Luc Deneault - Un entrefilet du Devoir m'apprend à l'instant que Michel Labrecque, président du conseil d'administration de la STM, songerait à «rebaptiser les lignes du métro de Montréal du nom de commanditaires» afin d'accroître ses revenus. Lors de la dernière campagne aux élections municipales de Montréal, M. Labrecque se réclamait souvent du pragmatisme pour se distinguer de son adversaire de Projet Montréal à la mairie du Plateau Mont-Royal, M. Luc Ferrandez. Le pragmatisme est bien souvent une façon doucereuse de masquer une abdication de certains principes liés à la défense du patrimoine public.
En 2001, le Massachusetts Bay Transportation Authority (MBTA), qui a la responsabilité du transport en commun dans la région de Boston, avait également envisagé de commanditer le nom de ses stations de métro, et le projet avait alors avorté rapidement, notamment à la suite de la désapprobation immédiate et vigoureuse du Boston Globe. À Montréal, on peut présumer d'une indifférence généralisée qui avaliserait cette abdication de M. Labrecque, alors que, paradoxalement, les interventions musclées du maire Ferrandez soulèvent la plupart du temps la controverse, si ce n'est le tollé, alors qu'elles sont tout à fait conformes à son programme politique.
Encore plus désolante, cette abdication inhérente au sous-financement de la STM est le symptôme d'une société qui n'ose nommer certains vices «structurants» des finances publiques et de la gestion des affaires publiques, telle qu'elle est exercée par des politiciens «pragmatiques». Ces derniers n'évoqueront ainsi jamais l'évasion fiscale, les faibles taux d'imposition et les crédits d'impôt consentis aux grandes entreprises et les redevances quasi inexistantes liées à l'exploitation des ressources naturelles pour expliquer les déficits récurrents des sociétés publiques qu'ils administrent. Dans ce cas précis, ce pragmatisme se traduit par la menace de voir un commanditaire s'approprier le nom d'une des lignes de métro de Montréal.