilote canadien, expert de la conduite dans le fleuve Saint-Laurent, une situation illégale, qui aurait aussi pu être dangereuse.
Le Soleil a appris que lorsque le HNLMS Karel Doorman a fait son entrée dans le fleuve, le 26 mai, la communication avec le pilote local qui est monté à bord était passable, sans plus. C'est lors du départ du navire, le 30 mai, que les choses ce sont corsées.
«Il y a eu un problème de communication entre le pilote et le capitaine du navire», confirme Fulvio Fracassi, premier dirigeant de l'Administration de pilotage des Laurentides, la société d'État fédérale qui s'assure de la sécurité de la navigation sur le Saint-Laurent. «On a été mis au courant une fois que le bateau était parti et on a entrepris des démarches pour régler la problématique, ce qui a été fait rapidement», ajoute M. Fracassi. Selon lui, la Garde côtière et Transports Canada ont travaillé de concert sur ce dossier et quand le bateau, parti de Montréal, était vis-à-vis Sorel-Tracy, tout était rentré dans l'ordre.
«Il semble y avoir eu un problème de barrière linguistique», ajoute M. Fracassi. Selon nos sources, le capitaine du bateau parlait néerlandais avec son officier de corps et son timonier, ignorant le pilote québécois à bord, qui n'y comprenait absolument rien et ne pouvait donc pas intervenir.
Appelé à commenter le dossier, Pierre Vallée, président de la Corporation des pilotes du Saint-Laurent central (CPSLC), dit avoir été informé de l'incident, mais il soutient que le problème ne s'est pas réglé à Sorel-Tracy. Il aurait perduré au moins jusqu'à Québec.
«Il y a eu un changement de pilote à Trois-Rivières et le nouveau a demandé s'il aurait la conduite du navire. Le capitaine lui a dit que non, qu'il gardait la conduite, ce qui est complètement dérogatoire à la loi», soutient M. Vallée.
Aucun accident n'est survenu durant le voyage sur le fleuve, mais l'équipage des Pays-Bas aurait fait circuler le mastodonte de 30 mètres de large en plein milieu de la voie maritime, alors que le chenal est normalement divisé en deux : un côté pour monter le fleuve et l'autre pour le descendre.
Pour éviter tout risque d'incident, les deux bateaux qui croisaient la route du Karel Doorman ce jour-là ont décidé de s'ancrer à l'extérieur du chenal pour le laisser passer. Une information que confirment autant M. Fracassi que M. Vallée.
Incident rare
Qu'un navire de guerre étranger ne respecte pas les lois canadiennes de navigation sur le Saint-Laurent est rarissime. «C'est un incident très isolé. On reçoit de 20 à 30 navires de guerre de différents pays chaque année et c'est la première fois qu'une problématique comme ça se présente», soutient M. Fracassi.
Pour éviter un autre incident du genre, son administration compte redoubler ses efforts pour informer adéquatement les équipages de navires étrangers des règles qui prévalent sur le Saint-Laurent.
«Ce que je trouve complètement déraisonnable dans ce cas-là, c'est qu'un navire de guerre étranger ne respecte pas la loi en vigueur. Ça fait 15 ans que je suis pilote et c'est la première fois que je vois ça», soutient pour sa part M. Vallée.
Difficile de comprendre les raisons pour lesquelles le capitaine a voulu garder la mainmise sur son navire. Le HNLMS Karel Doorman est un navire de soutien logistique tout neuf, pouvant accueillir jusqu'à 300 personnes, qui a commencé à naviguer seulement l'an dernier. Il est le fleuron technologique de la Marine royale néerlandaise.
Son escale au port de Montréal «a été un immense succès», selon Michael Polak, le consul des Pays-Bas à Montréal. Des visites ont été organisées et un concert de musique militaire a été donné à bord. Pour ce qui est des problèmes de communication lors du trajet de retour, M. Polak soutient ne pas avoir été mis au courant de ce qui s'est passé.


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