Diane Berthelette - L'auteure est présidente-directrice générale du Centre de liaison sur l'intervention et la prévention psychosociales et professeure titulaire au département d'organisation et ressources humaines de l'UQAM.
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Le constat des auteurs du rapport publié par le Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO) selon lequel le Québec, comme la majorité des pays industrialisés, doit pallier le vieillissement de sa main-d'oeuvre, est clair. Bien que l'espérance de vie s'allonge, l'âge moyen du départ en retraite reste relativement constant. Ce vieillissement de la population, en plus de la diminution du taux de natalité, pourrait créer une pénurie de main-d'oeuvre dans plusieurs pays ainsi qu'un déséquilibre pour le financement des retraites et des systèmes de sécurité sociale.
Il s'agit donc d'inciter la population vieillissante à travailler plus longtemps. Mais quelle est la meilleure démarche à suivre?
Les analyses comparatives des politiques, adoptées dans différents pays, pour accroître la participation des personnes plus âgées au marché de l'emploi, indiquent que ce sont les pays d'Europe du Nord, les États-Unis et le Japon qui obtiennent les meilleurs résultats. La proportion de travailleurs âgés de 55 à 64 ans atteint près de 70% en Suède (OCDE, 2005-2006) et est respectivement de 60% et 67% aux États-Unis et au Japon (2000). Or, selon Statistiques Canada (2006), près de 52% des Québécois âgés de 55 à 64 ans travaillent encore, comparativement à 60% pour le reste du Canada.
Dans les pays nordiques, plusieurs facteurs contribuent à expliquer ces taux d'emploi importants chez les travailleurs âgés. Tout d'abord, le taux d'emploi global y est élevé. Par ailleurs, plusieurs politiques à l'égard de l'indemnisation du non-travail ont été implantées dès les années 90. Ces pays ont également procédé à des réformes importantes de leurs systèmes de retraite et adopté des politiques basées sur le cycle de vie et caractérisées par de la flexibilité et un niveau élevé de sécurité sur le plan social.
En Finlande, des programmes nationaux visent à améliorer la qualité de vie au travail ainsi que la santé et les capacités fonctionnelles, et ce, particulièrement chez les travailleurs âgés. Le succès des pays d'Europe du Nord réside dans leur stratégie globale et intégrée, définie conjointement par des représentants de l'État, des entreprises et des syndicats.
Le Japon et les États-Unis ont également procédé à des modifications de leur système de retraite, notamment en augmentant l'âge normal de la retraite. Les salariés passent tout d'abord par une phase de transition avant d'atteindre l'âge de la retraite définitive. Toutefois, pendant cette phase, le travailleur est bien souvent relégué à un emploi de second ordre ou comme travailleur temporaire à un salaire bien inférieur à celui qu'il gagnait auparavant. Il est probable que le taux d'emploi élevé des travailleurs plus âgés dans ces pays soit associé à la nécessité de travailler pour avoir accès à des programmes sociaux.
De nos jours, la perception des capacités des travailleurs plus âgés sur les plans physiques et psychologiques est bien souvent erronée dans les milieux de travail. De plus, les pratiques novatrices de gestion, visant à maintenir les employés vieillissants en emploi, sont peu développées. Pourtant, à l'instar des pays nordiques européens, plusieurs actions permettraient de rendre le travail plus attractif et d'encourager le report de la retraite.
Plusieurs chercheurs ont formulé des recommandations pour accroître le maintien en emploi des travailleurs vieillissants. Les plus fréquentes sont les suivantes :
- Contrer les mythes à l'endroit des travailleurs âgés et valoriser la main-d'oeuvre âgée.
- Offrir des perspectives de développement professionnel, tenant compte des facteurs de vieillissement, en donnant l'opportunité aux employés d'apprendre de manière continue, tout au long de leur vie.
- Organiser des activités facilitant le transfert de connaissances entre employés de générations différentes.
- Miser sur la flexibilité de l'organisation du travail par le réaménagement des tâches, la rotation de poste, les horaires variables et la conception de nouveaux équipements.
- Assainir les milieux de travail de manière à prévenir l'usure prématurée de tous les employés.
- Mettre en place des mesures de retraite progressive ou des systèmes de transition entre la carrière principale et la retraite en veillant à ce qu'ils ne soient pas de nouvelles occasions d'exploitation du personnel.
Malheureusement, les recherches permettant d'évaluer la capacité d'implanter de telles pratiques de gestion et d'en apprécier l'impact sont très rares. Il est important de combler ces lacunes avant de généraliser l'adoption de telles mesures dans les milieux de travail.
Repousser la retraite
Il s'agit donc d'inciter la population vieillissante à travailler plus longtemps. Mais quelle est la meilleure démarche à suivre?
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