J’expliquais récemment que la cause principale de la pénurie de main-d’œuvre était la chute de la natalité, qui fait que les arrivants sur le marché ne sont pas assez nombreux pour remplacer les sortants, et que l’immigration n’était pas une solution magique.
Dans la foulée, un collègue universitaire m’a fait une série de remarques très intéressantes.
Cette pénurie, dit-il, masque un autre problème : celui des emplois inutiles, ceux qu’Adam Smith qualifiait d’emplois «parasitaires».
Smith désignait les emplois qui ne contribuent pas à la richesse de la nation (ou à sa sécurité ou à son bien-être).
Évangile
Mon collègue me donne un exemple concret.
Dans la fonction publique fédérale, dans toutes les universités, dans toutes les grandes entreprises, on embauche maintenant à la pelle des spécialistes en EDI, c’est-à-dire en «équité, diversité et inclusion».
Ces institutions diront souvent manquer d’argent pour embaucher des spécialistes en ceci ou cela, mais elles ne manquent jamais d’argent pour embaucher des «spécialistes» en EDI.
Quand on regarde aller ces gens, on comprend pourquoi le mot spécialiste devrait être entre guillemets dans leur cas.
Mon collègue a un copain qui est fonctionnaire fédéral dans une unité de 100 personnes.
Cinq personnes sont parties à la retraite.
Ces cinq personnes furent remplacées par cinq conseillers EDI. Il n’y en avait aucun auparavant.
Cinq pour 100 employés.
Que font-ils concrètement? a demandé mon collègue à son ami.
Réponse : ils diffusent le nouvel évangile.
Plusieurs fois par semaine, les employés reçoivent des exercices de «mise en situation» par courriel.
Voici un exemple.
Une personne en fauteuil roulant échappe des documents. Vous ne la connaissez pas. Vous êtes seul avec elle.
Choisissez la bonne réponse parmi :
1) Vous ramassez les documents pour elle
2) Vous passez tout droit
3) Vous lui faites remarquer qu’elle a échappé des documents
4) Vous lui demandez si elle aimerait que vous l’aidiez
Le monsieur a choisi la réponse 1.
Pouf ! L’écran a affiché : «mauvaise réponse». La «bonne» réponse était 4. L’explication suit.
Peu de temps après, il reçoit un courriel de la conseillère EDI. Il est convoqué pour qu’on discute de sa réponse.
Le fonctionnaire, qui approche de la cinquantaine, se fait expliquer par une «floune» de 25 ans, dont c’est le premier vrai emploi, sans doute diplômée en «diversité» ou en «relations interculturelles», que sa réponse aurait pu engendrer un «traumatisme» et un «sentiment d’exclusion».
Inclusion
Il a également été avisé que le ton de ses courriels n’était pas assez «inclusif».
On lui enjoint de se référer au nouveau guide sur les mots à utiliser dorénavant et sur ceux qu’il ne faut plus jamais utiliser.
C’est un petit exemple d’un véritable déferlement.
Bref, on «rééduque» le personnel, on traque les déviants, on les traîne au confessionnal.
Déclin de la religion? Pas du tout. Les nouveaux curés se multiplient. Et gare à vous si...
Pendant ce temps, on manque de monde pour fabriquer des passeports...