À quinze mois des prochaines élections, les partis rivalisent d’astuces pour séduire l’électorat anglophone. Déroutant, ce nouveau phénomène est le reflet d’une dynamique politique québécoise carrément déboussolée.
Le vote francophone a beau se fractionner dans l’indifférence générale, libéraux, péquistes, caquistes et solidaires font la file pour courtiser les 10,7 % de Québécois dont l’anglais est la langue d’usage. Eh oui, même les libéraux.
Malgré le vote massif des Anglos pour le PLQ, le premier ministre Philippe Couillard songe à créer un « secrétariat » aux affaires anglophones. Tout aussi intéressés, les trois partis d’opposition chantent leur propre romance aux Anglo-Québécois.
Le gouvernement Couillard, leur susurrent-ils, est usé. Il vous tient pour acquis. Leur message : brisez vos chaînes libérales en votant PQ, CAQ ou Québec solidaire, c’est selon.
Muni d’une nouvelle page Facebook en anglais, le chef péquiste Jean-François Lisée tente de rassurer les anglophones en leur martelant qu’il n’y aura pas de référendum. En montée dans les sondages, la CAQ met le paquet.
Son site web est offert en version anglaise. Tout juste avant la fête du Canada, la CAQ diffusait aussi une publicité web en anglais. Pendant que François Legault invite les Anglo-Québécois à voter CAQ – un parti voué à l’« épanouissement du Québec à l’intérieur du Canada » –, la fleur de lys et la feuille d’érable s’y font de l’œil côte à côte.
Québec solidaire et son nouveau député Gabriel Nadeau-Dubois ne sont pas en reste. Misant sur les anglophones « progressistes » fatigués de l’austérité libérale, QS se dit persuadé d’en faire une bonne récolte.
Or, c’est bien mal connaître un électorat anglophone qui, dans les faits, est massivement anglo-montréalais et majoritairement réfractaire à toute forme, même discrète, de nationalisme québécois. C’est pourquoi cet espoir qu’ont les caquistes, péquistes et solidaires de ravir plusieurs électeurs anglos aux libéraux « usés » est voué à l’échec.
La réalité est que le vote dit « captif » des Anglos est volontaire. Penser le contraire est faire insulte à leur intelligence. Les rares fois où une minorité d’anglophones a refusé de voter PLQ visaient en fait à punir les libéraux pour avoir été « trop » nationalistes. En 1976, une minorité d’Anglos punissait le PLQ pour sa loi 22 faisant du français la langue officielle. Idem en 1989 quand Robert Bourassa invoqua la clause dérogatoire pour protéger l’affichage en français. Nul danger pour Philippe Couillard de subir le même sort.
Un épouvantail
À l’opposé, quoi qu’il fasse et même affaibli, le PQ demeure un épouvantail pour les Anglos. Côté CAQ, son chef est un ex-péquiste et son nationalisme identitaire, même adouci, n’a rien non plus pour les attirer. Seul QS pourrait séduire quelques Anglos progressistes. Son étiquette « souverainiste » risque toutefois d’en faire une mini-percée.
Bref, cette fascination péquisto-caquisto-solidaire pour l’électorat anglophone est une chasse illusoire pour un vote qui, de toute manière, leur échappera tant et aussi longtemps qu’ils défendront la moindre parcelle de nationalisme.
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