Le gouvernement Harper a célébré cette semaine le premier anniversaire de son mandat majoritaire. Les bilans se sont multipliés, allant du plus positif au plus sévère. Sur le site de nouvelles iPolitics, Lawrence Martin note que les commentateurs n’arrivent pas à s’entendre. Harper est-il un conservateur modéré ou un homme en train de transformer le Canada ? Prises une à une, la plupart de ses décisions ne laissent entrevoir aucun changement dramatique, convient Martin. Il se range cependant derrière ceux qui disent que, « prises ensemble, les initiatives de Harper ont, au fil du temps, une profondeur et un souffle qui redessinent les contours du pays ».
Examinant la chose sous l’angle des politiques et de l’éthique, Martin écrit : « En matière de politiques, ce premier ministre - un cauchemar pour les progressistes - est un joueur astucieux, doté d’une détermination en béton et qui sait comment marquer des points. En matière d’éthique et de moralité, et cela est bien documenté, il déshonore le processus démocratique. Ses méthodes matraques pourraient bien finir par le mener à sa perte et à celle de son parti. Bien qu’il manque totalement de scrupule en matière de processus, il sait quand ne pas pousser trop loin en matière de politiques. Il modère les compressions, répudie ceux qui veulent rouvrir le débat sur l’avortement, modifie son approche à l’égard de la Chine, se range derrière ceux qui s’opposent à la prise de contrôle étrangère du secteur de la potasse. Mais le bilan résonne. Le but d’un chef conservateur est de rendre ce pays plus conservateur. À cette aune, qui peut nier le succès de Harper ? » Justice, défense, environnement, politique étrangère, fiscalité, immigration, patriotisme, relations fédérales-provinciales, Martin fait le décompte pour finir en rappelant que ce n’est pas fini.
Andrew Coyne, de Postmedia News, note lui aussi les jugements disparates, mais il croit que cela arrange le gouvernement. Ce dernier ne veut pas qu’on pense qu’il suit un grand plan. À cet égard, il fait preuve de continuité, même si la direction s’est affermie avec l’obtention d’une majorité, dit Coyne. « Tout est furtif et indirect, surprise et ambiguïté, comme avant. Les grands changements, quand il y en a, sont faits soudainement, nonchalamment, sans avertissement ni justification, comme s’ils étaient sans importance : enterrés dans un projet de loi omnibus, déballés en comité, dévoilés en fin de période des questions, largués sur la table d’une conférence des premiers ministres provinciaux. Le plus près d’un énoncé de vision est venu lorsque le premier ministre a jonglé de façon quasi indéchiffrable sur la nécessité de réformer les pensions, et ce, depuis les Alpes suisses. »
Quel Parlement ?
Même si des changements importants ont lieu, ils échappent souvent à l’attention du public. « Ce gouvernement est peut-être majoritaire, mais il agit encore comme s’il était minoritaire ; sauf que ce n’est plus l’opposition qu’il tente de déjouer, mais le public », poursuit Coyne, cinglant. Il rappelle que, par le passé, les gouvernements présentaient des livres verts ou blancs pour lancer les discussions, mais ce gouvernement, dit-il, « n’a que faire de gagner les coeurs et les esprits. Sa stratégie est de mener une série de raids rapides, de neutraliser l’opposition et de couper les vivres aux groupes de la société civile plutôt que de tenter de rallier le public derrière lui ». Coyne prévient que le public risque toutefois de devenir moins indulgent envers ce gouvernement quand il se rendra compte qu’on se moque de lui. Pour sa part, il est tout simplement furieux depuis le dépôt du projet de loi budgétaire, qu’il a dénoncé dans un texte féroce. Il a d’ailleurs été le premier chroniqueur canadien-anglais à s’indigner de son caractère omnibus, à y voir un abus du processus parlementaire et une confirmation de la perte de pouvoir des élus.
John Ivison, du National Post, note que Harper décriait, à une autre époque, le recours à des projets de loi omnibus, y voyant un geste contraire aux conventions et aux traditions parlementaires. Il n’en a que faire aujourd’hui, au point même de limiter le débat sur le projet de loi budgétaire et, du coup, la capacité des députés de demander des comptes et de l’étudier correctement. « On se demande : à quoi sert le Parlement ? Tant qu’à y être, pourquoi pas un seul projet de loi, une fois par année, que les députés pourraient examiner en vitesse avant de retourner dans leurs circonscriptions pour assister aux cérémonies d’ouverture de supermarchés et aux barbecues du club Rotary ? » Ivison veut bien croire que plusieurs des changements insérés dans ce projet de loi sont les bienvenus, mais rien ne justifie le procédé. Ils devraient être présentés séparément pour permettre aux députés et aux comités appropriés de les étudier. « Comme M. Harper l’a déjà dit : “Dans l’intérêt de la démocratie, je demande comment les députés peuvent représenter leurs commettants dans ces nombreux dossiers quand ils sont forcés de voter en bloc pour une loi semblable ? ” Dommage qu’il ait changé de chanson depuis qu’il a été élu à la plus haute fonction au pays. »
Revue de presse
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé