Le premier ministre Tony Blair est dans de sales draps. Pour financer en partie la campagne électorale de l'an dernier, lui et le trésorier de sa formation avaient conçu un système propre à satisfaire les vanités aristocratiques de personnes aux portefeuilles débordant de livres sterling. Emprunté à Lloyd George, locataire du 10 Downing Street de 1916 à 1922, ce mécanisme était tout simple: toute personne accordant un prêt au Parti travailliste pourrait bénéficier du soutien de Blair. Plus précisément, celui-ci proposerait la candidature de tel ou tel au titre de sir.
Avant toute chose, il faut souligner que les balises fixées au financement des partis britanniques sont ainsi faites que la personne qui prête de l'argent est assurée d'une chose : son identité ne sera pas révélée. Ce qui n'est pas le cas des individus qui font des dons. Précisons également que les prêts peuvent être convertis en dons lorsque les personnes concernées en font la demande.
Cela étant, Blair avait poussé le zèle jusqu'à suggérer les noms de 12 hommes d'affaires depuis sa victoire électorale du printemps dernier. Quatre d'entre eux avaient été écartés. C'est d'ailleurs ce fait qui, plus que tout autre, a mis la puce à l'oreille de certains acteurs de la scène politique britannique, qui ont déposé une plainte. L'enquête des journalistes aidant, on a découvert que le Parti travailliste avait récolté des millions grâce à ce qui était une copie carbone des magouilles conçues en son temps par Lloyd George.
Pour Blair, cette affaire arrive au pire moment qui soit. Bien que sa formation soit majoritaire au Parlement, il a récemment eu besoin des voix des conservateurs pour faire adopter sa réforme de l'éducation. Pas moins de 52 députés travaillistes ayant choisi de ne pas respecter la discipline de parti avaient décidé de voter contre le projet de leur patron. Cet épisode en dit long sur l'humeur des membres du Labour, qui souhaitent en fait le départ de Blair dès cette année.
Histoire de ne pas être en reste, la presse est quasi unanime à demander à Blair de réfléchir à son départ. L'influent hebdomadaire The Economist est allé jusqu'à titrer sont dernier numéro ainsi : «The Final Days of Tony Blair». Comme si l'affaire était entendue. Il faut dire qu'entre la guerre en Irak et ce scandale, sa cote de popularité est au plus bas. Elle suscite en tout cas l'impatience d'une majorité d'élus travaillistes.
Ceux-ci voudraient le remplacer par le ministre des Finances, Gordon Brown. On se rappellera qu'au début des années 90, Blair et Brown avaient passé le troc suivant : si le second soutenait le premier à la course à la chefferie du parti travailliste, il lui laisserait la place au cours d'un deuxième mandat. De cette histoire, Brown a été le dindon de la farce. En effet, Blair, qu'on surnomme «Bliar» à cause de sa propension au mensonge, n'a jamais tenu parole. Il y a quelques semaines encore, il laissait clairement entendre que son intention était de terminer ce troisième mandat. La brutalité des faits, ses faits, semble l'avoir rattrapé.
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