Je pense que Jean Charest est, depuis toujours, un obsédé absolu du pouvoir. Cela l’a amené à endosser régulièrement de nouvelles vêtures susceptibles de reconduire son parti et lui-même vers l’autoroute «idolâtrée» du pouvoir et de la puissance.
Lorsque le Parti progressiste-conservateur canadien a connu une absolue débandade au cours des années 80, Jean Charest a fini par en devenir le chef. Sa préoccupation était alors de dénicher le bon créneau «idéologique» pour régénérer et ragaillardir le parti et pour lui permettre de reprendre le pouvoir. Il a alors «testé» diverses idées ou idéologies, histoire de voir quel serait le «concept» (opportuniste) susceptible de reconduire son mirobolant parti vers de nouveaux succès électoraux.
Je me souviens, en dépit de mon «vieil âge», que Charest avait alors rencontré des représentants de l’extrême droite étatsunienne pour bien s’informer et s’imprégner de leurs idées. Ensuite il avait fait diverses consultations (et sondages) pour vérifier si, oui ou non, de telles idées étaient susceptibles de reconduire son parti vers le pouvoir. Ti-Jean était alors prêt à endosser un nouveau costume idéologique et réactionnaire si là était la route du pouvoir.
J’ose même affirmer que Charest a ouvert toute grande la porte du «harperisme» et de la dictature cool, perfide et sournoise qui sévit actuellement au Canada sans l’appui de la majorité des citoyens et surtout sans l’appui de la très grande majorité des Québécois. Ce n’est pas une dictature militaire mais c’est une dictature très militante qui corrode les libertés, ces libertés que Pierre Trudeau avait suspendues, pulvérisées et néantisées il y a quasiment un demi-siècle. Et maintenant c’est le brave petit Justin, un peu plus benêt que son célèbre papa, qui songe à devenir le nouveau chef du Parti (prétendument) libéral. Merdre, dirait le père Ubu.
Les libéraux québécois ont été éminemment putassiers lorsqu’ils ont demandé à la catin conservatrice de les conduire vers la victoire. Le brave conservateur et «con-serviteur» a alors décidé de changer de costume et de porter de «vieux habits neufs». Ce triste sire est prêt à changer sa garde-robe idéologique si le pouvoir est là, tout près, non pas au bout du fusil mais au bout de la tricherie et de l’opportunisme.
Charest est un fédéraliste enragé et enrageant mais je me demande s’il n’aurait pas accepté de porter les vêtements péquistes et souverainistes si ces vêtements avaient été, somme toute, l’autoroute qui l’aurait conduit vers ce pouvoir tellement convoité.
Je pense que la «carrière» de Jean Charest est largement résumée dans ce proverbe danois que j’aime bien citer assez régulièrement : «Si l’autorité n’a pas d’oreille pour écouter, elle n’a pas de tête pour gouverner.»
Je pense aussi que si Machiavel revenait, il affirmerait : «Ce jeune Charest a beaucoup de talent lorsqu’il s’agit de prendre ou de reprendre le pouvoir. Mais ce pouvoir, il ne sait pas comment bien l’exercer.»
Et voilà! Telle est ma perception dont je pense qu’elle est passablement marquée au sceau de la véracité. Soit dit sans prétention…
Jean-Serge Baribeau, sociologue des médias