Je me souviens de ce célèbre jour où René Lévesque était en furie contre
De Gaulle, ce jour du retentissant «Vive le Québec libre !». Comme si nous
avions besoin d’un Grand Libérateur d’une puissance coloniale comme la
France pour décider de ce qui est bon pour nous. René Lévesque avait
compris, à l’époque, que c’était un dangereux précédent pour le Québec.
Nous n’avons pas plus besoin, aujourd’hui, des accents colonialistes d’un
autre président français pour venir nous dire ce qui est bon pour nous !
Déjà, par le passé, les Français nous avaient échangés aux Anglais contre
la Guadeloupe - quelques arpents de neige contre une montagne de sucre -
cette fois-ci, on se demande bien ce que cela sera ?
[->rub692]Peut-être une belle visite guidée dans le Nord du Canada avec l’équivalent
français de Lord Black, cet autre magnat de la Presse qui a été couronné
par l’Empereur Sarkozy : le Duc des Marais, régent de la Nouvelle-France.
Ce serait certainement une magnifique occasion pour la France de réparer
ses torts historiques à l’endroit des autochtones du Canada. D’ailleurs,
pourquoi pas la reconnaissance par la France des Nations autochtones du
Canada et leur droit à l’autodétermination. Le même genre de reconnaissance
que celle la Nation ethnique québécoise au sein d’un Canada uni et dans le
jugement de la Cour Suprême sur la sécession. Avec la bénédiction
internationale de la France, nous aurions alors tous les ingrédients pour
consacrer le principe de partition des territoires que les autochtones
occupent sur une base ethnique afin de créer une onzième province du
Canada!
Après tout, comme le Canada est une mosaïque culturelle qui s’est
construite grâce aux trois grands peuples fondateurs, il serait normal que
chacun de ces grands peuples occupe au moins un territoire qui lui soit
bien identifié. Ainsi, le Canada se diviserait en trois grandes zones : le
nord du Canada et du Québec aux Autochtones, le sud-est du Québec aux
Québécois et le reste du Canada aux Anglais !
Le Canada a déjà fait une fleur à l’Angleterre en cédant le Labrador à
Terre-Neuve pour que cette colonie puisse quitter le giron britannique.
Dans le même esprit, il serait juste que les trois peuples fondateurs aient
chacun au moins une province d’appartenance, le Québec étant alors invité à
participer à cet effort par nul autre que le nouveau grand libérateur
français Nicolas Sarkozy. Qui de mieux que la France pour suggérer
publiquement cette idée à l’occasion d’un grand voyage impérial dans le
Grand Nord Québécois ? Après l’Égypte, pourquoi pas le Nord du Canada!
Le général De Gaulle rêvait de traverser le Québec à bord du paquebot
France brillant de tous ses feux sur le majestueux Fleuve Saint-Laurent
afin de nous libérer du joug colonialiste des Anglais. Il l’a fait plus
humblement en suivant ses berges sur le Chemin du Roi jusqu’à l’Hôtel de
Ville de Montréal. Le président Sarkozy pourrait très bien réaliser le rêve
de grandeur de son illustre prédécesseur en devenant le premier grand
libérateur du XXIe siècle à traverser le Québec du sud vers le nord pour
offrir officiellement les excuses de son pays aux premiers habitants du
Canada afin de réparer les torts historiques de la France à l’égard des
Autochtones du Québec. Le genre d’image que Nicolas Sarkozy aimerait
laisser pour la postérité !
Après tout, même si la France a le mérite d’avoir découvert les premiers
Indiens du Canada, elle a aussi le tort d’avoir été la première à les
déposséder de leurs territoires. Elle a donc une dette morale envers ces
communautés, le devoir de reconnaître leur droit inaliénable à occuper leur
propre territoire. Ainsi, comme la France l’a si bien fait avec le Québec
par le passé, elle pourrait les accompagner dans leurs choix. Fini la
non-ingérence et la non-indifférence. Bienvenue l’accompagnement du Québec
et des Autochtones au sein d’un Canada uni ! Marianne pourra désormais
illuminer toute l’Amérique du Nord depuis son socle de New York. Après
Napoléon et Lafayette, Sarkozy !
Le tout serait cohérent avec cette nouvelle tendance internationale à
reconnaître la partition des territoires sur une base ethnique. Les torts
causés aux autochtones par les occupants Français et Anglais justifiant
amplement cette partition ethnique «sui generis» -- à l’intérieur du Canada
il va sans dire -- un cas qui aurait le mérite d’être unique, à l’exemple du
Kosovo. Ce qui ne peut être le cas de la nation québécoise qui a toujours
été bien traitée par l’occupant anglais, celui-ci lui ayant permis de
conserver sa langue, sa religion et son code civil !
Si les Québécois n’ont pas de mémoire, leur histoire en a une, et on peut
y trouver tous les justificatifs pour la réécrire d’une nouvelle façon, à
la manière de Nicolas Sarkozy, grand libérateur et président de la
République de France.
Morale de l’histoire, René Lévesque avait bien raison de se méfier des
Présidents de la France. À défaut d’un grand comme De Gaulle, on voit ce
que pourrait donner la visite d’un petit illuminé avec des airs de grand
Empereur!
Louis Lapointe
Brossard
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --
Sarkozy le Libérateur, petit essai de politique-fiction
Après Napoléon et Lafayette, Sarkozy !
Chronique de Louis Lapointe
Louis Lapointe534 articles
L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fon...
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L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.
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2 commentaires
David Poulin-Litvak Répondre
30 mars 2008Il faudrait vraiment préparer une réplique à Sarkozy, un évènement, un manifeste, etc.? sachant qu'il est évident qu'il a l'intention de lécher les bottes des amis de ses amis. Qui sait, au risque de déplaire à M. Lapointe, on pourrait peut-être lancer un grand: "Vive le général de Gaulle!" ?
Je suis un peu d'accord avec Lapointe et Lévesque lorsqu'ils affirment que ce n'était pas vraiment l'affaire du Général de Gaulle, mais bon, je crois qu'il faut voir la chose avec un certain recul, voire un peu d'humour. J'écrivais ailleurs: "Twé'de'goal'va'goalé'shé'vou pi'twé'voltèr'arpanti'twé!"
On ne peut quand même pas lui en vouloir d'avoir appuyé la cause indépendantiste. Pardonnons-lui, il était Français!
Archives de Vigile Répondre
29 mars 2008‘’Comme si nous avions besoin d’un Grand Libérateur d’une puissance coloniale comme la France pour décider de ce qui est bon pour nous. René Lévesque avait compris, à l’époque, que c’était un dangereux précédent pour le Québec’’
S’il vous plaît, ne comparez pas le général de Gaulle à Nicolas Sarkozy. Je pense qu’il faut un minimum de connaissance politique pour s’en apercevoir. Le général en plus d’affronter le nazisme lors de la dernière guerre, a eu à affronter aussi tous les coups bas de Churchill et surtout de Rosevelt. Il connaissait parfaitement, ce à quoi il s’engageait, quand il a déclaré son fameux Vive le Québec libre.
Je suis plutôt de l’avis de Pierre Bourgault quand il disait de René Lévesque suite à la déclaration du général, il traitait Lévesque de ‘’maudit épais, incapable d’analyser quoi que se soit, comme si le général venait nous dire quoi faire. C’était un discours extraordinaire, c’était pas impérialisme du tout.’’