Bon jugement que celui de la Cour suprême sur l'«affaire Lola». Mais quand même... tout ça pour ça!
Pour en arriver au maintien du statu quo, était-il vraiment nécessaire que les tribunaux, de la première à la dernière instance, perdent cinq ans à étudier les revendications d'une dame dont les inépuisables moyens financiers (ou plus précisément ceux de son nouveau compagnon, un autre homme richissime) lui ont permis de s'offrir les services d'une flopée d'avocats cher payés et de monopoliser le temps précieux des cours, alors que tant de justiciables voient leur cause remise ad vitam aeternam parce que les tribunaux sont débordés?
D'autant plus que l'essentiel de la question - soit la constitutionnalité de la distinction entre couples mariés et conjoints de fait - avait déjà été réglé par un jugement de la Cour suprême en 2002!
Enfin, voilà le dossier fermé. La Cour suprême, infirmant un précédent jugement de la Cour d'appel du Québec, a ramené tout le monde à la raison.
Elle redonne son sens au mariage en refusant que les conjoints de fait bénéficient des mêmes avantages en cas de séparation.
Elle reconnaît le droit des couples au libre choix de leur régime matrimonial.
Elle écarte l'idée d'imposer au Québec, maître de son Code civil, la protection personnelle que d'autres provinces accordent aux conjoints de fait.
Et surtout, elle rejette la philosophie misérabiliste et paternaliste qui consistait à surprotéger les femmes, vues comme des mineures incapables d'assumer leurs responsabilités et de faire la différence entre mariage et union de fait...
Il est vrai que parmi les conjoints de fait qu'une séparation appauvrit, on trouve surtout des femmes que la vie a flouées: à mille lieues de Lola, pour qui le mariage avec un multimillionnaire avait été un passeport pour la richesse, elles ont naïvement cru qu'en vivant en couple et en ayant des enfants, elles auraient droit à une pension alimentaire pour elles-mêmes advenant une séparation; ou alors, elles ont été incapables de convaincre leur partenaire de les épouser ou de signer un contrat d'union civile assurant un partage équitable des biens.
Cela est une triste réalité, mais on ne change pas les lois parce qu'une partie des citoyens ne s'est pas donné la peine de s'en informer. Le principe selon lequel «nul n'est censé ignorer la loi» vaut à plus forte raison quand il s'agit de se protéger contre les risques d'une séparation.
Si une femme renonce à l'autonomie financière qui est le fondement de sa liberté, ou si elle s'obstine à vivre avec un égoïste qui refuse de s'engager pour protéger son magot, eh bien c'est déplorable, mais c'est son choix.
On ne change pas les lois pour accommoder les carencés affectifs ou les gens qui vivent dans la dépendance chronique, pas plus qu'on adapte les écoles secondaires aux capacités des analphabètes.
D'ailleurs, les choses changent et il y a bien des chances que dans les futures unions, libres ou non, le partenaire le plus riche soit une femme, les femmes formant déjà la majorité des diplômés universitaires et les bons emplois de cols bleus syndiqués étant en voie de disparition...
Au Québec, 60% des enfants naissent d'unions de fait. C'est un phénomène exceptionnel et plutôt malsain, car c'est fonder une famille sur la présomption qu'il s'agira d'une union temporaire.
Libre aux couples sans enfant d'inventer leur mode de vie, mais quand on en a, il est tout de même plus intelligent de conclure, à défaut d'un mariage, une union civile ou un contrat notarié. Cela relève du sens des responsabilités le plus élémentaire.
Conjoints de fait
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