(QUÉBEC) Le gouvernement Marois veut se positionner comme le défenseur de la langue française. Pour y arriver, il haussera la barre, quitte à rompre les discussions avec la Coalition avenir Québec (CAQ). Les entreprises à charte fédérale devront se conformer aux exigences de la Charte de la langue française si elles veulent obtenir des contrats du gouvernement du Québec.
Cette disposition ne se trouve pas dans le projet de loi 14, actuellement en discussion à l'Assemblée nationale. «Il n'y a pas d'article à cet effet, mais il s'agit d'une règle administrative appliquée par le Conseil du Trésor», a expliqué mercredi Shirley Bishop, responsable des communications au cabinet de Pauline Marois.
En point de presse, mercredi, le ministre responsable de Montréal, Jean-François Lisée, a brandi cette intention étrangement passée sous silence durant les cinq semaines de commission parlementaire.
Du côté de la CAQ, cette nouvelle condition est un obstacle de taille. Les discussions doivent débuter bientôt sur les amendements proposés par le gouvernement au projet de loi 14, et «pas question d'ajouter des mesures coercitives qui ne figurent même pas dans le projet de loi», prévient-on dans l'entourage du chef François Legault.
En point de presse, mercredi, le ministre Lisée a nié le fait que les amendements envisagés par Québec vident le projet de loi de sa substance.
La Presse a rapporté mercredi que Québec accepterait d'édulcorer son projet de loi, déposé le 5 décembre, notamment pour le statut bilingue des villes et l'admission des élèves anglophone au cégep en anglais.
Selon M. Lisée, le projet de loi «n'est pas du tout» adouci. «Le coeur de la loi est la capacité d'étendre la langue de travail en français aux entreprises fédérales sur le territoire québécois et aux entreprises de 26 à 50 employés, et là-dessus, on y tient», a-t-il soutenu.
Mais mercredi, le ministre Lisée a pris de court même les spécialistes du dossier au sein du gouvernement en sortant de son chapeau de nouvelles conditions.
Le 5 décembre, en déposant son projet de loi, Mme De Courcy avait soutenu que «les entreprises, incluant celles à charte fédérale, devront aussi respecter les différentes exigences de la Charte pour pouvoir obtenir des contrats des organismes publics et parapublics».
«Cette disposition était présente pour les entreprises de 50 employés et plus, mais elle était rarement appliquée. Dorénavant, je le répète, pour avoir des contrats, toutes les entreprises devront s'y conformer. Le président du Conseil du Trésor, Stéphane Bédard, avec toute sa rigueur, y veillera», avait-elle déclaré tout en déposant un projet de loi totalement muet sur cette question.
Assujettissement volontaire
Dans un second point de presse, mercredi, le ministre Lisée donnait plus de chair encore aux intentions du gouvernement. «La loi 101 ne s'applique pas à 10% des salariés du Québec qui sont dans des entreprises comme les banques, qui sont de juridiction fédérale», a d'abord souligné M. Lisée. «On leur demande de s'assujettir volontairement à la loi 101.» S'ils n'acceptent pas de s'assujettir, «c'est donc qu'ils n'acceptent pas de contracter avec le gouvernement du Québec».
Il soutient également que ces dispositions sont contenues dans le projet de loi 14, une erreur. «Ce que fait le projet de loi 14, c'est d'établir que si ces entreprises veulent contracter avec le gouvernement québécois, ses municipalités, ses universités, ce qu'elles font, elles doivent volontairement s'assujettir à la loi 101. C'est leur choix. Si elles ne veulent plus faire de contrats avec nous, c'est leur choix. C'est une façon plus inventive de faire en sorte que les droits de salariés francophones dans ces 10% d'entreprises-là soient protégés», a dit M. Lisée.
Selon lui, pour obtenir un contrat avec Québec, ces firmes devront détenir leur certificat de francisation, même si elles ne sont pas soumises à la Charte de la langue française, puisqu'elles sont sous juridiction fédérale.
Avec cette obligation, les banques qui cautionnent les prêts aux étudiants québécois devront se conformer à la Charte de la langue française si elles veulent transiger avec le ministère de l'Éducation.
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