Si la tendance se maintient...

Sondage CROP-La Presse - Mars 2008


"Pourquoi on irait en élections (en 2008)? Qu'on me donne une raison. Moi, je n'en vois pas. Et ce qui en ressort, c'est que les Québécois ne veulent pas d'élections. S'il y a des élections générales en 2008, ce sera au niveau fédéral."
Vous vous souvenez qui a dit ça, en décembre dernier?
Le même chef politique qui, paradoxalement, risque le plus de vouloir déclencher des élections si la tendance se maintient: Jean Charest.
Il faut dire qu'à l'époque (c'était fin décembre, à l'occasion du bilan de session), la cote de satisfaction du gouvernement Charest était sous la barre des 50% et que les libéraux amorçaient une timide remontée qui se confirme depuis de mois en mois.
Quand les collègues de la tribune parlementaire de l'Assemblée nationale lui avaient demandé en décembre s'il croyait que les Québécois auraient à retourner aux urnes en 2008, le premier ministre avait rejeté ce scénario, affirmant que ce serait irresponsable de la part de l'opposition de le renverser si tôt dans son mandat. Rappelez-vous, Jean Charest ajoutait même qu'on ne pouvait envisager des élections à cause des célébrations du 400e anniversaire de Québec (toutes les raisons sont bonnes quand on ne veut pas d'élections).
Les choses ont changé depuis, comme le confirme notre nouveau sondage CROP-La Presse: le taux de satisfaction fait un bond impressionnant de 11 points en un mois, atteignant 61%, les libéraux confirment leur première place dans les intentions de vote et poursuivent leur progression auprès des électeurs francophones. Ils prennent même résolument la tête dans la région de Québec, leur Waterloo des dernières élections.
Déjà que l'idée d'un déclenchement hâtif d'élections l'automne prochain circulait en sourdine dans les rangs libéraux, les chiffres de ce matin vont aiguiser l'appétit des partisans de ce scénario.
En politique, rien n'est plus précieux que de contrôler sa destinée, parlez-en à Stephen Harper, qui s'est privé du pouvoir de déclencher des élections en faisant adopter une loi sur les scrutins à date fixe et qui en est réduit ces temps-ci à s'auto-enfarger en multipliant les votes de confiance. Pas de chance pour le chef conservateur, son adversaire libéral, Stéphane Dion, refuse de jouer le jeu.
Jean Charest n'a pas ce problème. Bien sûr, il devrait piétiner ses propres déclarations de décembre dernier s'il décidait de provoquer lui-même des élections en 2008, mais les avantages d'une possible victoire électorale surpasseraient de loin les inconvénients d'une petite volte-face.
Surtout que les prévisions économiques laissent présager des jours plus difficiles en 2009. Les libéraux préféreraient évidemment déclencher eux-mêmes à l'automne sur un programme budgétaire optimiste qu'être battus quelques mois plus tard par une conjoncture économique défavorable.
Théorie intéressante pour les initiés, mais respirons par le nez, nous n'en sommes pas là encore. Les libéraux vont mieux, c'est vrai, mais ils sont encore loin d'une majorité. Et même d'une victoire, point, le Parti québécois conservant une nette avance chez les francophones.
Les libéraux, comme certains accidentés en pleine réhabilitation, font des progrès spectaculaires, ce qui ne veut pas dire pour autant qu'ils sont maintenant prêts à courir.
Une tendance lourde se dégage toutefois en faveur de Jean Charest. Depuis septembre, le taux de satisfaction de son gouvernement a grimpé de 33% à 61%, les intentions de vote générales sont passées de 24% à 34% et, chez les francophones, de 15% (un plancher historique) à 29%.
Mario Dumont et l'ADQ, par contre, suivent le chemin inverse, ceci expliquant cela. Les intentions de vote de l'ADQ étaient de 34% (37% chez les francophones) en septembre, elles ont chuté aujourd'hui à 22% (25% chez les francophones).
Depuis septembre, date qui correspond au retour à l'Assemblée nationale de Pauline Marois, on voit clairement la joute politique se recentrer au Québec entre libéraux et péquistes, laissant l'ADQ sur la touche.
Cela dit, la vie politique de l'ADQ est une longue balade en montagnes russes avec des descentes longues et spectaculaires et quelques remontées inattendues. Avant d'enterrer Mario Dumont, il faudra plus que six mois de sondage.
Comment expliquer ce retour de fortune de Jean Charest?
D'abord, on l'a assez dit ces derniers jours, parce qu'il gouverne mieux, il est plus alerte, ses ministres aussi et, surtout, il ne fait plus de gaffe.
Les Québécois, on le voit aussi clairement dans les sondages des derniers mois, ne sont pas impressionnés par l'ADQ et par son chef, Mario Dumont.
Ce nouveau sondage confirme en outre que les Québécois sont plus indulgents envers les libéraux qu'ils ne l'étaient pendant leur premier mandat.
Un exemple frappant: 60% des électeurs jugent acceptable le boni de 75 000$ versé au chef libéral par son parti, même s'ils pensent majoritairement qu'il aurait dû dévoiler cette entente plus tôt et que son salaire de premier ministre est suffisant.
Des sources diverses et solides
Nous avons publié hier, mon collègue André Noël et moi, une nouvelle dans laquelle nous affirmions, notamment, que le chef libéral adjoint, Michael Ignatieff s'était plaint, dans des rencontres privées, du fait que "Stéphane Dion n'a pas la stature d'un chef".
M. Ignatieff, sans surprise, a diffusé un communiqué hier niant cette information et réaffirmant sa loyauté envers M. Dion.
Nous avons, mon collègue et moi, des sources dignes de foi de divers milieux qui nous ont confirmé au cours des dernières semaines avoir bel et bien entendu les propos cités dans notre article.
Pour joindre notre chroniqueur: vincent.marissal@lapresse.ca


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