Charmant! Les jeunes libéraux s'amusent avec la langue française dans le titre du document qui promeut leur prochain congrès: «En lys pour se démarquer». Cette légèreté tomberait sans doute moins à plat si le camp jeunesse du Parti libéral choisissait de se «démarquer» autrement qu'en prônant la politique de l'indifférence en matière de protection du fait français. Cette nonchalance ajoute à la menace.
La Commission-Jeunesse du PLQ (CJPLQ) part cet été en consultation. Ils n'éviteront pas de palper l'identité culturelle, avec, comme coeur saignant et battant, le domaine de la langue. Mais lundi, la présidente de la CJPLQ, Maripier Isabelle, a précisé comment s'édifieraient les murs de protection autour du français, version jeunes libéraux: des forteresses de papier, voilà ce qu'ils sont prêts à ériger.
On connaît la rengaine, celle au nom de laquelle rien ne vaut — pas même une langue en souffrance — d'égratigner le champ des libertés individuelles. Non que ce champ ne mérite guère d'être analysé, bien au contraire, mais en faire une priorité avant même l'analyse, voilà le piège de la facilité auquel succombe platement la jeunesse prometteuse...
Cette nonchalance sonne des cloches. Elle est pratiquée aussi dans le camp «senior» libéral à propos des affaires linguistiques. Lorsqu'il était toujours au PQ, le député Pierre Curzi a présenté une solide analyse montrant la menace pesant sur le français dans l'île de Montréal. La ministre responsable de la Charte de la langue française, Christine St-Pierre, l'avait sitôt qualifiée d'«alarmiste». Maripier Isabelle opte aussi pour la banalisation en affirmant que la situation du français à Montréal n'est «pas désespérée non plus». La tête bien enfouie dans le sable, quel danger les sentinelles pourront-elles détecter?
Les alliés naturels de la protection du français semblent s'épuiser et craindre les affronts. Le «fonds de commerce» du PQ, la langue, résistera-t-il aux secousses qui bousculent le Parti québécois? La chef Pauline Marois s'est engagée à reprendre dans le programme politique dévoilé ce matin toutes les propositions adoptées lors du congrès de mars, y compris l'idée d'étendre la loi 101 au cégep, mais ce morceau sera-t-il dans une liste d'engagements électoraux? On peut en douter.
Camille Laurin, père de la loi 101, en l'honneur duquel on vient tout juste d'inaugurer à Montréal un buste en bronze, avait fait de cette lutte le combat de sa vie. Se désolerait-il aujourd'hui d'en voir autant baisser les bras sans oser mener la bataille? Lui aussi se frotta aux critiques, mais il résista, sans plier. Quand il déposa son projet de livre blanc sur la politique linguistique, ce fut la consternation en 1977. Les partisans des libertés individuelles ne voyaient pas la nécessité d'autant de mordant législatif pour maintenir le français comme force collective. Mais même les plus irréductibles finirent par se ranger. Aujourd'hui, plus personne ne conteste le bien-fondé de ce rempart. Où est-elle, la prochaine génération de soldats de la langue?
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