Pour un progressiste souverainiste, voter stratégique c’est se leurrer

Ne pas tomber dans le panneau du vote stratégique

Élection Québec 2012

Texte publié dans Cyberpresse du lundi 16 juillet 2012 sous le titre "Gare au leurre du vote stratégique"

Pour un progressiste souverainiste,
_ voter stratégique c’est se leurrer

(ou encore)

Ne pas tomber dans le
_ panneau du vote stratégique

«Votez stratégique, votez utile». C’est la ritournelle que les propagandistes péquistes ressassent à chaque élection à l’intention des électeurs, issus de la mouvance progressiste souverainiste, en désaccord avec l’orientation néolibérale qu’a adoptée cette formation depuis le début des années 1980. Cette tactique, pourtant éculée, a eu du succès jusqu‘ici. On estime notamment qu’elle a ravi des milliers de votes à Québec solidaire lors des scrutins de 2007 et 2008. Et la même histoire risque de se répéter lors des prochaines élections.

On sait que cette anomalie démocratique est causée par le mode de scrutin majoritaire dont l’Angleterre a doté sa colonie canadienne au 18e siècle et qui n’a pas été modifié depuis. En accordant la victoire au candidat qui a le plus de suffrages, ce système fait en sorte que seuls les votes des électeurs ayant appuyé ce dernier comptent contrairement à la représentation proportionnelle où chaque vote compte permettant ainsi à toutes les formations de faire le plein de leurs appuis électoraux.

Les électeurs progressistes souverainistes, tourmentés entre leurs convictions et leur aversion pour le gouvernement Charest, devraient, à mon avis, tenir compte avant tout de la réalité suivante : les politiques néolibérales mises de l’avant par les gouvernements péquistes et libéraux, ainsi que le programme actuel des deux partis, sont de même nature. Ainsi, les gouvernements Bouchard et Landry ont mis la table pour le gouvernement Charest dans plusieurs domaines notamment par la privatisation des services publics; le culte voué au déficit zéro; les coupures massives dans la santé. l’éducation et l’environnement; les coupures dans l’assistance sociale; l’adoption de lois antisyndicales, la réduction de l’impôt pour les revenus élevés. Sur le plan de l’éthique, par ailleurs, la commission Charbonneau démontrera que le PQ est loin d’être blanc comme neige en matière de financement.

Depuis des décennies, le Québec est gouverné par des partis traditionnels défendant en priorité les intérêts de classe de l’establishment financier qui domine l’économie mondiale au détriment de la grande majorité de sa population. Il est urgent que les progressistes souverainistes donnent un coup de barre pour changer cette situation néfaste. Ils se leurreraient en accordant leur appui à un parti qui n’a pas respecté plusieurs de ses engagements importants alors qu’il était au pouvoir. Un gouvernement qui n’a jamais voulu, par exemple, implanter un scrutin proportionnel malgré les efforts déployés par René Lévesque et malgré l’engagement contenu dans le programme du parti de 1970 à 2111. La raison est simple quoique cynique : garder captive la mouvance progressiste pour conserver son hégémonie sur le mouvement souverainiste.

Paul Cliche, Montréal, 16 juillet 2012

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Membre fondateur du Mouvement pour une démocratie nouvelle et auteur du livre Pour une réduction du déficit démocratique: le scrutin proportionnel ; membre de Québec Solidaire; membre d’ATTAC Québec; membre à vie de la Société Saint-Jean Baptiste de Montréal.





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12 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    17 juillet 2012

    Il me semble important de rappeler que Québec solidaire est un parti souverainiste. Nombreux sont ceux qui, ici ou ailleurs, discréditent le parti de gauche en usant d'arguments aussi absurdes qu'infondés.
    En ce sens, combien n'est pas lassant cette sempiternelle répétition, selon laquelle QS aurait appuyé le NPD aux dernières élections fédérales, ce qui en ferait de facto un parti crypto-fédéraliste. Rien n'est plus faux ! QS a appelé à battre les conservateurs, en votant soit pour le BQ, soit pour le NPD, selon les appartenances idéologiques de chacun. Voilà pour la petite histoire !
    Maintenant, quant au souverainisme de QS, je vous invite à considérer ces quelques extraits significatifs, et à y réfléchir à deux fois avant de dire des énormités qui ne cachent au fond qu'un refus de reconnaître que la scène politique québécoise se modifie actuellement, et que le PQ n'a plus le monopole de la souveraineté du Québec :
    1-Citation de la déclaration de fondation de QS, en 2006 :
    « Le Québec et son peuple, la nation québécoise, doit disposer de tous les pouvoirs nécessaires à son plein développement aux plans social, économique, culturel et politique, ce qui lui est refusé dans le cadre fédéral. Québec solidaire opte donc pour la souveraineté. Sans être une garantie, elle est un moyen de fournir au Québec les outils nécessaires pour réaliser son projet de société et s’épanouir pleinement comme peuple. Notre parti propose que le débat sur l’avenir du Québec se fasse au moyen d’une vaste démarche de démocratie participative et il met l’essentiel de ses énergies à construire un projet social et politique fondé sur la recherche du bien commun. C’est donc sur cette base qu’il invite les citoyennes et citoyens de tous les horizons à en devenir membres.»
    Source : http://www.quebecsolidaire.net/declaration-de-principes
    2-Aussi, nous avons fait la promotion de l'indépendance du Québec lors des dernières élections en 2008. Voici notamment un extrait de notre plateforme électorale de l'époque :
    « Axe 7 Faire du Québec un pays par la souveraineté populaire : Québec solidaire veut impliquer tout le Québec dans l’atteinte de notre souveraineté nationale. L’engagement de l’ensemble du peuple dans la définition de nos institutions et de notre organisation sociale est la stratégie que Québec solidaire propose pour nous mener vers ce pays à construire. Pour Québec solidaire, notre projet de société et notre projet de pays sont intimement liés et la démocratie repose au coeur de ces deux volontés. Notre démarche vers la souveraineté se fera dans le respect des nations autochtones. »
    Source : http://www.quebecsolidaire.net/engagements_2008#Peuple_du_Quebec
    3-Aussi, extrait des résultats des votes de l'Enjeu 1. Ceci fait intégralement partie de notre programme politique, depuis le 22 novembre 2009 :
    « C’est en ce sens que nous considérons comme essentielle l’accession du Québec au statut de pays, mais aussi parce qu’elle est nécessaire à la préservation et au développement d’une nation unique par son histoire et sa culture en constante évolution, autour d’une langue commune qu’est le français. Si certains changements proposés par Québec solidaire peuvent et devraient d’ores et déjà se faire dans le cadre constitutionnel actuel, l’intégralité de son projet de société ne pourra se réaliser que si le Québec dispose de l’ensemble des pouvoirs aux plans politique, économique et culturel. C’est du même coup ce qui permettrait de concrétiser une aspiration démocratique profonde de la nation québécoise. »
    Source : http://www.quebecsolidaire.net/files/Programme-ENJEU_1-Democratie.pdf
    QS est un parti souverainiste qui devrait être reconnu comme un allié stratégique crédible, pertinent et utile. En critiquant sans cesse QS de manière infondée, vous manquez votre cible, en plus d'engluer le débat politique québécois, déjà en bien piètre état.

  • Archives de Vigile Répondre

    17 juillet 2012

    Monsieur Cliche,
    Comme vous le savez sans doute, et ce n'est pas peu dire, le système uninominal à un tour est une cochonnerie héritée du régime britannique. Il faut par ailleurs rayer le libéralisme dévoyé, colporté par l'à-plat-ventriste John J Charest et ses bouffons-drabes suffisants, satisfaits et ineptes, de la carte.
    D'autre part, la crainte exprimée il y a quelques années par monsieur Jacques Parizeau à l'effet que les générations suivantes de la sienne, en raison de sa satisfaction relative face aux institutions actuelles, causée en partie par le manque d'informations et l'apathie aux choses publiques, et par ailleurs ayant hérité tout de même d'une conscience et d'une confiance en son identité nationale, grâce aux efforts du PQ et du RIN en ce sens et en son temps, ne ressentent plus l'urgence de faire la souveraineté / l'indépendance du Québec, se comportant comme dans un pays indépendant sans en avoir les attributs reconnus internationalement.
    Ce qui mène aux diverses études de monsieur Pierre Drouilly qui constatent le morcellement grandissant du vote, caractérisant l'offre politique plus ou moins bidon qui nous est offerte et résultant de l'individualisme clientéliste dont souffre notre société, au final inefficace et contreproductive dans ce système conçu pour gouverner sans le peuple.
    IL Nous faudra donc, à force de pédagogie intensive et en démontrant quotidiennement et avec des exemples concrets pour le Peuple illustrant l'ineptie démocratique du régime de parlementarisme britannique, mettre encore une fois (la dernière ?) nos oeufs dans le même panier.
    Il Nous faudra tous voter en se bouchant le nez, mais ensuite faire des pressions intenses (à la manière étudiante ?) pour incliner un gouvernement Marois vers la réforme du scrutin appelée par vous de tous vos voeux et sur tous les tons depuis de trop longues années maintenant.
    Toute autre stratégie de vote utile (à moins d'une entente tacite pour des échanges de comtés prenables) nous mènera à une quatrième mandat du recordman John J Charest, le moins brillant parmi les cancres qui nous gouvernent.
    JE vous remercie de de bien vouloir rester patient, et en toute déférence à votre pugnacité proverbiale quant à la cause urgente de la réforme du scrutin, la récompense n'en sera que plus grande.

  • Jacques Bergeron Répondre

    17 juillet 2012

    La meilleure méthode permettant l'élection du parti mafieux, le PLQ en l'occurrence, est de faire nôtre la suggestion de M.Cliche.Pour moi et des milions de Québécois-e-s,les différentes philosophies, (socio-politique et économique et quelle autre ?) passent après celle de l'idéal d'un peuple et la fonte des partis dans une coalition, que seul le vote à deux tours peut permettre. Je rêve du jour où on pourra choisir de se rallier derrière le parti politique de notre choix lors du deuxième tour d'une élection. Comme plusieurs Québécois croient que la multiplication des partis est la réponse à la présence du PLQ au pouvoir,John Charest demeurera premier ministre du Québec pour «encore» de nombreuses années. En attendant si on faisait pression sur les partis politiques afin qu'ils inscrivent dans leurs différents programmes qu'ils modifieront le mode de scrutin en fonction d'un mode à deux tours avec un mode compensatoire permettant à un parti ayant obtenu 5% du vote populaire, mais n'ayant pas de député élu, de déléguer un de ses membres comme député à l'assemblée nationale. On ferait ainsi oeuvre plus utile que de former des partis politiques qui mèneront les électeurs dans une impasse politique, tout en permettant à Charest de demeurer au pouvoir indéféniment et aux Québécois-es de continuer à se battre entre eux et elles, comem des esclaves.

  • Archives de Vigile Répondre

    16 juillet 2012

    L'idéal serait de vivre une situation politique où on pourrait se débarrasser à la fois de Charest et de Marois, car le peuple n'est pas entiché ni de l'un ni de l'autre.
    Avec un gouvernement péquiste minoritaire, Marois aura de la difficulté à se maintenir en selle. Il y aura alors et peut-être une course au leadership avec un nouveau chef crédible et aimé de la population qui pourra mettre le cap sur l'indépendance et procéder à une vaste réforme de notre système politique de gouvernement représentatif.
    Donc, je ne voterai pas PQ. J'en suis incapable. Ni pour le chef ni pour sa doctrine de gouvernance provinciale déguisée en gouvernance dite "souverainiste".
    On a assez fait rire de nous. C'est terminé.
    Pierre Cloutier

  • Archives de Vigile Répondre

    16 juillet 2012

    Il est parfaitement imaginable que le prochain gouvernement puisse se faire élire avec moins de 25 % du vote populaire, si son pouvoir politique est basé sur la corruption, le contrôle des médias et d’un appui massif
    d'une minorité aveugle et concentré à Montréal.
    Dans ce sens, comment comprendre la position d’observateurs aguerris de notre système politique qui réclament la proportionnelle lors du prochain scrutin avant d’obtenir la légitimité de la mettre en application. Le combat doit se faire à armes égalent, après tout est possible !

  • Archives de Vigile Répondre

    16 juillet 2012

    Mme Simard, votre hypothèse est allarmante mais voter stratégique c'est oublier ce pour quoi on doit voter. Étant partisan d'Option Nationale, il est clair que pour moi c'est l'indépendance qui doit avoir la priorité. Les manoeuvres pour nous "débarasser de Charest" bien que louables ne font que détourner l'attention des vrais objectifs et nous éloignent de nos idées de base. L'objectif maintenant n'est pas la vengeance. Celle-ci n'est inscrite dans aucune des plateformes de parti.
    En supposant que le Québec vote selon son coeur et que votre scénario-catastrophe se réalise, Charest reporté au pouvoir ne pourra pas diriger plus d'un an. Il perdra l'appui de ses ministres et devra quitter au premier budget. Mais avant il aura probablement livré quelques-uns d'entre eux au bûcher de la justice. Marois n'ayant pas eu suffisamment d'envergure pour déloger la crasse et la corruption (et c'est ce que le PQ nous dit en accusant ON et QS de diviser le vote), elle devra quitter son poste et le PQ devra réviser sa plateforme. Option Nationale et Québec Solidaire de leur côté gagneront des voix sans perdre de plumes, ils auront parlé et fait connaître leur vision du Québec plutôt que de concentrer leurs énergies sur un parti de minables.
    Un tel gouvernement du PLQ ne pourrait rester en place plus d'un an et il serait probablement plus enclin à adopter la proportionnalité, des élections à date fixe et quelques autres broutilles.
    Voilà ce que donnerait votre scénario qui, admettons-le n'est parmi les meilleurs sans être parmi les pires. On verrait un rebrassage d'idées, une grande session de chaise musicale. Gardons la tête froide et invitons les enfants pauvres de la politique, les plus démunis, les otages de Harper-Charest, ceux qui croient n'avoir que le PLQ comme refuge : les autochtones, les anglophones et les néo-québécois, invitons les à élargir leur horizon et à participer avec nous à construire un État différent.
    Le grand gagnant ne pourrait être que le Québec.

  • Archives de Vigile Répondre

    16 juillet 2012

    Pour les souverainistes progressistes, c'est Option nationale! Québec solidaire, parti plus fédéraliste que souverainiste, ne se fera pas voler des votes par le PQ, mais par le "NPD" du Québec: http://www.radio-canada.ca/nouvelles/Politique/2012/07/16/002-union-citoyenne-nouveau-parti-st-gelais.shtml

  • Archives de Vigile Répondre

    16 juillet 2012

    Et ne pas le faire, c'est s'autoenculer soi-même. Basta les théories théoriques. Si on pense que je vais gaspiller mon vote en votant QS pour le simple fait de sombrer digne et stoïque avec mes principes, ben on repassera...
    Là aujourd'hui, ici maintenant, ce qui urge c'est de se débarassser de John James charest, avant qu'il ne finisse de détruire complètement ce qui reste des particularités de notre société.
    Et je vais voter PQ.

  • Archives de Vigile Répondre

    16 juillet 2012

    Paul Cliche, vous dénoncez
    "la réduction de l’impôt pour les revenus élevés".
    Or, le Parti québécois promet d'abolir la taxe santé de 100$ en 2011 et de la rembourser et de 200$ en 2012.
    Les sommes d'argent perdues seront remplacées par un impôt plus grand pour les revenus élevés.
    Votre argumentation contre le vote stratégique pour le PQ tombe donc à l'eau. On se serait attendu à plus de rigueur de la part d'un homme de votre réputation comme le dit l'ineffable Didier.
    Pour battre Charest, il ne faut pas éparpiller les votes de l'opposition mais les concentrer sur le Parti québécois qui a le plus de chances de prendre le pouvoir: voir la partielle dans Argenteuil où le PQ a gagné. Ce qu'il faut conseiller aux jeunes, c'est de voter PQ pour se débarrasser de Charest, cette nuisance publique.
    Lors du forum sur l'éducation, on pourra prôner la gratuité scolaire et augmenter les impôts des ingénieurs, des avocats, des médecins, des notaires etc qui auront bénéficié de la gratuité scolaire. Il y aura eu le précédent de la taxe santé...
    robert barberis-gervais, 16 juillet 2012

  • Archives de Vigile Répondre

    16 juillet 2012

    Voter pour qui alors? Pour Québec Solidaire, accointer avec le NPD de Mulcair, ultra-fédéraliste. Ça fait pas très progressiste non plus, au fait c'est encore pire; et de plus ça ne fait même pas souverainiste. Franchement!
    Jacques L. (Trois-Rivières)

  • Archives de Vigile Répondre

    16 juillet 2012

    Ce système à la con hérité des Britanniques peut faire théoriquement, et en pratique, que Charest soit reporté au pouvoir avec 20% des suffrages exprimés lors des prochaines élections, la plus grande partie de ses appuis lui venant des anglos-allos, étrangers aux vrais enjeux québécois. Si, dans le même temps, Option nationale récolte, disons, 19%, QS 19%, le PQ 19%, la CAQ 19% et, les autres, 4%, Charest est reporté au siège de premier ministre. Difficille dès lors ne pas penser «vote stratégique», surtout dans le contexte de braderie générale, de corruption et de taxation par tarification inhérent aux «valeurs» néo-libérales du PLQ. L'alerte est générale, certes. Mais est-ce qu'il faut courir sauver les meubles de la maison en feu avec les premiers pompiers arrivés ou on attend que tous les autres arrivent?

  • Archives de Vigile Répondre

    16 juillet 2012

    Je suis content de vous lire monsieur Cliche, vous que je considère comme probablement le plus important et le plus pertinent théoricien du parti Québec solidaire.
    Votre analyse sociale et politique du Québec est on ne peut plus juste. Vos mises en garde sont extrêmement pertinentes. Encore une fois, vous frappez dans le mille.
    Bravo et merci pour cet article et pour toute votre oeuvre. Vous êtes un grand Québécois monsieur Cliche.