Le lanceur d'alerte dont les informations ont poussé les démocrates à lancer une procédure de destitution contre Donald Trump a expliqué n'avoir pas eu connaissance directe de l'appel. Or sa retranscription exonère le président américain...
Depuis l'arrivée au pouvoir de Donald Trump, c'est un euphémisme de dire que la politique américaine est devenue hystérique. Après avoir essuyé pendant trois ans d'incessantes accusations sur sa supposée proximité avec la Russie – finalement balayée dans le rapport Mueller – le milliardaire est désormais cloué au pilori par l'opposition démocrate pour avoir «sollicité l'ingérence» de l'Ukraine dans sa campagne de réélection, en demandant lors d'un appel téléphonique au président Volodymyr Zelensky d'enquêter sur le fils du favori à l'investiture démocrate, Joe Biden. Point essentiel, les démocrates soutiennent que le président américain a conditionné une aide de 400 millions de dollars d'aide destinée à Kiev à la réouverture de cette enquête.
Alors qu'au plus fort de la crise sur «l'ingérence russe» elle s'était refusée à le faire, la présidente démocrate de la Chambre, Nancy Pelosi a cette fois cédé à la pression de l'aile gauche de son parti, et lancé le 24 septembre une procédure de destitution contre Donald Trump. Une démarche effectuée avant même la publication de la retranscription de l'appel téléphonique et qui s'appuyait uniquement sur les informations publiées dans la presse et fournies par le «lanceur d'alerte» en question.
Un «lanceur d'alerte» avec des informations de seconde main
Si les guillemets sont de rigueur, c'est que la publication du rapport du «lanceur d'alerte» – membre de la CIA, selon de nombreux médias américains, l'agence de renseignement avec laquelle Donald Trump entretient des relations notoirement difficiles – apporte un nouvel éclairage au dossier. Bien loin des Julian Assange, Chelsea Manning ou Edward Snowden qui ont révélé des secrets d'Etat à partir de documents officiels, dans ce rapport rendu public, le «lanceur d'alerte» explique ne pas avoir été témoin direct de l'appel, et n'avoir obtenu des informations sur son contenu que par des tiers.
En d'autres termes, une procédure de destitution du président américain a été lancée sur la base d'une rumeur, non étayée de preuves. Plus inquiétant encore pour la bonne santé démocratique de l'Oncle Sam, la retranscription de la conversation téléphonique entre le président américain et son homologue ukrainien – seule preuve tangible dans le dossier – ne montre rien d'illégal. Si Donald Trump demande bien à Volodymyr Zelensky de se pencher dans leur enquête sur le cas du fils de Joe Biden, il ne fait aucun chantage à l'aide américaine en contrepartie, comme cela avait pourtant été évoqué dans la presse.
Les autorités ukrainiennes ont par ailleurs annoncé ce 27 septembre que leur enquête ne portait sur les activités de Burisma Holdings qu'entre 2010 et 2012, soit une période antérieure à l'implication du fils de l'ancien vice-président américain Joe Biden dans la société. Difficile dès lors d'imaginer que Kiev ait cédé a une quelque pression dans ce dossier.
Une version par ailleurs confirmée par Kiev, comme l'a souligné Donald Trump dans un tweet : «Le président ukrainien a dit que je ne l'avais pas contraint à faire quoi que ce soit de mal. Il ne peut y avoir de meilleur témoignage que ça.» Pour le chef d'Etat américain, il ne s'agit ni plus ni moins que d'une énième attaque contre sa présidence. «Nous sommes en guerre», a-t-il ainsi confié face à des diplomates dans une intervention dont l'agence Bloomberg a publié une vidéo, estimant que la personne qui avait donné au lanceur d'alerte ces informations erronées, était «proche d'un espion».
Joe Biden : «Si le procureur n'est pas viré, vous n'aurez pas l'argent»
Le fond de l'histoire rappelons-le, ce sont bien les relations troubles entre la précédente administration américaine et l'ancien président ukrainien Petro Porochenko. Hunter Biden, deuxième fils de l’ancien sénateur Joe Biden, a en effet travaillé à partir de 2014, dans un groupe gazier ukrainien, alors que son père était encore le vice-président de Barack Obama. Or, de son propre aveu, Joe Biden a menacé le président ukrainien Petro Porochenko, en mars 2016, de retirer un prêt d'un milliard de dollars à Kiev s'il ne licenciait pas immédiatement le procureur général Viktor Chokine. Ce dernier supervisait une vaste enquête de corruption sur la société de gaz naturel Burisma Holdings qui employait le fils cadet de Joe Biden en tant que membre du conseil d'administration, rappelait ainsi The Hill en janvier dernier.
«Je leur ai dit : "Vous n'aurez pas le milliard [...] Je pars dans six heures, si le procureur n'est pas viré, vous n'aurez pas l'argent"», avait raconté Joe Biden lors d'une intervention au Council of Foreign Relations début 2018. «Eh bien le fils de p***, il s'est fait virer. Et ils ont mis en place quelqu'un qui était solide à l'époque», s'était-il également félicité.
La procédure de destitution lancée par les démocrates semble davantage mue par la volonté de réaliser un coup politique à un an des élections que par celle d'aller au fond d'une véritable affaire. L'accusation ne reposant – à l'heure actuelle – sur aucun élément tangible, elle n'a en effet aucune chance d'aboutir, puisque c'est le Sénat, à majorité républicaine, qui est chargé de juger Donald Trump.